Il est peut-être temps d’expliquer un peu pourquoi je m’appelle le voisin. Car au jour le jour, c’est Michel-Olivier Gasse qui devrait porter ce titre, étant donné le propos de son excellent blogue.
Si je m’appelle le voisin c’est d’abord parce que les gars et la fille avec qui je joue au hockey m’ont donné ce sobriquet. Mais je l’ai tout de suite aimé et adopté. L’idée de prendre place sur le web 2.0 avec une identité perçue comme simple et accessible me plaisait. Sans cacher mon identité réelle, j’aimais m’envisager comme celui qui entre dans la discussion un peu comme un voisin, en restant chez lui, en parlant par-dessus la clôture, comme ça, sans être désagréable ni envahissant.
Puis, au fur et à mesure que ce blogue existe, il m’est apparu que le nom de voisin véhiculait quelque chose d’encore plus profond par rapport à ma démarche et aux valeurs que j’aimerais transmettre. On peut être un voisin désagréable, bruyant, qui contribue à pourrir le milieu de vie immédiat. Ou on peut être le voisin sympathique, avenant, celui qui renforce le tissu social immédiat, qui travaille à améliorer la qualité de vie, le niveau de confiance et donc la sécurité du cercle environnant.
Je vous donne un exemple tiré de mon voisinage. Ma cour est fusionnée avec celle de mes voisins qui sont des artistes travaillant dans le milieu des arts visuels. Ils ont deux enfants. J’en ai trois. En dessous de chez mon voisin, c’est ma belle sœur et son fils. En haut de chez moi, c’est ma belle-mère. En haut de chez mon voisin, c’est tonton Ben, le petit frère de ma voisine artiste, et sa femme (vous me suivez toujours ?). Or donc, vous voyez que mon voisinage immédiat est tissé serré. Tous les enfants de la ruelle finissent dans ma cour, il faut même que j’en écarte quelques-uns qui des fois, viennent fragiliser l’harmonie des lieux… Nous partageons le BBQ, la cour, nous faisons une grande glace l’hiver et des tournois de pétanques le reste de l’année.
Je passais par ce détour pour vous expliquer que selon moi, la vie sur Terre fait de nous des passants qui doivent au minimum travailler à ne pas faire chier les autres. Et si en plus on peut faire notre «juste part» pour améliorer notre sort commun, pourquoi pas? Voilà pourquoi j’aime le titre du voisin. Ce titre implique immédiatement un Autre. Il est porteur d’une relation permanente. Le voisin ne peut être un ermite. Il vit en société. Il a alors une responsabilité supplémentaire, en plus des droits dont chacun peut espérer jouir : celle de contribuer à ce que la communauté au sein de laquelle on évolue au quotidien ne voit pas son environnement et sa cohésion se dégrader. Il est partie prenante de la qualité de vie recherchée par ses voisins.
À deux rues de chez nous, les gens se sont pris en main pour transformer la ruelle en parc commun. C’est magique! Faites comme eux. Soyez le bon voisin, faites pas chier et travaillez à renforcer votre communauté immédiate. Vous vous rendrez compte que ce changement d’attitude en amène d’autres et qu’ultimement, tout le monde y gagne.
Et je dirais qu’il vous faudrait mijoter un peu plus ces mots qui ne sont pas qu’évidences. Car la démocratie repose sur quelque chose de beaucoup plus exigeant qu’une simple culture des droits individuels. Bien que le respect de ceux-ci soit essentiel, il ne suffit pas pour que la démocratie fonctionne que les droits individuels régissent nos relations. Il faut un socle culturel commun, des références communes, une volonté de délibérer, d’écouter et d’accepter les décisions prises par la collectivité. On ne favorise pas le renforcement de la démocratie si on se replie dans la sphère du privée et si notre seul rapport aux autres est de revendiquer nos droits individuels…
On est tous le voisin d’un autre. Penser d’même, c’est déjà sortir de l’égocentrisme, base de tous les défauts et première condition pour l’émergence et le maintien du despotisme selon Alexis de Tocqueville.
La posture du voisin est qu’il ne peut être nommé si l’Autre n’existe pas ! Il est un appel à l’altérité.
Je pourrais même extrapoler et aller jusqu’à dire que le bon voisinage est une nécessité démocratique et un rempart contre la tyrannie. Bon, je retourne à mes chaudrons… À plus.
Tout cela est bien dit !Le Voisin parle UNIVERSEL!Revendiquer des droits ,c’est bien,faire ses devoirs c’est tout aussi bien!
Votre voisinage immédiat, Monsieur Chénier, a des allures quasi-surréalistes… On se croirait dans la matérialisation d’une lubie typique de Nino Ferrer. Toute la parenté dans le même couplet, la smala à deux pas de son édredon. À se demander pourquoi une clôture…
Mais clôture ou pas, le bon voisinage ne saurait qu’être de rigueur dans votre situation. Autrement, ce qui n’aurait pu s’avérer qu’une désolante «chicane de clôture» pour un autre, pourrait – dans votre cas très particulier – dégénérer en pénible «chicane de famille».
Et vous parvenez à demeurer serein dans cette hasardeuse proximité?
Seriez pas un peu bouddhiste sur les bords? Zen et imperturbable? Parce que moi, je préfère mes proches pas aussi proches. De loin. Question de respirer. Ou pour le plaisir de retrouvailles occasionnelles, si vous préférez…
Par ailleurs, vous mentionnez cette (imbuvable, en ce qui me concerne) notion de «culture des droits individuels». Quelque chose à l’effet que les droits des uns et les droits des autres doivent aller de pair. Certes, c’est la moindre des choses. Mais pas un mot sur ce qui importe avant cette notion de «droits»… soit celle d’«obligations».
Plutôt que de rechercher le respect de ses sacro-saints «droits», avec tous les tracas et brimades que cela suppose nécessairement, il est de loin plus facile et profitable pour les autres et pour soi-même que chacun s’acquitte primordialement de ses «obligations». Et le reste suivra. Les «droits» de tout le monde seront du coup favorisés.
Rendre service, faire le premier pas, encourager même le voisin âgé éloigné si ce n’est qu’en le saluant en passant. Donner. Effet boomerang fréquent, expérience à l’appui. L’approche idéale pour quiconque aime la facilité – et déteste les situations orageuses et conflictuelles…
M. Perrier, vous dites:
«Par ailleurs, vous mentionnez cette (imbuvable, en ce qui me concerne) notion de «culture des droits individuels». Quelque chose à l’effet que les droits des uns et les droits des autres doivent aller de pair. Certes, c’est la moindre des choses. Mais pas un mot sur ce qui importe avant cette notion de «droits»… soit celle d’«obligations».
Plutôt que de rechercher le respect de ses sacro-saints «droits», avec tous les tracas et brimades que cela suppose nécessairement, il est de loin plus facile et profitable pour les autres et pour soi-même que chacun s’acquitte primordialement de ses «obligations». Et le reste suivra. Les «droits» de tout le monde seront du coup favorisés.»
Fin de la citation.
Relisez-moi, nous marchons sur le même chemin, sauf en ce qui concerne notre proximité (géographique) familiale.
Le voisin.
D’accord, Monsieur Chénier. Je vous donne raison. Avec explications, toutefois.
Comme, trop souvent, il m’est arrivé – comme à plusieurs autres aussi – de perdre un commentaire en raison de la touche PUBLIER quelque peu capricieuse, qui ne publie parfois rien du tout et fait tout simplement disparaître un commentaire dans le cyber-espace, je procède généralement différemment à présent.
Je lis, en prenant quelques notes, un billet. Puis j’y réfléchis et procède à diverses recherches pour des références utiles ou des citations, au besoin. Et je vais ensuite rédiger sur Word – mais sans avoir le billet à ma vue pour que je puisse le consulter. Je me doute que la rédaction sur Word + la consultation du billet soit très possible mais… contrairement à mon fils de 28 ans, je ne suis pas tombé dans la marmite alors que j’étais encore tout petit!
Je suis un dinosaure encore survivant qui essaie tant bien faire que peu de communiquer et fonctionner à l’époque actuelle.
Donc, je viens de vous relire et vous faites effectivement état de davantage que de «droits individuels» en insistant sur le partage. C’est déjà mieux que de ne mettre que l’emphase sur ses propres «droits».
Quant à moi, j’oserais avancer que je vais quelques pas plus loin encore en mettant franchement l’accent sur nos «obligations», considérant que cela passe par des actions désintéressées qui au bout du compte s’avèrent – paradoxalement – très profitables pour qui agit de façon altruiste.
L’effet boomerang que je mentionnais.
Mais bon, pas la peine de tout passer au microscope, nous sommes fondamentalement d’accord. Notre mieux-être passe par le mieux-être des autres.
Bonne journée, Monsieur Chénier!
(J’espère que la touche PUBLIER ne fera pas de caprices cette fois, car j’ai rédigé directement sans aller sur Word…)
Ouf! La touche a bien répondu!
« il est de loin plus facile et profitable pour les autres et pour soi-même que chacun s’acquitte primordialement de ses «obligations». Et le reste suivra. Les «droits» de tout le monde seront du coup favorisés. » Monsieur Perrier, lors de la crise étudiante de ce printemps, pourriez-vous m’expliquer ce que sont devenues les « obligations » des « dissidents » après les votes de grèves aux assemblées générales.
Lire ce billet de Josée Blanchette, qui, plusieurs mois après le miens, dit un peu la même chose: http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/380122/on-s-est-deja-vus-quelque-part