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Le capitalisme sauvage, c’est quoi au fond?

Un lecteur posait une question intéressante au chroniqueur économique du Devoir, Claude Chiasson, dans l’édition de la fin de semaine dernière. En gros, ce lecteur se demandait s’il était exact de parler de capitalisme « sauvage », et si oui, quelles en étaient les caractéristiques et à partir de quand ce capitalisme entrait dans la sauvagerie. La réflexion m’a semblé intéressante, d’autant plus que le débat faisait rage dans les commentaires suivant mon dernier blogue sur le Grand Prix. Certains lecteurs faisaient des opposants au Grand Prix des anticapitalistes de facto, et dans une explication sans grande nuance, on présentait le troc ou le totalitarisme stalinien comme les seules autres alternatives possibles…

M. Chiasson débute sa réponse ainsi : « Des enfants exploités au travail, des salaires de famine, des journées de travail de 16 heures, des conditions de travail insalubres et dangereuses, tout cela pour que des propriétaires d’entreprise s’en mettent plein les poches, voilà le capitalisme sauvage. Ce type de capitalisme sauvage n’existe plus dans les pays développés. »

Wow! La conclusion m’a vraiment jeté par terre… Allons allons, ça n’existe plus ici, toutes ces sauvageries, nous avons évolué! Ah, pensée magique, quand tu nous tiens! Mais, Monsieur le chroniqueur, dites-moi donc à qui est destinée la production de ces entreprises sauvages dont vous faites mention? Certainement pas à ses travailleurs exploités pour des poussières. Toutes ces bébelles ne seraient-elles pas destinées à remplir les grandes surfaces de nos sociétés occidentales, ce que vous décrivez comme « les pays développés »? Nous sommes une partie importante de l’engrenage du capitalisme sauvage, et nous le savons tous… Notre mode de vie douillet n’est rendu possible que par l’exploitation brutale des ressources humaines, naturelles et financières d’autres pays et il n’est plus possible de le nier. Comment faire pour renverser la donne, pour tendre vers un système économique plus juste? Le chroniqueur nous lance tout de même sur une piste.

M. Chiasson affirme que ce qui subsiste du capitalisme sauvage dans nos pays développés, c’est principalement le secteur de la haute finance, avec la dénaturalisation des produits financiers et la spéculation à outrance par les institutions financières. On a bien vu où ce système débridé nous mène : quand tout va bien, quelques individus engrangent les milliards et quand ça va mal, les gouvernements pompent des milliards d’argent public pour garder le navire (lire : les banques) à flot. Si M. Chiasson ne propose pas de solution pour mettre fin à ce cirque financier responsable des bouleversements économiques que nous connaissons, le remède potentiel pour réguler les flux financiers est connu depuis longtemps : il s’agirait de mettre sur pied une taxe sur les transactions financières, la fameuse « taxe Tobin ». En imposant une taxe d’un pourcentage minime, on parviendrait à contrôler un tant soit peu la spéculation, et l’État pourrait au moins profiter de la manne d’or que cela représente.

Des initiatives sont déjà en places dans certains pays d’Europe, mais les gouvernements nord-américains sont allergiques à l’idée. La sauvagerie, on y prend goût… Surtout quand ça rapporte.