Oubliez les blockbusters d’Hollywood et leur 3D à la con : les géniaux Teutons de chez Kraftwerk, eux aut’ y l’ont l’affaire.
Dans la pub, on parlait d’un show en trois-dimensions. À l’arrivée, on nous refile d’emblée des lunettes en carton, non pas des stéréoscopiques classiques (teintées en anaglyphique rouge et bleu, donnant souvent un résultat inégal ou peu efficace) mais bien celles de type polarisé, comme dans les cinémas, mais en plus cheap. Et laissez nous vous dire que l’effet était plus que réussi et surtout vachement immersif. Magique même.
Hier au soir, on est entré dans une matrice allemande hors du commun. Un peu comme si on pénétrait à l’intérieur de l’arcade de Tron (bonjour Daft Punk!), en compagnie d’ancêtres de Rammstein provenant d’une autre dimension.
Pendant un peu plus de 120 minutes, les 4 claviéristes-machinistes de Kraftwerk ont livré une prestation audio-vidéo hallucinante. En fait, leur spectacle multimédia fut quasiment aussi captivant que l’intense et inoubliable film-choc Enter the Void de Gaspar « Irréversible » Noé (notamment sur la planante pièce Neon nights) — bien qu’aucunement trash, il va sans dire : les maîtres ès pop électronique ont beaucoup trop de classe pour daigner tenter de choquer qui que ce soit.
Oh oui, le groupe de Ralf Hütter (membre fondateur qui mène la barque depuis 1970) a compris – avant d’autres pointures comme DJ Shadow et Amon Tobin – qu’un show d’électro doit s’accompagner de visuels originaux pour atteindre le top en spectacle, parce qu’on sait tous que des mecs derrières leurs consoles, tables tournantes ou laptops, ça peut souvent être plate en simonac’.
Jouant habilement avec la spatialité des infographies, les projections amalgamaient souvent du CGI (ou imagerie générée par ordinateur) de base, leurs environnements 3D manquant cruellement de textures et d’animations décentes, rappelant des vidéoclips autrefois novateurs (i.e. le clip de Money for Nothing de Dire Straits) ou ce bon vieux jeu Wolfenstein sur PC. Comme par exemple sur l’enivrante pièce Autobahn, avec ses projections de course automobile mettant en vedette des VolksWagen Beetle et Mercedes Benz. Drôle mais limité.
Cependant, ça fonctionnait beaucoup mieux lorsqu’on restait dans un minimalisme plus design, en jouant avec des saisissants visuels de type 8-bits et autre typographies rétro-futuristes. D’ailleurs, ça cadrait bien plus avec leurs beats gargantuesques conjugués au futur antérieur, salves de claviers impériales et autres séduisantes constructions soniques ultra-dansantes.
Tout le contraire de leurs interprètes, qui sont restés scotchés derrière leurs claviers toute la soirée (2 spectacles affichant complets le même soir, faut le faire!), physiquement statiques, sans jamais dire un mot à leur public. Évidemment, comme leur gimmick est parfaitement robotique, on leur pardonnera aisément l’absence d’interaction, comme ils se sont fendus d’un clin d’œil montréalais fort sympathique : ils ont inclus une photo de la marquise du Metropolis (visité par une rutilante soucoupe volante!), qui porte incidemment le même nom qu’une pièce tirée de l’album classique The Man-Machine (1978).
Ce dernier a par ailleurs été joué presqu’intégralement, alors que le coup d’envoi du spectacle fut donné par la bombe atomique The Robots. Ne vous inquiétez pas, tous les hits y sont passés. En plus de ceux tirés de l’indémodable album susmentionné, on eut droit également à des tubes tirés de Tour de France Soundtracks, Computer World et Radio-Activity.
Bref, leurs musiques mathématiquement manufacturées, à la fois colorées, entraînantes et hypnotisantes, sont souvent simples mais diablement efficaces et évidemment über-accrocheuses. Même ceux qui sont normalement allergiques au vocoder (qu’ils utilisent abondamment) se surprenaient à succomber au charme de chacune de leurs envoûtantes mélodies. Non, on ne devient pas un groupe culte pour rien. Très forts, ces Allemands.
Danke sheun!
PHOTOS + GIFs animés : KRISTOF G.