Simone se retourne dans sa tombe
Il est décevant avec un titre aussi prometteur et chargé comme les Simone de trahir à ce point le legs féministe de l’auteur du Deuxième sexe. S’approprier ainsi le nom de la philosophe, qui a bousculé avec tant de véhémence le patriarcat du 20e siècle, pour une télésérie est un pari risqué. Non seulement les attentes sont grandes, mais personne ne souhaite salir le nom de Simone de Beauvoir. La pression sur les épaules pour le duo d’auteur Kim Lévesque-Lizotte et Louis Morissette est donc pesante. Triste constat, la série ne fait que surfer sur une vague, celle de la lutte féministe qui devient de plus en plus mainstream. À croire qu’ils ont «googlé» «féministe» et que Simone leur est apparue comme le choix commercial le plus évident et potentiellement le plus lucratif. Ont-ils seulement lu de Beauvoir? Comprennent-ils seulement le devoir de mémoire qu’ils lui doivent? Pourrait-on vendre des capotes ayant comme slogan «messieurs, émasculez-vous avec les condoms Thérèse Casgrain» ? Outrageux? Évidemment.
Louis Morrissette qui agit également comme producteur n’en est pas à sa première bévue. Enlisé l’an dernier dans le scandale du blackface, il poursuit et signe avec une série qui s’englue encore dans les stéréotypes. Série blanche, il n’y a pas un seul personnage de couleur qui a un rôle respectable sur 11 épisodes offerts. Bien au contraire, le seul rôle noir incarné par l’acteur Iannicko N’Doua est celui d’Alexis, musicien ténébreux et suave. Son rôle consiste à symboliser le fruit défendu, l’ivresse et la transgression. Hyper sexualisé, en chest, à moitié nu, il incarne l’éphèbe, l’eunuque, l’animal, bref, en parfaite équation avec la pensée esclavagiste occidentale. Oui, la comparaison est forte, tout aussi forte que la complète absence de diversité. Morrissette se complaît dans son fantasme, et puisqu’il ne se choque pas de l’imposture du blackface, il n’est pas étonnant qu’il n’offre pas à Iannicko le rôle du chum, de l’ami, mais plutôt du coup d’un soir, du figurant éphémère. Dommage, puisque son jeu d’acteur surpasse certains à plusieurs égards.
Parlant de diversité, celle des corps n’est pas respectée. Tous les protagonistes de la série sont outrageusement beaux. Beaux et surtout belles. Toutes les femmes de cette série sont magnifiques, magnifiques comme l’entend les critères de notre société, c’est à dire mince, grande, cheveux fins, à la mode, sans handicap physique. Aucune diversité des corps ni de diversité sexuelle comme on peut le voir dans l’excellente télésérie Girls proposée par Lena Dunham. Pas de vergetures, pas de plans rapprochés sur une peau acnéique, les femmes dans cette télésérie ne sont jamais dans une position inesthétique. Même lorsqu’elles pleurent, leurs maquillages s’accrochent. Les scènes d’amour qui sont censées nous prouver que les femmes sont sexuellement libérées sont tournées de façon hétéro centrée, on a l’impression que Trogi et Morrissette se font plaisir, et copient ce que la porno nous offre depuis Deep Throat.
Dernier point, la télésérie ne survit pas au test de Bechdel. Ce dernier démontre par l’absurde l’absence ou l’aspect subalterne des rôles féminins dans une œuvre scénarisée. Il permet de savoir si par exemple un film est centré uniquement sur le genre masculin ou non. Il y a trois questions au test, soit :
1 : Y a-t-il, dans ce film, au moins deux personnages féminins portant un nom ?
2 : Ces deux femmes se parlent-elles ?
3 : Et, si oui, se parlent-elles d’autre chose que d’un homme
Dans tous les épisodes, il n’est question que des hommes. Hommes comme source de plaisir, comme promesse d’un avenir prometteur, ou bien homme comme source de perdition. L’homme est le socle de toutes les intrigues et occupe 90% des sujets de conversation. Devinons si les Simone passe le test de Bechdel?
Dans le dernier épisode Maxim (interprétée par Anne-Élisabeth Bossé) dans sa quête du bonheur trouve enfin l’épiphanie…proposée par un homme. En effet, c’est suite à une conversation avec son beau-frère, qui lui fait la morale, qu’elle lâche émut : « C’est la première fois de ma vie de femme qu’on me donne le droit de me tromper ». Après coup, elle accroche une citation de Beauvoir au mur « le présent n’est pas un passé en puissance, il est le moment des choix et de l’action ». Non, il ne suffit pas de lâcher une citation pour se dire féministe. Selon certaines rumeurs, il y aura une suite à la série, et à bien y réfléchir, ils devraient la renommer: Les Simon.
Je trouve que vous exagérez un peu. C’est vrai que les conversations des filles et les agissements tournent toujours autour des hommes mais c’est ça l’histoire de ce téléroman. C’est comme une histoire de meurtre, on cherche le coupable jusqu’à la fin. Moi, je ne suis pas dans cette catégorie de femme. Je suis beaucoup plus vieille mais j’aime bien cette histoire et je suis contente qu’il y aura une deuxième saison. En plus, c’est le style d’écriture de Louis Morissette. Si on n’aime pas, on change de poste …………
C’est pas une question à savoir si c’est bon ou pas, c’est d’instrumentaliser Simone de Beauvoir dans une série qui n’est pas féministe, ou si peu, qui me rebute.
C’est en effet le monde féminin vu par des gars et oui ça devrait s’appeler Les Simon. Malgré tout c’est assez divertissant.
Je dois avouer que les Simone c’est beaucoup de pleurnicheuses et de stéréotypes. Dans le monde des Morrissette, un-e noir-e, un-e arabe etc ne sont que des figurants de passage pratiquement inexistants car oui, nous sommes bel et bien racistes et cette série nous le reflète bien – faudrait surtout pas dégoûter les gens [blancs] de la ville de Québec. Beurk un noir! [par chance qu’on en voit qu’un seul] Ouch! un terroriste! [pas question d’en voir un-e seul-e question de ne pas s’attirer la foudre de la MEUTE]. Et pour la seule chinoise qui y figure elle semble être un fantasme asiatique signé Louis ou, encore, l’obligation d’avoir en place un petit pourcentage de minorité visible à la télé… On dirait une pièce signée par le théâtre Jean Duceppe et son penchant bien répandu pour la suprématie blanche.
Par contre, bienvenue aux pitounes (tant que vous n’êtes pas colorées et difformes).
Pour la deuxième saison.. je vais passer mon tour… écouter autres choses que du ‘petit québécois’ …
Pour ceux et celles qui aimeraient voir des vrais gens, de vrais hommes de tout horizon et des femmes aussi parfaites qu’imparfaites, il y a la série ‘This is us’ … Mais, bien sûr, faut connaître un minimum d’anglais et éviter de prôner la race blanche comme le font si bien les Morrissette…
C’est vraiment de valeur de voir qu’il y en a qui sont payer pour ecrire.
J’écris gratis.