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Manger de la laitue: Au Roi du coq rôti (toujours) en lock-out

Il était environ 15 heures quand de nombreux Sherbrookois se sont réveillés – paupières collées, raideurs corporelles, haleines nauséabondes -, premier après-midi de 2010, avec une intenable envie de diluer leur brosse de la veille dans le poulet BBQ, la coleslaw et la sauce brune du Roi du coq rôti, institution de la poitrine gras trans et de la frite ondulée, rue Camirand, depuis 1965. Une «partie du patrimoine sherbrookois», selon le député bloquiste Serge Cardin (une déclaration qui lui assure mon vote pour les prochaines élections). Signale le numéro, attend, attend, pas de réponse; les employés du Coq rôti sont en lock-out et, contrairement au Journal de Montréal, il n'existe aucun succédané QMI-briseurs-de-grève-légaux de leur poulet.

Si le simple présage de manger de la laitue un premier janvier suffit sans doute à émouvoir les vrais noceurs (je les entend déjà exiger l'intervention du Conseil des services essentiels), apprendre que les 48 employés du Coq rôti piquettent depuis le 20 juillet 2008 achèvera de convaincre même Georges Laraque de la tristesse et de la sévérité de la situation.

Les audiences de la Commission des relations de travail en août dernier (la première rencontre entre les deux partis) n'ont que davantage mis en lumière la mauvaise foi des propriétaires Réjean et Alain Perreault. En février dernier, les employés affectés au service de livraison (logiquement une des principales sources de revenu du restaurant qui ne compte pas de salle à manger) recevaient une lettre de congédiement. Devant le commissaire, les propriétaires finirent par admettre que le service était rentable et que son démantèlement répondait à leur désir d'alléger leur charge de travail. La CSN maintient pour sa part qu'il ne s'agit là que d'une tactique (un coup bas) visant à briser le syndicat.

La banalité des demandes syndicales dépeint à elle-seule le ridicule de l'impasse auquelle font face les lock-outés. Pas question ici de semaine de 4 jours. Parmi les plus ahurissantes (d'après le site web de la CSN Estrie):

  • l'accès au contrôle du ventilateur (un ventilateur a été obtenu lors de la dernière négociation, mais le contrôle est dans le bureau de l'employeur!);
  • la fourniture des crayons aux réceptionnistes;
  • la réparation des planchers perforés de certaines voitures de livraison qui affichent plus de 300 000 km;
  • l'obtention de «plastichanges» (cartouches de plastic pour la monnaie; l'employeur juge que les cartouches en papier pour rouler environ 650 $ de monnaie par soir sont suffisantes pour faire le dépôt).

En attendant un règlement, que l'on souhaite rapide aux syndiqués, quelques propositions qui apaiseront les convulsions des épicuriens-à-petit-budget en sevrage forcé (cold turkey):

  • Réclamer l'intervention de l'UNESCO. (Serge Cardin a l'air de vouloir s'en occuper. On ne va pas freiner un bloquiste qui a le goût de travailler, ça arrive si peu souvent.)
  • Demander aux lock-outés de couler la recette de sauce brune sur la blogosphère (excusez-la!).
  • Commander du Saint-Hubert (apport calorique comparable, moins grande satisfaction patriotique).
  • Manger de la laitue (apport calorique risible, reconnu pour causer des problèmes d'estime de soi).

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Dans un autre dossier, le mystère plane toujours sur l'avenir du bar\spectacles le Téléphone rouge. Rejointe au téléphone (pas le bar, l'appareil de communication), la propriétaire Geneviève Legault avouait ne pas être en mesure de fournir plus de détails.

Le bar de la Wellington Sud est fermé depuis mi-décembre, «pour rénovation» peut-on lire dans sa vitrine et sur son site web.

Pas de Coq rôti, plus de Téléphone rouge? Allô Dionysos? Es-tu au chômage?

Ne reste plus qu'à s'abonner aux concerts de l'OSS. Des paniers bios Équiterre, il y en a l'hiver?