Réalignement politique au Québec; marginalisation du Québec au sein du Canada et rebondissements constants à la faveur de la réélection d’Obama aux USA. Voilà un résumé des dernières semaines politiques en Amérique du Nord.
1- Le réalignement politique de la scène québécoise n’est pas nouveau. On pourrait dire qu’il est dans l’air depuis l’échec du référendum de 1995. En effet, c’est comme si en disant NON au pays du Québec (de justesse, mais non quand même), les Québécois ont mis fin au cycle qui dominait le paysage politique canadien depuis les années 1960, soit le choix entre un fédéralisme renouvelé reconnaissant un «statut particulier» au Québec dans l’ordre canadien, ou encore l’indépendance du Québec. Le problème est que nous avons échoué dans les deux cas. Les fédéralistes québécois n’ont pas réussi à aménager un espace politique prometteur pour que le Québec soit considéré comme une société d’accueil et d’intégration distincte au Canada. Et les souverainistes n’ont pas réussi à rassembler une majorité autour de leur projet. Le Québec est assis entre deux chaises.
Mais le réalignement en opération est plus visible depuis 2002-03, époque où l’ADQ connaissait ses premières poussées… Et je crois que si l’ADQ n’a pas réussi à percer davantage, c’est par la faiblesse de son équipe, dominée par un chef habile mais superficiel, mais aussi parce que le parti a fait l’erreur de mettre de côté la question nationale avec un «autonomisme» mal défini. D’ailleurs, la plus grande percée de l’ADQ, celle de 2007, correspond au moment où le parti a accordé plus de place au discours identitaire…
Voilà donc que la CAQ de François Legault risque de réussir là où Mario Dumont a échoué. Et c’est justement parce que M. Legault a eu l’intelligence de se positionner, sur le plan du discours à tout le moins, comme un nationaliste capable de rassembler ceux qui sentent la fatigue et l’impasse du «double-échec» évoqué précédemment. Je ne partage pas la vision comptable de la société véhiculée par la CAQ, je crois illusoire sa volonté de «mettre de côté» la question nationale, mais je trouve extrêmement habile son discours qui insiste sur le fait que devant l’incapacité à rassembler une majorité autour du fédéralisme ou de la souveraineté, il fallait tout au moins affirmer que la majorité des Québécois est nationaliste! Maintenant, de ce constat, je trouve la «gouvernance souverainiste» de Pauline Marois davantage porteuse que la mise entre parenthèse des revendications québécoises favorisée par la CAQ…
Mais la politique, ici comme ailleurs, est plus que jamais une question d’image, et celle de Pauline Marois m’apparaît cristallisée négativement, essentiellement par sa faute d’ailleurs…
2- La marginalisation du Québec au sein du Canada se consomme de jour en jour. L’économie canadienne bouge vers l’ouest. La démographie canadienne bouge vers l’ouest. Le pouvoir politique et la vision idéologique du Canada bougent vers l’ouest. Pendant ce temps, le Québec pèse moins lourd sur tous les plans et il est considéré comme une composante de la grande mosaïque multiculturelle canadienne, vouée par définition à la folklorisation.
Depuis l’échec de Meech en 1990, le Québec est en périphérie de la politique canadienne et l’espace politique qui permettrait à notre nation d’être reconnue comme telle de façon à pouvoir intégrer ses immigrants en français et définir son avenir à sa manière se rétrécit sans cesse. La question du Québec n’intéresse plus nos voisins du Canada. (Je me demande même parfois si elle intéresse encore notre jeunesse…)
3- Aux USA, les élections primaires du parti républicain, qui servent à déterminer qui sera le candidat officiel du parti pour la présidence, font émerger pratiquement à chaque mois un nouveau «favori» qui surclasse le candidat naturel à opposer à Obama, soit Mitt Romney. Le dernier en lice, Rick Santorum, un catholique conservateur de la droite morale, contente tous ceux qui considèrent Romney comme trop «progressiste» ou louvoyant (j’opterais pour ce dernier qualificatif…). Chose certaine, quelque soit le candidat qui sortira vainqueur de ces primaires, et je crois encore que ce sera Romney, le parti sortira déchiré et le candidat sera affaibli devant un Obama qui commence à se relever en même temps que la situation économique.
J’ose donc prédire la victoire d’Obama en novembre prochain, car la conjoncture post-Occupy Wall street fait en sorte que sa volonté d’imposer davantage les riches le fera triompher face à un adversaire soit trop radical (Gingrich ou Santorum), soit discrédité par sa grande fortune construite sur le malheur des moins nantis (Romney).
Écoutez Obama sur cette question où on l’accuse de vouloir relancer la «lutte des classes» et il me semble que ce président en campagne ne peut que convaincre. Et gagner.
juste une petite erreur, les québécois n’ont pas perdu le referendum de 1995, il leur a été volé:
http://tinyurl.com/86v6lrp
Je prends de plus en plus de plaisir à lire vos interventions, mais je trouve déplorable que vous n’accordiez même pas une ligne au candidat Ron Paul – ce que font la plupart des médias d’ailleurs. J’aimerais avoir votre opinion à propos de ce dernier, qui a tout de même obtenu un non-négligeable 36% des voix du Maine.
Avez-vous vu l’extrait de M. Napolitano, sur Fox News, qui reprenait le « What if? » de M. Paul, avant que son émission ne soit limogée?
http://www.youtube.com/watch?v=fOaCemmsnNk
Je suis bien d’accord avec vous: Ron Paul est ostracisé ou mis de côté par les médias et je n’avais pas entendu le «What if» de Napolitano qui fait ressortir selon moi quelques bonnes raisons de son éviction de l’espace public: il est trop atypique, il menace l’establishment du parti républicain et du tout Washington par ses positions libertaires et isolationnistes. (Merci pour la source…)
Ron Paul est un des rares politiciens imprégné de l’éthique de conviction, cette posture définie par Max Weber comme celle qui priorise les valeurs et la fidélité à ses idéaux, sans égards aux conséquences, aux exigences et aux contingences que cela pose à la gouverne politique. Ce genre de personnage est essentiel à toute société, ils constituent une sorte de phare ou de pôle (caricaturaux) pour mieux situer le débat politique, mais je crois que sa pureté idéologique le disqualifie de la présidence… Il ne pourra se faire élire s’il ne rajuste pas son «programme» en matière de politique étrangère par exemple… (mettre fin à toute intervention militaire et à toute aide internationale, même à Israël!).
Je ne cherchais pas à participer à cette éviction de Paul du débat en omettant de mentionner sa candidature, mais je tenais surtout à faire ressortir ceux qui ont des chances de gagner l’investiture républicaine (je ne crois pas possible que Ron Paul la gagne…).
À plus…
@jean-felix
et pourquoi ne serait-ce pas possible? parce que tous les « spécialistes » politiques des médias mainstream ne cessent de rabattre cette rengaine assassine: « je ne crois pas possible que ron paul gagne ». on dirait bien que tu es de cette lignée.
vous dites tous pareil: il a raison, il est cohérent, il est passionné, il est intègre, c’est un vrai patriote, mais il ne peut pas l’emporter. et un silence s’ensuit… faut prendre ça pour du cash.
quand j’entends ça venant de fox ou de la presse, je comprends. après tout, desmarais et murdoch ont pas trop intérêt à ce que la donne change.
mais d’un jeune blogueur du voir, journal indépendant, frais et vrai? franchement. et les sondages qui donnent paul gagnant face à obama, tu les as vus? http://tinyurl.com/dxg5uy7
et pourquoi est-ce si farfelu, au juste, de proposer de rapatrier les soldats qui tuent de l’ouganda (http://tinyurl.com/3nol8kk) à l’irak en passant par la libye?
un conseil, si tu veux te démarquer, va falloir lâcher les banalités, et commenter lucidement ce qui se passe, aux états ou ailleurs.
Je ne me fie pas aux sondages, mais à la mentalité américaine que Ron Paul dit incarner, pour croire qu’il ne peut pas gagner. Les USA sont tout de même un empire et le peuple américain n’aime pas percevoir son déclin. D’où la nostalgie de l’ère Reagan que l’on perçoit dans ce pays, à travers toute la classe politique d’ailleurs… Car Reagan est perçu comme celui qui a restauré la puissance du pays après deux décennies de déclin : rêves brisés des Kennedy, enlisement au Vietnam, Watergate, recul face à l’Iran et l’URSS, etc…
C’est pourquoi, bien que Ron Paul incarne un courant réel de la mentalité américaine (le libertarisme), je persiste à croire que ce courant demeure minoritaire. La posture de Ron Paul est trop absolue pour convaincre une majorité. Je ne disais d’ailleurs pas qu’il a raison, je disais qu’il était cohérent et fidèle à ses idéaux, c’est différent.
@jean-félix
ça s’écrit « libertarianisme », en français.
je comprends ton point de vue.
selon moi, si l’on cessait de faire comme s’il n’existait pas, on le verrait rallier beaucoup, beaucoup de gens. tous ceux en fait, qui réalisent que reagan-bush-clinton-bush-obama-romney, c’est bonnet blanc blanc bonnet, tel que superbement clamé par napolitano dans l’extrait cité ci-haut par Vincent.
le mec rallierait non-seulement tous les républicains allergiques à obama le « socialiste » (!!!), mais une large part des démocrates lucides qui ne croient plus les acteurs qui défilent devant eux depuis la 2e guerre.
bref c’est le candidat républicain qui aurait la meilleure chance de battre obama. et l’establishment républicain fait tout pour le dépeindre comme un excentrique un peu débile! alors? qu’en déduire? selon moi, pour les marionnettistes, l’important, c’est que rien ne change. dette, guerres, pétrole, voilà les valeurs à protéger, parce qu’elles sont payantes.
@chasseur d’épais (votre pseudonyme manque de classe, on se sent quelque peu visé…) «tous ceux en fait, qui réalisent que reagan-bush-clinton-bush-obama-romney, c’est bonnet blanc blanc bonnet»
Je ne suis pas d’accord avec cette affirmation exagérée, fausse et démagogique. Clinton n’aurait sans doute pas déclenché la guerre d’Irak en 2003. Obama non plus. Et la réforme de l’assurance maladie d’Obama, bien que le résultat d’un compromis discutable, n’aurait sans doute pas été implantée par un autre président… Ce discours du blanc-bonnet, bonnet-blanc est trop souvent le discours de populistes qui manquent de nuances (est-ce un pléonasme?).
Et je persiste à croire que même avec une couverture médiatique importante, Ron Paul ne gagnerait pas l’investiture d’un grand parti ni la présidence.
@jean-félix
fausseté, démagogie, exagération et populisme. l’artillerie lourde, l’ami! j’en mérite pas tant. pour quelqu’un qui prône la nuance, disons que tu donnes pas trop l’exemple.
mais passons…
c’est clair que l’on peut percevoir des nuances, d’un président à l’autre. après tout il faut donner à l’électeur, de temps à autre, l’illusion qu’il a son mot à dire. mais c’est jamais rien de fondamental. ils sont tous guerriers, dépensiers et pollueurs.
on ne saura jamais si obama aurait attaqué l’irak. ce que l’on sait par contre, c’est qu’il a attaqué la libye, et qu’il se prépare à rentrer en syrie. pour un prix nobel de la paix, tu avoueras que c’est surprenant.
as-tu des arguments autres que ce qu’auraient fait ou ne pas fait tel ou tel président, pour prouver que de réels coups de barre ont été donnés, depuis cinquante ans?
écoute, on s’entend-tu pour dire que bush jr était pas bon? va-t-en guerre, corrompu, idéologue, religieux, menteur? le pire président de l’histoire, dit-on! bon, aujourd’hui on a obama. elle est où, la différence? yen a pas, dette, guerres, obésité. l’axe du mal existe toujours. le riche s’empiffre et le pauvre ronge son frein. same old same old.
ce qui nous ramène à une autre constante: neutraliser ceux qui menacent la vache à lait. julian assange. kadhafi. occupy wall street. et le vieux ron paul.
p.s. je ne crois pas que tu sois un épais. c’est juste un pseudo. concentre-toi sur le commentaire.
Ce sont vos commentaires, justement, qui manquent de nuances. Vous ne semblez pas faire la distinction entre d’une part, les interventions militaires qui recueillent un assentiment international (onusien et rassemblant un appui international varié) et les autres: la guerre d’Irak de 2003 par exemple. Je ne crois pas qu’il s’agit ici de nuances…
Mais vous le dites vous mêmes, W. Bush sort du lot comme un président épouvantable… Il n’entrerait donc pas dans le qualificatif blanc-bonnet, bonnet-blanc? C’est ce que je crois. Et il y a d’autres sujets: la recherche scientifique, le positionnement face au conflit israélo-arabe : Clinton a «arbitré» ce conflit et fait de réelles pressions sur les acteurs en place, Israël compris (même au 1er gouvernement Netanyahou en 1998); alors que W. Bush a laissé Israël agir et s’est désinvesti…
En fait, chaque président est un peu le produit de son époque, et les 30 dernières années ont été dominées idéologiquement par un libéralisme qui a effectivement favorisé un rapprochement entre les différents partis politiques d’occident (comme les décennies 60 et 70 étaient dominées par un certain interventionnisme de l’État en matière redistributive…).
Mais il demeure que chaque président doit réévaluer le bilan de son prédécesseur. Vous semblez dire que tous se confondent dans les 50 dernières années ! Nixon et Carter? Carter et Reagan ? W. et Obama ?
Bien sûr, certains présidents agissent en continuité, d’autres favorisent une rupture. Clinton a légué un surplus budgétaire, W. Bush a basculé dans un «keynésianisme militaire» et a radicalement réévalué l’héritage de Clinton en politique intérieure comme extérieure (impôts, déficits, recherche scientifique, respect du Droit international en émergence, crédibilité internationale des USA, changements dans les paramètres d’utilisation du nucléaire et les principes justifiant le recours à la force, etc.). Dans ces derniers domaines, Obama revient à la case Clinton… Je suis conscient que les «promesses» de changement ne sont pas à la hauteur chez Obama, mais dire qu’il n’a pas opéré de changement significatif (assurance maladie et crédibilité internationale) serait abusif… Et il reste du temps à ce président pour agir: les hausses d’impôts pour les plus fortunés s’en viennent…
c’est vrai, je ne fait pas trop de différence entre les guerres d’irak et de libye. dans les deux cas, le but était d’éliminer une nuisance. changer le régime. on a profité de la naissante « guerre au terrorisme » pour vendre l’invasion de l’irak. puis, le contexte des révolutions tunisienne et égyptienne a permis d’emballer l’opération en lybie. obama a réussi à embarquer l’otan là-dedans, c’est vrai, mais selon moi c’est du cosmétique. la trame de fond, soit intervenir, quitte à tuer des gens, là où il y a une piastre à faire, est restée la même.
en gros, trois choses me « pusent » au nez: la manie qu’on les présidents américains à déguiser les bombardements en opérations humanitaires, la politique monétaire actuelle, véritable pyramide de ponzi et la surconsommation.
aucun président n’a même tenté de sortir les états-unis de ces ignobles ornières. Ils l’ont tous promis, évidemment, la paix, le changement, l’espoir, etc. mais faut être salement brainwashé pour ne pas voir le dénominateur commun à toutes les administrations américaines. à chaque président sa guerre!!! et lockheed martin de passer à go. et halliburton de rafler le contrat. et la piasse américaine de demeurer l’étalon. et l’oléoduc de traverser l’afghanistan. et l’or de kadhafi de diparaître. et goldman sachs de détourner un autre milliard. alouette!
ron paul qui vient compromettre tout ça et on l’affuble d’une camisole de force. trouvez l’erreur.
addenda
la liste des guerres américaines (non-recommandé aux âmes sensibles) :
http://en.wikipedia.org/wiki/USA_wars
mêmes commentaires pour le porteur d’un pseudonyme peu édifiant.
… qui a cette facilité de tutoyer comme si nous avions gardé les troupeaux ensemble.
chasseur d’épais,
quand j’écris : ‘ qui a cette facilité de tutoyer comme si nous avions garder les troupeaux ensemble,’ je parle de vous. JF Chénier parle de votre pseudonyme et il semblerait que vous vous en » crisser » comme l’an 40.
Chénier n’a pas besoin de moi pour prendre position MAIS moi- comme .lecteur- ça me déplait: allez-y à visières levées pcq vos arguments sont souvent intéressants.
salut.
c’est pour ton bien, yves, que je m’appelle de même. c’est pour t’aider à passer outre tes préjugés. grâce à moi tu apprends à apprécier les gens pour leur contenu et non leur contenant. un jour tu me remercieras.
et » crisser » s’écrit avec un « z » comme Zoro !!!
C’est sous l’ère Mittérand que le présidennt Bush a suggéré, très fortement, que l’OTAN deviennent le bras armé des USA sur toute la Planète. Washington ne pouvant tout faire. Eventuellement, la majorité des pays de l’OTAN est passée sous les fourches caudines et, comme on l’a vu pour la Lybie, ont fait le sale boulot.
Demain, se sera le tour de la Syrie d’ Assad. Lui qui hier encore, pour nous plaire, rendre service, torturait joyeusement les individus suspects qu’on lui envoyait devient tout d’un coup personna non grata, infréquentable.
Oui, il y a des nuances entre les présidents des dernières cinquantes années, pour ne pas remonter plus loin, mais ils ont tous le même coeur au centre de leur administration : suivre les dictats de Corporate America. Même Obama continue à s’entourer d’une bonne parti des conseillers de George W. Etrange, non?
Dis-moi qui tu fréquentes et je te dirai qui tu es. Bonnet blanc, blanc bonnet? Peut-être pas. Mais le gris qui les distingue est pas mal pâle. Vu de loin, on ne voit pas la différence. Une vrai bande d’ordures.
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