BloguesHugo Prévost

Le syndrome de l’imposteur

Pour t’informer, j’ai menti… enfin, menti, le mot est un peu fort. Disons que j’ai pu courber quelque peu le tissu de l’espace-temps journalistique afin de rendre un contenu plus accrocheur, plus intéressant, plus vendeur. Après tout, qui n’a jamais succombé à la tentation de rendre une manchette plus juteuse ou de résumer certaines informations de façon à attirer plus de lecteurs? Dans un environnement ultra-compétitif, la méthode n’est pas recommandée, certes, mais devient malheureusement nécessaire pour se démarquer, le tout en évitant bien entendu de franchir la ligne de l’information-spectacle.

L’emploi de cette technique, cependant, vient parfois s’ajouter à un vif sentiment d’être un imposteur, de se retrouver dans un milieu sans posséder véritablement les qualifications et la passion requises pour être un journaliste vraiment efficace.

Pourquoi ces remises en question? Surtout, pourquoi celles-ci se produisent-elles de façon cyclique, approximativement à tous les six mois? Parce que même en réussissant à trouver suffisamment de temps, de ressources et de collaborateurs pour offrir un contenu journaliste varié et – selon moi – relativement complet, j’ai encore l’impression de n’écumer que la surface d’un océan d’actualités. Conséquence d’occuper l’équivalent de deux emplois à temps plein, Pieuvre.ca se rabat en bonne partie sur les communiqués de presse et les annonces de percées scientifiques, entre autres.

Ce syndrome de l’imposteur se manifeste aussi dans le silence de quatre (cinq?) semaines sur ce blogue; qui suis-je, au final, pour donner mon avis sur le journalisme? Oh, je peux commenter l’actualité médiatique, fournir une opinion relativement éclairée, mais pendant la campagne électorale, rien. J’ai bien eu quelques idées de textes mais, dans l’ensemble, les chroniqueurs déjà bien établis ont tous fait de l’excellent boulot en abordant les différents aspects des élections sous l’angle des médias.

Au final, donc, que reste-t-il à exploiter? Que reste-t-il à dire? Les journalistes plus expérimentés frappent-ils parfois ce mur, ressentent-ils parfois cette impression que leur travail ne fait pas une grande différence dans un univers où l’information n’est pas seulement reine, mais où elle est plutôt absolue et omnisciente?

Je ne vous annonce pas non plus mon départ de la profession – après tout, qu’irais-je faire d’autre? -, mais je crois qu’une bonne remise en question est nécessaire de temps en temps, histoire de faire le point, de retrouver ses repères pour mieux poursuivre une carrière de journaliste/reporter/rédacteur en chef. Je l’admet, les choses seraient peut-être un brin plus faciles si mes deux emplois à temps plein me procuraient chacun un salaire complet, plutôt que d’être en fait un poste professionnel rémunéré et un ensemble de tâches bénévoles, mais bon, il faut bien commencer quelque part…