BloguesÉlise Desaulniers

Les politiciens peuvent-ils se mettre n’importe quoi dans la bouche ?

Festivals, bébés dans les bras  et soupers communautaires. Pendant l’été qui s’en vient, les élus vont montrer qu’ils sont à l’écoute de leurs citoyens en échangeant sourires et poignées de mains dans tous les rassemblements publics possibles. Ces grands moments à la gloire de la démocratie seront immortalisés de quelques clichés officiels et repris dans les journaux du coin. C’est la même chose aux États-Unis où le Président fait campagne autour des stades de baseball et des fêtes de quartier. En marge de ces célébrations, une tradition remise en question par un groupe de médecins: la photo du politicien mordant dans un hot dog.

Fidel Castro, 1959
George W. Bush, 1998
Barack Obama, 2011

Le PCRM, le Physicians Commitee for Responsible Medicine a lancé il y a quelques semaines une pétition demandant à la Maison Blanche d’émettre un décret interdisant les photos officielles montrant le Président, sa famille, le vice-président ou les membre de son cabinet en train de manger toute nourriture qui serait mauvaise pour la santé, ce qui inclut les charcuteries, cause de cancer et d’obésité. L’initiative a fait sourciller: on va quand même pas commencer à dire au monde quoi manger. En même temps, un politicien ne peut déjà pas faire n’importe quoi sur une photo officielle. On serait choqués de voir Obama griller une cigarette en souriant à la caméra* alors que la pratique était courante il y a à peine quelques années. Pourquoi ne l’est-on pas quand on le voit consommer des aliments tout aussi dommageables pour la santé, l’environnement et qui tuent des milliards d’êtres sensibles ? Même si la pétition n’a pas recueilli suffisamment de signatures pour être déposée officiellement, la question posée demeure pertinente.

Des chiffres

La consommation de viande rouge et de viande transformée (jambon, bacon, viandes froides et charcuteries) est fortement liée à l’apparition de certains cancers. Ceux qui consomment beaucoup de la viande rouge courent 20% plus de risque de mourir d’un cancer et 27% plus de risque de mourir d’une maladie cardiaque que ceux qui en mangent peu ou pas. La production de viande constitue également un problème environnemental grave, responsable de 18% des émissions de CO2. Réduire sa consommation de viande du cinquième a le même impact environnemental que remplacer sa voiture traditionnelle par une Prius. Et c’est sans parler des vies qu’on fauche pour se nourrir. Au moment où vous lisez ces lignes, seulement au Québec, près de 4 millions de cochons et plus d’un million de bovins attendent d’être tués pour leur viande. Des animaux comme nous, comme nos chiens et chats, que l’on met au monde, qu’on élève dans des conditions misérables et qu’on tue dès qu’ils sont assez dodus, strictement pour en consommer la viande.

Robert Bourassa, 1974
Michael Ignatieff, 2011

L’exemple qui confirme la règle

Les élus doivent donner l’exemple. Leur image est sans doute beaucoup plus influente que toutes les campagnes de sensibilisation que peuvent mettre en place les ministères. Nos choix alimentaires sont des décisions qui ont des conséquences sur l’environnement et la vie d’animaux. Quand on est un politicien, ce qu’on mange peut aussi avoir des conséquences sur la santé des citoyens. C’est un choix éthique. Si les politiciens ne peuvent pas faire n’importe quoi dans le cadre de leurs fonctions, ils ne peuvent pas non plus avaler n’importe quoi. Souhaitons que dans quelques années, la photo de politicien mangeant son hot dog nous paraitra aussi vintage que celle du politicien cigarette au bec…

John Fitzgerald Kennedy, date inconnue

 

René Levesque, 1976

 

 

*Obama a d’ailleurs récemment arrêté de fumer pour donner le bon exemple à ses filles.