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Plagiat international 2.0 – La Det Norske VS des créateurs steampunk… dont un Québécois!

On a l’impression d’assister à un polar en temps réel!

Cette histoire remonte au 30 octobre dernier. Daniel Proulx, un créateur et bijoutier Québécois qui donne dans l’esthétique steampunk, reçoit un courriel d’un de ses admirateurs. Ce dernier, au hasard d’une revue qu’il feuilletait à l’occasion d’un vol à bord d’un appareil de la ASA Norwegian Airline, avait reconnu une de ses bagues, très typique de son travail. Elle se trouve insérée dans une publicité de la compagnie pétrolière norvégienne Det Norske mais présentée comme un bracelet qu’une femme aux allures futuristes porte au genou. Cet admirateur joint à son courriel une photo de la publicité.

Daniel Proulx reconnaît effectivement sa bague. Elle est en tout point semblable à sa création originale. On peut la voir, ci-bas, à droite. À gauche, le détail agrandit de la publicité…

Aucun doute, c’est bien sa bague, donc. Mais ce qui lui saute aux yeux, c’est surtout le casque que le personnage tient sur son bras. Il s’agit d’un casque de scaphandrier créé par un autre artiste steampunk américain qu’il connaît bien pour avoir exposé avec lui, Tom Bandwell, tel qu’on peut le reconnaître ici, à droite. À gauche, toujours le détail agrandit de la publicité.

Assez stupéfait et convaincu d’avoir bel et bien devant les yeux des emprunts à des œuvres connues, Proulx entreprend donc d’écrire à Tom Bandwell pour le prévenir de cette utilisation de son œuvre ainsi qu’à la compagnie pétrolière en question, pour savoir de quoi il en retourne.

En attendant la réponse, Proulx et Bandwell tentent d’en savoir plus sur la compagnie en parcourant le site web de cette dernière. C’est ainsi qu’ils découvrent le rapport annuel de 2010, disponible en PDF, où Bandwell reconnaît encore certaines de ses œuvres utilisées pour illustrer le document ainsi que des œuvres d’un autre artiste de la communauté steampunk, Frank Buchwald, qu’ils connaissent bien.

Les images suivantes laissent peu de place au doute. Il s’agit bien de leur travail.

Par exemple, ici, à gauche, une image tirée du rapport annuel de la Det Norske et à droite, un masque créé par Bandwell.

Ici, à droite, toujours une image tirée du rapport annuel de la même compagnie et, à gauche, une lampe crée par Frank Buchwald.

Ça ne s’invente pas. Par le plus curieux des hasards, ces trois artistes qui se connaissent pour avoir exposé ensemble et pour être cités dans de nombreux ouvrages consacrés à l’esthétique steampunk se retrouvent unis sans le savoir, si on peut dire, au sein de la production graphique d’une compagnie pétrolière norvégienne!

Daniel Proulx n’a jamais reçu de réponse de la Det Norske. Il semble que ses messages ont été transférés à un designer, Steinar Rolseth Ness. Ce dernier aurait réalisé les images litigieuses pour le compte d’une firme graphique norvégienne du nom de Scanpartner, tel qu’on peut le voir sur le site web de cette dernière. Je transcris ici sa réponse intégralement et telle quelle…

I used bits and bobs to piece things together in stempunk stile. In you case it was the casing of the sub I guess. Of course you would reconize  som shapes if they are yours. Steampunk is putting things together, that dont belong together. For me you things was an inspiration.

The guy at det norske read several designs in you mail and that scared him of course.. I see this as inspired by, and there is no design involded, just bits and bobs in a heap.

I appogize if I have offended you”

Proulx n’a pas répondu à ce premier courriel. Il en recevait un second quelques jours plus tard, toujours signé Steinar Rolseth Ness.

Please respond. This is rather important that is sorted because this drawing is a personal favor, and has personal relations that I dont wanna mess up. I’m not a comersial business, but my personal relation to Det norske is important.

Et voilà… Ce Steinar Rolseth Ness semblait admettre avoir utilisé des items stempunks trouvés un peu partout sur le web afin de créer une sorte de collage, allant même jusqu’à présenter ses excuses. La Det Norske, elle, n’a jamais donné signe de vie.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Soucieux de se faire entendre, les trois compères ont pris la décision d’utiliser les médias sociaux afin de diffuser l’information en relatant les divers emprunts litigieux de leurs œuvres. La routine habituelle dans ce genre d’affaire. Ils ont créé un groupe Facebook pour diffuser la nouvelle, ils en ont parlé sur twitter, ont écrit à plusieurs reprises à la Det Norske qui, à ce jour, n’a jamais répondu à leurs courriels.

Toujours est-il que le 10 février dernier, Bandwell recevait une mise en demeure lui demandant, ainsi qu’à Proulx et Buchwald, de cesser toute diffusion sur les médias sociaux des faits concernant l’utilisation de leurs œuvres et les allégations de plagiat. L’avocat, Elling André Lillefulir du bureau Leagalconsult Asvokat à Trondheim, représentant de Steinar Rolseth Ness et Vanett, sa compagnie de design personnelle, soutient, entre autre, que la Det Norske n’a rien à voir dans cette histoire, que cette compagnie n’est qu’un client de Roslseth Ness.

Si les trois créateurs entendent continuer la diffusion de l’information qui les concerne, ils sont menacés de poursuites en dommages, lesquels pouvant atteindre 300 000$ car la compagnie Det Noske pourrait cesser d’utiliser les services de son client…

Avouez que c’est pas mal, non? Je te pique ta création pour la revendre à une compagnie pétrolière mais si tu en parles, je te poursuis car tu risques de me faire perdre mes autres contrats… Vraiment très fort!

Les trois compères n’ont pas cessé leurs actions… Bien au contraire, Bandwell a même créé un blogue où il affiche les divers éléments de preuve contre le designer et demande même au public de tenter d’identifier d’autres éléments « empruntés » à des créateurs par Setinar Rolseth Ness.

http://art-theft.blogspot.com/

Hier, le designer Steinar Rolseth Ness est subitement disparu de Facebook, où il publiait ses montages empruntant les œuvres ici en litige. Hier, c’était le blogue de Bandwell qui disparaissait mystérieusement de la toile, quelques heures, pour revenir ensuite…

Une histoire à suivre… Pour vous tenir au courant, vous pouvez vous inscrire à leur page Facebook en suivant ce lien!