BloguesLe blogue de Frédéric Bérard

Austérité et indigence (de réflexion) libérale

On se souvient du 7 avril. D’un gouvernement qui, après 18 petits mois de service, se fait montrer la porte par l’électorat. Sur fond de controverse, litige et quasi-crise sociale. Arrivent, de nouveau, les libéraux. Après 18 petits mois de pénitence. D’aucuns ne l’auraient prédit, avouons. Fallait vraiment en avoir marre du règne, sur fond de crise sociale, du PQ.

Plusieurs s’étaient, en votant libéral, bouchés le nez. Et pour cause. Les libéraux, quand même. Ceux-là mêmes éjectés du pouvoir, pas plus tard qu’avant-hier. Sur fond de crise sociale (classique, maintenant). De corruption ambiante. D’idéologie de type chambre de commerce. D’une Loi 12, surtout. Celle qui rendait légale la perquisition des comptes réseaux sociaux sans mandat. Celle qui établissait la notion de crime par omission. Celle qui remettait à la ministre de l’Éducation les pleins pouvoirs de l’Assemblée nationale, lui permettant d’amender toute loi gênant l’application de ladite Loi 12. Celle qui, enfin, prévoyait sa propre auto-abrogation, histoire de rendre illusoire toute contestation judiciaire efficiente. Pas mal.

Réélus, donc. Nouveau chef, nouvelle équipe. Mêmes tendances ? Fallait voir. Après l’essoufflement afférent aux litiges péquistes, disons que plusieurs souhaitaient accorder une chance au coureur. Le laisser gouverner quelques années, reprendre son souffle, avoir la paix. Le confort et l’indifférence, dirait Arcand. Quasi-muets en campagne, surfant simultanément sur la grogne populaire et le poing levé PKP, Couillard et cie auront ainsi été élus par…défaut.

Stratégie optimale. Vieille comme la démocratie. Sauf que c’aurait été bien de savoir. Connaître les intentions libérales. L’austérité, jamais électoralement gagnante, a été évacuée du débat. Sciemment. On comprend l’urgence d’agir : coupures en début de mandat, saupoudrage-bonbon tout juste avant les prochaines élections. Honte à ceux qui profitent du cynisme afin de l’alimenter davantage.

Suis pas économiste. Encore moins fiscaliste. Et je sais une portion appréciable de Québécois d’avis « qu’il faut couper ». Bon.

Mais au-delà du stratagème électoral libéral, peut-on réfléchir une mèche sur l’essence et objectifs desdites coupures ? De ce que j’ai compris de quelques prix Nobel, paraît que les mesures d’austérité ne riment souvent à rien, sinon…à un recul économique appréciable. L’Europe récente, notamment.

Présentée comme une tare, un impératif, l’austérité frappe l’imaginaire citoyen. Il faut ce qu’il faut. Mais si la réalité était autre ? J’en sais rien, mais je pose la question. Si, par exemple, les coupes de subventions aux personnes handicapées se veulent une bonne affaire. Idem pour les expo-sciences et autres trucs scientifiques. Économie de bouts de chandelle. Souvent pour quelques centaines de milliers de dollars. À peine suffisant pour rénover un bureau de député, apparemment.

Les budgets universitaires. La procréation assistée. Les CPE. Les régions. Quelqu’un, dans ce débat, pense en fait aux impacts à l’extérieur des grands centres ? Aux conséquences des coupures drastiques dans les centres locaux de développement ? Dans les budgets fauniques ? Dans l’ensemble des services gouvernementaux ? Parce qu’un poste aboli en région a des répercussions drôlement plus considérables qu’en ville. Simple question de proportion.

En bref, une réflexion soutenue sur le paradigme même de l’austérité serait la bienvenue.

On applique, pourtant, la logique inverse : plaquons d’abord la nécessité de celle-ci dans les esprits. Coupons ensuite. Réfléchissons, une fois les impacts constatés, sur la pertinence de s’être fait aller l’austérité à fond la caisse…

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