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Roman-savon à Granby, catharsis incluse

Allons-y sans détour: la meilleure scène de Roman-savon, la pièce de théâtre EN été présentée à l'Ancien presbytère de Granby, est celle de la première rencontre (bien que la scène arrive juste avant l'entracte) de nos deux protagonistes, Julie et Philippe, dans un lancement de roman érotique, rencontre qui culminera par une séance de batifolage dans les toilettes publiques.

Loin de mes considérations bloguesques, Chantale, ma voisine de table (le théâtre compte tout au plus 50 places) n'avait de cesse de se scandaliser, pendant l'entracte, que l'on puisse avoir imaginé quelque chose d'aussi furieusement charnel et qu'on l'ait, de surcroît, représenté sur scène. O.k., allons-y sans détour: Chantale n'en pouvait plus que son chum lui chuchote des cochonneries à l'oreille pendant l'entracte, émoustillé qu'il était à l'idée de relations sexuelles dans les lieux publiques. Un chum qui était peut-être une première date  en fait (faudrait lui offrir le Code Boilard) et qui, selon toute vraisemblance, ne connaissait pas la signification de l'expression "poursuivre de ses assiduités".

Catharsis pour catharsis, un des spectateurs assis à l'avant de la salle, la bière presque déposée sur la scène, ne laissait pas sa place. Monsieur n'avait pas été mis au courant qu'il ne s'agissait pas d'une pièce interactive. «Méchante folle», s'exclama-t-il après que Philippe ait énuméré les travers de sa belle-mère. N'y avait-il pas un module "Bonnes manières et expériences esthétiques" dans les cours de F.P.S. au secondaire?

Roman-savon, presque huis clos dans une salle de bain portant sur les relations homme-femme et l'engagement, tient donc de l'épisode moyen de Un gars, une fille, au-dessus de la mêlée du théâtre d'été en général, grâce à la qualité de ses comédiens, Martin Gougeon et Mélissa Dion Des Landes. Quelques choix dramaturgiques sont sympas, que l'odieux de la peur de l'engagement repose sur les épaules de la fille, plutôt que du gars, par exemple.

La pièce n'évite pas quelques blagues qui mériteraient bien un petit repos pour honorables services rendus aux auteurs de séries humoristiques:

  • La fille qui assure qu'elle est calme en criant: «OUI JE SUIS TRÈS CALME!!!»
  • Toutes les comparaisons impliquant le membre viril masculin et une pâte alimentaire.
  • Toutes les comparaisons impliquant la poitrine d'une femme et un agrume.

Roman-savon ne donne cependant pas que dans les clichés et quelques délires de ses auteurs (Martin Gougeon, Martin Boisclair, Louis-François Grenier) apportent de l'eau au moulin. Certains d'entre eux devraient obligatoirement être inclus dans chacune des pièces de théâtre d'été pour les 25 prochaines années:

  • Une toilette qui parle (À peu près aux trois quarts de la pièce, Philippe tient un échange charnière avec son bol de toilettes, un peu comme si les scripteurs de South Park avaient usurpé les ordinateurs des auteurs d'Un gars, une fille pendant leur pause-café.)
  • Le personnage d'un cambrioleur métrosexuel.
  • Le récit, par Julie, des infidélités de son père avec, comme marionnettes, des produits de toilette.

Les trois dernières représentations de Roman-savon (m.e.s.: Émilie Gauvin) sont présentées les 20, 21 et 22 août prochain.