Ne me dites pas que la lune brille
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Ne me dites pas que la lune brille

Avec la confiance à son niveau le plus bas et les nuances de plus en plus floues entre réalité et fiction, seuls ceux qui sont prêts à afficher ouvertement de quoi ils sont faits l’emporteront.

Depuis que l’on considère les milléniaux comme un groupe influent avec un réel pouvoir d’achat, de nombreuses marques ont adopté la tendance de l’authenticité. En utilisant le langage et la terminologie associés, ces multinationales ont déformé les valeurs fondamentales qu’elles étaient censées personnifier jusqu’à ce que -ironiquement- elles perdent toute authenticité.

Six ans plus tard, les MacDonald’s et Häagen-Dazs de ce monde tentent désespérément de nous faire croire que leur poulet grillé ou leur collection de crèmes glacées sont « artisanaux », parce que leur agence de publicité doit leur avoir dit que c’est ce qu’il fallait pour plaire à la génération hipster.

Ce faisant, ils n’ont pas considéré l’importance des valeurs « rurbaines » tel que le commerce à petite échelle et hyperlocal, focalisant plutôt sur la production de masse avec une façade « fait main ».

Ce peut sembler un compromis décent pour une entreprise qui ne souhaite pas changer complètement ses processus pour gagner de nouvelles parts de marché, or les consommateurs, de plus en plus éduqués et sophistiqués ont dorénavant les outils pour pouvoir questionner la légitimité de ces allégations.

Hier, la discussion tournait autour de la célébration de la « diversité » et des « [youtube href= »https://www.youtube.com/watch?v=XpaOjMXyJGk »]vraies femmes[/youtube] ». Aujourd’hui, les consommateurs voient clair dans ces jeux de marketing et savent que la plupart des initiatives tape à l’œil de développement durable des entreprises ne sont que de l’écoblanchiment.

Arrêtons de nous cacher

Les marques, ceci dit, ne sont pas les seules coupables. Alors que la réalité virtuelle est sur le point de se répandre et de se démocratiser, de nouvelles questions se posent au sujet de notre comportement en ligne, tout spécialement lorsqu’on se cache derrière un avatar.

Si le harcèlement sexuel est depuis longtemps un problème connu dans l’univers du jeu et des communautés en ligne, la RV a le potentiel de faire sentir ces abus de manière beaucoup plus physique et immersive, comme Jordan Belamire en a tristement fait l’expérience.

Plus proche de nous, la controverse autour du discours d’acceptation de Safia Nolin au gala de l’ADISQ démontre clairement que le sexisme et la cyberintimidation sont bien vivants ici aussi, facilités une fois de plus par la distance et l’anonymat relatif des réseaux sociaux, des forums de discussion et autres avatars en ligne.

Dans une poignante lettre ouverte publiée par Urbania, la jeune auteure, compositrice et interprète demande : « Pourquoi tu me hais autant ? » avant de répondre elle-même à sa question : « Parce que je suis une femme. Parce que j’ai été moi-même. La personne que je suis devenue après tout le caca, après des années d’intimidation tellement violente que j’ai dû aller à la police et changer d’école sept fois. »

Alors là, voici une femme qui n’a pas peur de se montrer telle qu’elle est. Voici une femme avec des valeurs fortes, qui est passé à travers un enfer et qui s’en est sortie pour pouvoir raconter son histoire. Ça, c’est le genre d’histoire dont on a besoin.

Ça suffit les conneries

Le mois dernier, la communauté discutait de #CMTransparency. Des étiquettes alimentaires à la mode « douce » (slow fashion), à la législation des drones et aux chaînes de blocs, le besoin de transparence impacte profondément la façon dont on magasine, vote et consomme.

On l’a vu récemment au sud de la frontière, le peuple en a assez des réponses préfabriquées avec soin. Le fait qu’une majorité ahurissante a élu Donald Trump 45e président des États-Unis démontre à quel point le peuple américain en a assez du politiquement correct, même si les alternatives ne sont pas nécessairement plus jolies. Cette nécessité de changer est devenue trop importante pour être niée.

Fait main. Sur-mesure. Artisan. Immersif. Disruptif. Innovant. Authentique. Il est temps de tuer ces termes galvaudés. Fini l’esthétique et les codes d’éthique empruntés ; il n’est plus temps de se cacher derrière des habits haute couture. Nous devons migrer vers un nouveau narratif. Un narratif qui aligne réellement communication et action.

Rester vrai

En regardant les histoires de Safia Nolin et -à l’autre bout du spectre- de Donald Trump, j’ai envie de dire que le succès doit avoir quelque chose à voir avec le fait de trouver sa propre voix plutôt que de se conformer à ce que d’autres veulent entendre.

Au lieu de se cacher derrière une image de soi consciencieusement bâtie et gardée avec zèle, niant en bloc tout ce qui pourrait venir défier notre perception de nous-même, peut-être serions-nous mieux de reconnaître que personne n’est parfait, et de célébrer nos expériences uniques et leur impact sur notre perspective.

Par exemple, clamer au monde entier à quel point nous valorisons l’intégrité et l’inclusion n’a aucun poids si nos actions ne suivent pas derrière. Là où les méga-données peuvent prédire des occurrences, des performances ou des résultats de tests, l’expérience et la narration ont le pouvoir de montre une perspective entièrement nouvelle d’une même situation.

Que ce soit pour un entretien d’embauche, un premier rencart ou une publicité pour un nouveau produit, utiliser l’imagination pour évoquer -non pas dire- de quoi nous sommes faits captive beaucoup plus. Et si vous croyez toujours que la créativité et l’imagination ne sont pas pour tout le monde, réfléchissez-y. Les enfants naissent créatifs, on leur désapprend sur les bancs d’école ! Ce dont on a besoin, c’est simplement de ralentir et de prendre le temps de remarquer.

Tels des photographes, nous devons nous libérer de nos moules et explorer différentes perspectives de la même scène jusqu’à ce que nous trouvions l’angle qui démontre précisément ce que nous avons à dire.

Ce mois-ci, CreativeMornings explore la fantaisie*. Alors allez-y, explorez, découvrez votre voix, mais avant toute chose, soyez vous-même.

Texte : Audrey Raby

Illustration: Hayden Davis

 

* Nous explorons également ce que cela signifie de VIVRE dans un monde créatif avec le mot clic #InACreativeWorld, et comment nous pouvons utiliser la créativité pour le bien de tous. Les réponses les plus intrigantes deviendront des illustrations qui seront disponibles ici.