Ça y est: les premières fissures post-élection de PKP comme chef du PQ apparaissent. Le chef élu semble moins enclin que sa députation et son parti à pourfendre le projet d’oléoduc Énergie Est qui doit traverser tout le Québec, le fleuve et ses principaux affluents, pour se rendre vers le Nouveau-Brunswick et favoriser ainsi de nouvelles voies d’exportation aux sables bitumineux d’Alberta et de Saskatchewan.
Il faudra voir si Bernard Drainville, Sylvain Gaudreault, Martine Ouellet et Alexandre Cloutier sont capables de piler sur leurs principes pour laisser PKP imposer ses (courtes) vues au PQ… Mais d’ici là, quelques commentaires autour de ce positionnement de M. Péladeau. Positionnement qui n’en est pas un d’ailleurs, puisque ultimement, PKP dit que sa position personnelle importe peu dans le débat car le dossier est de compétence fédérale et que le Québec n’a pas son mot à dire sur le sujet!
PKP est-il le nouveau chef du camp souverainiste? C’est ça, sa conception d’un État qui veut prendre le contrôle de tous ses pouvoirs? Renoncer, à la première occasion, à utiliser tous ses pouvoirs d’État pour protéger l’intérêt national du Québec? Céder au gouvernement du Canada tout pouvoir d’arbitrage sur la question de l’acceptabilité du projet, de ses retombées, du tracé et de la sécurité, alors qu’on sait très bien que le gouvernement Harper a dans ce domaine lui-même renoncé à défendre l’intérêt public? Voilà une conception pour le moins faiblarde du discours souverainiste: le pays du Québec, on le voit dans not’tête, mais pas question qu’on fasse quoi que ce soit pour le protéger, le chérir et le faire vivre concrètement lorsque c’est possible de le faire. Il faut attendre le Grand Soir j’imagine!
M. Péladeau chérit une idéologie – je la qualifierais de libéralisme économique commun d’Amérique du Nord – qui occulte toute la posture qu’un vrai chef indépendantiste devrait avoir, soit celle qu’il n’y a rien de supérieur à l’intérêt national bien compris du Québec. Selon cette conception, le projet Énergie Est a tout pour nuire: retombées en emploi médiocres; dangers immenses pour la qualité de l’eau et des sols sur tout notre territoire; risques de catastrophes sans capacité sérieuse de nettoyer de la part de l’État et des entreprises privées responsables de transporter le pétrole sur notre territoire.
Sur le projet Énergie Est, M. Péladeau nous dit que «ce n’est pas aussi simple que ça»… Alors, M Péladeau, quel est l’intérêt national du Québec dans ce dossier?
– Et PKP de répondre: «Posez-moi une autre question là!»
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Ajout du 18 juin. On voit que PKP ne pouvait opérer «un coup» sur la question du pétrole dans l’immédiat. Mais on a vu que ses réflexes idéologiques, imprégnés du libéralisme commun d’Amérique du Nord, font de lui un piètre défenseur de l’intérêt national supérieur devant le grand capital… On a aussi pu remarquer cette inclination naturelle à embrasser largement le discours du libéralisme économique lors de débats entre candidats pour la chefferie du PQ. En deux phrases, M. Péladeau se contredisait: il se posait d’abord en rempart contre toutes ces entreprises (comme la London Life) qui pratiquaient une forme d’intimidation face à la souveraineté du Québec en prophétisant une fuite de capitaux, pour ensuite se faire le chantre du discours hostile aux augmentations du fardeau fiscal des entreprises, avançant comme argument principal qu’elles fuiront si nous avons recours aux taxes! Les lignes de fractures entre le chef PKP et la frange progressiste du PQ (pétrole, code du travail, fiscalité) n’ont pas fini de faire jaser…
La saga se poursuit: http://www.ledevoir.com/politique/quebec/442998/energie-est-pierre-karl-peladeau-se-rallie-a-la-position-de-son-caucus
Et voilà, fin de l’histoire. Le PQ est contre, point final. Une belle chronique avec une durée de vie de moins de 24h.
Maintenant, on attend de savoir ce que vous pensez de la position de Thomas Mulcair, qui s’est prononcé en faveur des pipelines est-ouest. Le NPD serait-il devenu le nouveau promoteur d’un « libéralisme économique commun d’Amérique du Nord »?
C’est ce qui m’inquiète, oui. C’est pourquoi mon vote n’est pas encore décidé. Je demeure un électron libre. Et le pétrole est un enjeu important pour moi.
Bof…
Peut-être bien qu’après la prochaine élection au fédéral, et avant la prochaine au provincial, Gilles Duceppe viendra à nouveau à la rescousse à titre de chef de remplacement.
que vient faire Duceppe dans cette discussion.. ou cette galère ???
Tout simplement, M. Graton, Gilles Duceppe pourrait éventuellement embarquer dans cette «galère» (comme vous l’écrivez) parce qu’il s’exerce peut-être déjà à un nouveau rôle politique, soit: accourir à la rescousse de formations accablées par des chefs dépourvus – ou insuffisamment pourvus – des compétences requises pour bien mener leurs barques.
(Notez bien qu’à ce compte, M. Duceppe pourrait tout aussi bien se retrouver à la tête du PLC…)
C’est une façon de voir les choses.
Moi ce que je comprends de son message c’est que, tant que le Québec fera partie du Canada, ce dossier restera de compétence fédérale et le Québec n’aura pas un mot à dire sur le sujet.
Mais c’est une fuite lamentable de dire pour cette raison qu’il ne prendrait pas position. Est-il nécessaire de rappeler qu’au-delà de la définition juridique des compétences, il y a la défense du bien commun? Est-il nécessaire de rappeler que la Colombie-Britannique avait carrément menacé de couper l’électricité à un projet de pipeline devant traverser son territoire? Le gouvernement de C.-B. s’est il enfargé dans les fleurs du tapis constitutionnel, ou a-t’il pris position? C’est à ce genre de réaction que je m’attendrais d’un chef qui défend les intérêts supérieurs du Québec. Pas à une abdication lamentable et à un comportement de victime impuissante.
On sent dans cette position de « Arrêtez de me demander mon avis; de toute façon, c’est le gouvernement canadien qui décide » toute la « conviction » d’un « grand souverainiste ».
Comme Marois qui, après s’être battue bec et ongles pour défendre le projet de l’autre pipeline (celui d’Enbridge, ligne 9b), allant jusqu’à diaboliser et ridiculiser ses opposants, a finit par dire que c’est « Ottawa qui décide ».
Un Jacques Parizeau n’aurait jamais tenu ce discours de pleutre pour éviter d’avoir à se prononcer contre un projet qu’il approuve.
Il se serait levé, aurait cherché et présenté toutes les mesures que le gouvernement québécois pourrait utilisé pour bloquer ou retarder le projet.
Parce que des moyens, il y en a. Si on est prêt à les utiliser.
El « on n’a pas les pouvoirs » est une mauvaise excuse. Et donne une image de « mous » à ceux qui se prétendent les champions de la souveraineté.
Robert Laplante, de l’Action nationale, sermonne sans le dire PKP sur l’enjeu du pétrole, dans ce texte par ailleurs fort bien envoyé:
«Les indépendantistes sont devant la tâche de reconstituer le mouvement national en commençant par faire valoir l’urgente nécessité d’avoir une conduite cohérente. Cela commence par ne jamais accepter de se laisser réduire au statut de minoritaire. Aucun argument, aucun enjeu d’affaires publiques ne justifient de s’automutiler. NPD, PLC, PC ou Parti Vert sont tous interchangeables à cet égard. Il faut en prendre acte et agir en conséquence.
Le défi des prochaines années ne se résume pas à redonner une position avantageuse aux indépendantistes sur la scène électorale. Il faut que le Québec se constitue en force nationale. Les partis politiques ont un rôle essentiel à jouer dans cette tâche. Mais cela ne suffira pas, il faudra que partout, dans tous les milieux, dans tous les coins et recoins de la société civile chacun, chacune pense et se comporte en plaçant ses repères en phase avec la claire expression de notre intérêt national. Et cela commence par le refus de se comporter et de se laisser définir comme un minoritaire en son propre pays». ICI: http://www.action-nationale.qc.ca/index.php?option=com_content&view=article&id=747%3Aeditorial-voter-dans-le-canada-reel&catid=257&Itemid=696