Ça s'esclaffait du rire du pilier de bar (ferme et gras) à la Taverne Alexandre hier soir pendant que s'abattait sur Sherbrooke une tempête de glace digne du film du même nom d'Ang Lee. Les habitués se félicitaient d'avoir choisi la Molson Ex dans une flûte givrée et le tabouret en bois verni plutôt que la Molson Dry dans un verre de plastique et la chaise de parterre. «Surfin' USA» devenait «Surfin' dans la bouette». Ça allait et venait dans la porte avec, comme butin, quelques grêlons dans les mains.
Pas trop préoccupé par la Fête du lac à l'eau, Mario, le tavernier le plus carpe diem en ville, ne pensait déjà qu'à la maison au bord de l'eau et au ponton récemment acquis qu'il allait retrouver le week-end venu. «Y'annonce beau!», se répétait-il. Le ponton: une sorte de surf que l'on pratique une fois les enfants grandis, prélude d'une douce retraite à l'horizon, à l'âge où la seule vague que l'on convoite est le sourire de la femme que l'on a la chance de toujours aimer quand on lui offre le premier verre de vin de l'après-midi.
Plus à l'Ouest, au parc Jacques-Cartier, les jeunes femmes à la page testaient l'imperméabilité de leurs bottes de pluie à motifs naïfs. Résultat: charmantes les bottes, mais pas efficaces. Certains boomers, plus astucieux, avaient recouvert leurs sièges de bâches. Le terrain, vaseux, invitait à la prudence. Pas le goût de tomber et d'avoir les vêtements boueux d'un enfant dans une pub de javellisant.
La grande scène couverte de plantes vertes pour les Beach Boys était de mauvaise augure. Quelques chansons m'ont suffi (la première pour être franc: une version cruellement poussive de Surfin' Safari); ni les Beach Boys de Mike Love, ni la béatitude de la foule n'allaient avoir raison de ma mauvaise foi, de ma désolation. Avec ses larges mouvements de bras style crooner, au ralenti, Love avait tout d'un Pierre Lalonde sur les valiums. La casquette des Beach Boys vissé sur sa tête résumait bien la soirée. Les Beach Boys de 2009 est une marque de commerce, prétexte à chanter et à faire rouler l'économie, dont on baptise trompeusement un groupe afin d'attirer le plus grand nombre, comme on appose le logo Nike sur une casquette cousue en Chine pour 2$, question de la vendre 50$.
Je n’aurais pas dit mieux. J’y étais aussi, et j’ai attendu deux chansons au complet avant de me tourner vers mon frère, dont le regard en disait également long. Quand ils sont entamé « California Dreaming,’ au grand plaisir des quelques personalités publiques de la ville qui étaient à mes côtés et se dandinaient franc avec l’index en l’air, je regrettais franchement mon lit. Même les quelques pièces de Pet Sounds sonnaient comme une programmation de clavier de 1993 avec des solos de guitare discutables qu’on pourrait, au mieux, qualifier de « bluesés ». J’ai pris le chemin du retour après trois-quart d’heure, avant de recevoir un message texte de mon frère, dont la succinteté trahissait le désespoir : Kokomo.
ouais… je suis une grande fan,mais… comme vous dites…
Même si Mike Love et Bruce Johnston allaient être les seuls vrais membres présents… Même si j’avais vu Brian Wilson l’année dernière (et j’ai dévoré des tonnes de biographies sur le sujet dans la dernière année)… je savais bien que je serais un peu moins touché par ce show. Mais, si on a l’occasion une fois dans sa vie de voir les Beach Boys live pour vrai… c’est sûr, ç’aurait été mieux il y a 30 ou 40 ans…
C’est bien sûr que c’est dans un festival, avec pleins de mononcles et matantes qui connaissent seulement deux mots des paroles du refrain de certaines chansons, que le un son est assez à chier et pas très fort… Les gars sont rendus vieux, le tempo des chansons est réduit de moitié… MAIS LA VOIX DE MIKE LOVE est toujours à donner des frissons! Les chansons sont bonnes, et je me réconcilie avec eux quand commence God only knows… Une belle soirée donc QUAND MËME, malgré qu’elle ait commencé par ce monstrueux orage pleins de grêlons et d’éclairs au 10 secondes, malgré que je sois trempée et que je sois malade pour une semaine après…