Analyse des fondements et des contenus du programme Éthique et culture religieuse
Des associations laïques, dont l’Association humaniste du Québec (AHQ), le Mouvement laïque québécois (MLQ) et le groupe féministe Pour les droits des femmes du Québec (PDF-Q), réclament, auprès du ministre de l’Éducation François Blais, le retrait du volet religieux du cours Éthique et culture religieuse (ÉCR).
Pour le compte de l’AHQ et en collaboration avec le MLQ, j’ai analysé les fondements du programme ÉCR ainsi que les contenus de certains manuels destinés aux élèves du primaire et du secondaire. Ce que l’on y trouve est ahurissant et dépasse tout ce que l’on avait imaginé lors du lancement de ce cours. Le contenu religieux, présenté sous une rhétorique ministérielle comme étant « culturel », est décuplé par rapport à l’ancien cours de religion et n’a en rien perdu son caractère confessionnel. On a tout simplement ajouté, aux croyances et rituels chrétiens, les croyances et rituels juifs, musulmans, bouddhistes et amérindiens, en plus du spiritisme, de l’ésotérisme et de pseudosciences telle l’astrologie.
Je reproduis ici l’introduction de ce document d’analyse publié sur le site de l’AHQ (cliquez sur le lien « Analyse ECR » à la fin de la lettre au ministre. J’invite ceux et celles qui, à la suite de mes blogues précédents sur ce sujet, ont douté des orientations confessionnelles (intentionnelles ou non) de ce cours, à prendre le temps nécessaire pour parcourir ce document. Vous serez surpris.
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Analyse des fondements et des contenus du programme Éthique et culture religieuse
Nous avons analysé les fondements et objectifs du programme Éthique et culture religieuse (ÉCR) ainsi que les contenus d’une vingtaine de volumes et cahiers destinés aux élèves du primaire et du secondaire.
Il en ressort que les contenus d’enseignement transmis aux élèves sont manifestement et même explicitement confessionnels. La juxtaposition de diverses religions ne change en rien ce caractère.
L’exclusion de personnes sans religion des contenus de ce programme (sauf une mention en secondaire 4) donne une image déformée de la réalité socioreligieuse et, à première vue, semble contrevenir au droit à l’égalité reconnu dans les chartes québécoise et canadienne puisque ces citoyens ne sont pas traités de façon égale par ce programme scolaire obligatoire pour tous.
À la lumière du récent jugement de la Cour suprême du Canada sur les prières dans les assemblées municipales, il semble bien que ce cours ne passerait pas plus le test des droits à la liberté de conscience et à la liberté de religion ni l’obligation de neutralité religieuse de l’État. Dans ce jugement, la Cour a en effet affirmé à plusieurs reprise que
«l’État ne doit pas s’ingérer dans le domaine de la religion et des croyances. L’État doit plutôt demeurer neutre à cet égard, ce qui exige qu’il ne favorise ni ne défavorise aucune croyance, pas plus que l’incroyance.» (p. 7 de la version PDF)
Manifestement, il y a exclusion de l’incroyance dans le programme ÉCR et cette exclusion est intentionnelle. La prétendue approche culturelle du religieux, qui ne résiste pas à l’analyse des contenus, ne saurait non plus servir de caution. La Cour affirme en effet que
«Si, sous le couvert d’une réalité culturelle, historique ou patrimoniale, l’État adhère à une forme d’expression religieuse, il ne respecte pas son obligation de neutralité.» (p. 8)
Il ne nous apparaît pas souhaitable de rétablir le droit à l’exemption de ce cours même si la situation apparaît, sous certains égards, pire qu’à l’époque du régime d’exemption. Ce serait un pis aller augmentant encore plus l’effet d’exclusion. Bien que la preuve semble avoir été déficiente, une telle disposition a d’ailleurs été refusée par la Cour suprême aux parents de la Commission scolaire des Chênes.
Saupoudrer des contenus humanistes incroyants ici et là ne nous semble pas la solution non plus.
Nous préconisons plutôt le retrait pur et simple du volet culture religieuse et l’enrichissement du volet éthique. Nous présentons ici l’ensemble des éléments qui nous conduisent à cette conclusion.
La suite ici.
Concernant l’exemption de ce cours
Tel que mentionné dans cette introduction, l’exemption du cours ÉCR ne nous paraît pas la bonne solution. Le MLQ a lutté pendant 20 ans contre l’exemption de l’enseignement religieux parce que c’était une procédure discriminatoire qui ne faisait qu’aggraver l’exclusion des élèves exemptés. Nous n’allons pas revenir à ce régime.
Il nous semple y avoir matière à une plainte auprès de la Commission des droits de la personne pour violation du droit à l’égalité et du droit à la liberté de conscience. Cette procédure peut prendre quelques années.
En attendant et parallèlement à la demande du retrait du volet religieux, PDF-Q lance tout de même de son côté une invitation à demander une dérogation de ce cours pour les parents qui considèrent leur liberté de conscience brimée. Il est plus que probable qu’aucune commission scolaire n’accepte une telle demande puisque aucune procédure en ce sens n’est prévue par la loi et que la Cour suprême a déjà refusé ce droit aux parents catholiques. Il faut considérer cette démarche comme une solution temporaire et une mesure de pression sur les commissions scolaires visant à manifester son opposition à ce cours. Il sera aussi intéressant d’en analyser les réponses.
Croire qu’une force surnaturelle agit dans la réalité est une superstition. Ce n’est pas le rôle de l’école d’aider à la diffusion des superstitions.
Le cours d’ECR est-il un cours sur Dieu ou plutôt un cours concernant le « SAVOIR VIVRE ENSEMBLE » à partir de faits culturels concrets?
Est-ce le but du cours d’ECR de répondre à la question du philosophe, mathématicien et physicien Leibniz, posée en 1740, « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?
Pas tout à fait…
ECR tient simplement du fait que notre société était essentiellement de culture catholique, que cette caractéristique conserve un impact sur les questions éthiques et légales dans transformation multiculturelle que nous vivons actuellement.
Si je comprends bien, la proposition de cet article est de suggérer d’isoler les enfants des athées et des agnostiques du reste de la population dans une sorte de communautarisme individualiste et fermé pour par la suite mieux défaire notre « SAVOIR VIVRE ENSEMBLE » qui aura comme conséquence de mieux frustrer tout le monde…
Vous n’avez pas du tout compris le propos. L’Association humaniste ne propose aucunement d’isoler les enfants agnostiques ou athées mais bien au contraire de briser l’isolement dont ils sont victimes dans le cours ÉCR puisque ce cours évacue toute forme d’incroyance et même la croyance non-pratiquante.
Comment peut-on prétendre viser le « vivre ensemble » lorsqu’on marginalise 25% des élèves (ceux sans religion) ou même la majorité non pratiquante? Ce cours en est un de normalisation de la pratique religieuse et de promotion de l’appartenance religieuse. Ces objectifs n’ont pas à relever de l’école publique.
Monsieur Baril, écrire que je n’ai pas compris est plutôt facile. Mais ne demandez-vous pas une dérogation pour les parents de retirer leurs enfants du cours d’ECR? N’est-ce pas une forme d’isolement ?
Étant donné la réalité multiculturelle existante, pourquoi ne pas simplement ajusté une partie du contenu du cours d’ECR à la réalité culturelle et éthique de l’agnosticisme et de l’athéisme que vivent certaines familles… si ce n’est pas déjà fait. Ma fille de 14 ans m’est arrivée l’autre jour tout fier en me disait : papa je suis agnostique et l’autre jour en me parlant des dieux grecs et de Percy Jackson et l’autre jour du lien entre nos lois et le Deutéronome, pourquoi pas?
Des jeunes, catho, protestant, ortho, juifs, athées, musulmans, hindous, sikhs, etc. se retrouvant ensemble heureux et surtout curieux de connaître tant d’éléments de culture…
Pourquoi les priver de la diversité?
Le texte est très clair sur le fait que l’exemption n’est pas la solution. La dérogation dont il est question dans la dexu;eme section n’est pas demandée par l’Association humaniste ni par le Mouvement laïque québécois mais par le groupe féministe Pour les droits des femmes du Québec.
J’ai mentionné cette opération pour informer les lecteurs que d’autres associations réclament des modifications profondes du cours. Le texte précise que pour PDF-Q l’exemption est un aménagement provisoire en attendant le retrait du volet religieux.
Ce cours nous parait impossible à réformer parce qu’on ne peut parler à des enfants de 6, 7, 8 ans de façon « culturelles » de croyances religieuses.
À 14-15-16 ans, le problème ne se pose plus de la même manière.
Monsieur Baril
Lorsque vous écrivez: « Ce cours en est un de normalisation de la pratique religieuse et de promotion de l’appartenance religieuse », Je vous rassure, mais n’est pas c’à du tout. Je vous propose un stage en milieu scolaire pour vérification et peut-être de devenir conférencier à des jeunes des secondaires 1 et 2 suivants ce cours.
Moi je vous invite à consulter notre document d’analyse. C’est le but de ce blogue: http://assohum.org/Media/ECR/Analyse%20ECR.pdf
Monsieur Baril, l’ambiguïté majeure de votre texte tient du fait qu’il conclut par une fausse note de discordance entre deux des trois organisations de votre trinité. Quel est votre mandat concernant le PDFQ? Quel est le mandat de représentation du MLQ et de l’AHQ envers les 937 545 personnes au Québec qui se déclaraient sans religion selon le recensement canadien de 2011?
Merci de votre référence.
Au sujet de votre texte mis en hyperlien, pourquoi ne fait-il jamais référence au texte du programme d’ECR des niveaux l’élémentaires du MELS? Connaissiez-vous ce texte?
http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/dpse/formation_jeunes/EthiqueCultRel_Primaire.pdf
Vous saupoudrez bien sûr quelques exemples. Peut-on par contre en faire une généralité surtout en ignorant le programme du cours en question?
Le fait religieux est une réalité actuel et culturel incluant probablement bien des auteurs que vous vénérez. Si vous avez déjà lu les œuvres de Nietzsche ou de Onfray, vous constaterez que les prénoms de Jésus, de Mahomet et de Moïse y sont écrit bien plus souvent au cm carré qu’ils ne le sont dans le cursus du cours d’ERC.
Ordonner à l’école une tabula rasa du fait culturel religieux, n’est-ce pas lui sommer de faire comme une autruche qui s’enfonce la tête bien profondément dans le trou béant de l’ignorance face à un fait culturel et social incontestablement réel touchant nos enfants? Mieux vivre ensemble… en commençant par l’ignorance?
Pour éviter le piège dans lequel était tombé la faction des « Exagérés » chez les Montagnards, pourquoi ne pas continuer à apprendre aux jeunes enfants à se connaître et à vivre ensemble en premier? Nous aurons bien le temps par la suite de les aider à développer leur esprit critique.
Je connais très bien le programme ÉCR pour avoir suivi son développement depuis les origines, à partir de la recommandation du rapport Proulx. Comment aurions-nous pu produire cette analyse sans d’abord avoir connu le programme?? Je donne lien vers le programme dans cet autre blogue ainsi que vers d’autres textes plus anciens:
La lutte contre l’intégrisme passe par le retrait du cours ECR.
Le lien vers le programme n’est pas inclus dans le document d’analyse parce que ce document était destiné au ministre de l’Éducation. Nous citons toutefois le programme à au moins trois reprises.
Nous n’en sommes plus à la rhétorique des pieuses orientations théoriques du programme mais à analyser ce qu’il se fait en classe avec les manuels destinés aux élèves. Le ministre n’a pas ces manuels en main.
Contrairement à ce que vous affirmez, ce ne sont pas que quelques exemples isolés; nous avons retenus au moins un volume par années scolaire et les extraits sont très représentatifs des contenus religieux retrouvés dans chacun de ces volumes. Pour en mettre plus, il aurait fallu les reproduire en entier.
Je vous suggère aussi cet autre blogue rapportant le jugement de la Cour suprême sur la plainte de Loyola à l’effet de l’imbrication entre religion et éthique dans le cours ÉCR:
Éthique et culture religieuse : le jugement de la Cour suprême confirme l’échec de cette approche
Monsieur Baril, puisque vous écrivez: « Je connais très bien le programme d’ECR… » Pourquoi alors ne pas analyser le cursus ministériel de ce cours dans votre document d’analyse et pourquoi vous concentrez-vous uniquement sur quelques faits divers?
Puisque vous n’avez pas répondu à ma question: « Quel est le mandat de représentation du MLQ et de l’AHQ envers les 937 545 personnes au Québec qui se déclaraient sans religion selon le recensement canadien de 2011? Je me permet de soulever le fait que vous utilisez dans vos textes des expressions un tantinet extrémistes et dictatrices. En voici certaines ponctuées de quelques-une de mes réflexion.
« La seule avenue envisageable… »
Est-ce le fruit d’une large consultation populaire?
« Un État laïque ne peut imposer un enseignement neutre … »
Ne confondez-vous pas le cursus ministériel avec la pratique de l’enseignement. N’est-ce pas là une forme de puritanisme humaniste touchant l’univers de l’opinion?
« Bref l’affirmation forte des valeurs humanistes communes et universelles »
Existe-t’il vraiment une seule éthique humaniste conformiste? Le grand gourou de cette éthique commune et universelle sera-t’il le grand manitou de l’AHQ? Comment concilier les notions de liberté, de tolérance, d’indépendance, d’ouverture d’esprit et de curiosité indissociables à l’humaniste classique avec ce que vous proposez?
« Sur le plan des valeurs citoyennes communes, l’école québécoise est aux antipodes de l’école républicaine française » Lisez ceci et vous en serai scandalisé…
http://m.leplus.nouvelobs.com/contribution/228334-l-ecole-privee-catholique-un-scandale-pour-la-republique.html#player_load
« une véritable opération de formatage cérébral destiné à nourrir un insatiable besoin de religion. » C’à doit faire longtemps que vous n’avez pas rencontrer des enfants du primaire. Je pourrais vous confier en fin de semaine 14 ou 15 enfants de 7 ou de 8 ans pour vérification de leur « formatage cérébral ».
« il faut déconstruire la pensée religieuse »
Voulez-vous obliger tout les croyants à des camps de déconstruction et de reconstruction cérébral ?
« Alors que nous avons lutté pendant 20 ans contre la confessionnalité scolaire, le combat est à refaire pour obtenir le retrait de ce cours. »
Vingt ans de travail ardu, inutile et coûteux pour rien? Qu’elle abnégation pour un travail sans fin sans pouvoir espérer le repos éternel à la fin de ses jours!
« est décuplé par rapport à l’ancien cours de religion et n’a en rien perdu son caractère confessionnel. »
Je n’ai tout de même pas le goût de vous laissez dans l’absolu découragement. Puisque le confessionnel est lié à la confession de foi, combien y a t’il de jeunes au Québec qui ont fait une confession de foi à la fin de leur cours d’ECR? Ne vous en faites pas trop. Sauf sur de très rares invitations, il n’y a ni pasteurs, ni patriarches, ni prêtres, ni rabbins, ni imams et ni gourous qui traînent dans les écoles publiques…et monsieur Adil Charkaoui n’est pas le principal conseiller du ministre de l’éducation.
« cette exclusion est intentionnelle. » Vous jugez que le Gouvernement a excommunié 937 545 personnes au Québec?
En vous souhaitant une heureuse fin de semaine ponctuée du rire joyeux des enfants sortant d’un cours d’ECR et surtout accompagné de cette pensee du Prince des humanistes: « « Nulle société, nulle vie en commun ne saurait être agréable ou durable sans folie, à telles enseignes que le peuple ne pourrait supporter une minute de plus le prince, ni le seigneur le valet, ni la servante la dame, ni l’ami l’ami, ni l’épouse l’époux, s’ils ne se consentaient mutuellement tantôt de se tromper, tantôt de se flatter, puis à regarder sagement entre les doigts, ensuite à s’enduire d’un peu de miel de folie. »
Pierre Shehyn
L’intégriste athée ou agnostique est une forme subtile de fanatisme sectaire. L’objection de fond contre la démarche précédente contre ECR, pilotée par M. Baril et consorts, c’est qu’au nom de la liberté de conscience et croyance, il faille limiter cette même liberté… Ce fut l’argument de base de la funeste charte Drainville. Quand Voltaire écrit : « La superstition enflamme le monde; la philosophie l’éteint. » Il faut comprendre : le FANATISME enflamme le monde; l’AMOUR l’éteint. Bien compris, le christianisme enseigne l’amour de Dieu. D’ailleurs, le même Voltaire écrit : « L’amour, dans un pays d’athées, ferait adorer la divinité. » (Dictionnaire philosophique, « Amour »)