J'ose à peine imaginer ce que Maher Arar a du endurer. De tous les crimes humains, la torture est celui qui me donne le plus de frissons d'horreur.
Mais il y a quand même un cas où j'irais presque jusqu'à dire que je suis en faveur de la torture. Chaque personne responsable du fait qu'un être humain a été torturé devrait goûter à exactement la même médecine. Ils y penseraient à deux fois avant de le faire…
Et présentement, il y en a, au Canada, qui sont responsables de ça, et que personne n'inquiète. C'est ben beau chiâler contre les américains, Guantanamo et tout ça. Mais un citoyen canadien a été torturé en Syrie et il n'y a pas de marche dans les rues pour demander que les responsables paient pour ça. Il paraît même qu'il y en a un à la GRC qui a été promu!
Est-ce que ça aurait été différent si le citoyen s'était appelé Johnson ou Bélanger?
À votre question, je crois que ça aurait été bien différent si le citoyen s’était appelé Johnson ou Bélanger; du moin des gens auraient descendus dans les rues pour manifester leur indignation. Non pas que je suis indifférent à l’affaire Arar, au contraire, mais je crois que pour bien des gens il subsistait malheureusement un doute face à l’individu pour deux raisons: son nom, 11 septembre 2001.
Par contre, s’il avait eu un nom autochtone… malgré les efforts d’un cinéaste comme Lamothe, les tabassages et même les meurtres de (véritables) Canadiens de souche par nos forces policières ou nos prostitueurs ne semblent pas faire une ride à la surface de notre indifférence, nourrie dès l’enfance de stéréotypes de « sauvages » et de pettages de coche Proulx-stiens…
Le drame là-dedans, c’est que ce qui s’est passé avec Maher Arar est quand même basé sur un racisme institutionnalisé (services secrets et gouv. de l’époque), purement et simplement. Délit de faciès doublé d’un délit de patronyme. Résultat, direct un aller sans retour vers la Syrie pour un séjour torture comprise. Pas trop de droits de l’hommes là-dedans. On a bafoué nos valeurs de démocratie.
Et les gens ne marcheront pas pour sa pauvre poire pour les raisons que tu indiques. Comme les gens (pas tous, encore heureux) ici ne se sont jamais souciés des massacres de Musulmans à Srebrenica, Sarajevo ou en Algérie. Il y a comme une échelle dans l’humanité, dixit Roméo Dallaire. Il a tout à fait raison. Alors si tu es noir ET musulman (comme en Somalie, ou il y a des atrocités en ce moment), tu es mal barré, vraiment.
Dans la lutte aux terroristes, il y a un dérapage c’est sûr. Tout ce qui est musulman est suspect. Tout leur est permis. Pour moi c’est d’être terroriste tout autant que ceux dont ils combattent. Je partage votre avis quant à la torture, il serait nécessaire qu’ils goûtent à leur propre médecine. Seulement pour ces cas là.
J’espère que des têtes vides dans des corps sans âme vont tombées.
Il y a un lien, il me semble, entre l’absence d’indignation populaire à l’égard de l’inqualifiable traitement infligé à monsieur Arar et votre observation concernant la réaction au discours du pape et la lumière qu’elle jette sur la crise des caricatures danoises. En effet, les images dont nous bombardent les médias donnent l’impression que des populations musulmanes fanatisées s’enflamment spontanément dès que l’occident jette le moindre regard critique sur leurs croyances religieuses. Mais est-ce vraiment le cas? Et s’il s’agissait plutôt de manifestations orchestrées à des fins politiques? Ce que les médias prennent un soin douteux à taire, c’est que le mouvement islamiste a d’abord et avant tout des VISÉES POLITIQUES : ses leaders instrumentalisent les croyances religieuses de populations opprimées à des fins manifestement stratégiques. En diffusant ces images à répétition et, surtout, SANS LA MOINDRE ANALYSE, les médias entrent à fond dans leur jeu et alimentent cette perception erronée d’une intolérance et d’une propension à la violence associées aux musulmans et aux arabes. Alors, forcément, petit à petit, sans vraiment se l’avouer, les gens d’ici sont de plus en plus méfiants à leur endroit, ont de moins en moins de sympathie pour eux. On entend de plus en plus : « les musulmans ne sont pas tous des extrémistes mais… », un peu comme, il n’y a pas si longtemps, on entendait fréquemment : « chu pas raciste mais… », le « mais » étant invariablement suivi d’une enfilade de préjugés visant la race ou la culture de tel ou tel « importé ». Bref, on assiste encore une fois à la fabrication médiatique du consentement et du mépris!