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Saborder le PQ

La démission surprise de PKP puis le chantier qu’il a ouvert en héritage vers la convergence des forces souverainistes (ou encore pour une coalition nationaliste capable de battre les libéraux de Philippe Couillard en 2018), cette double-fenêtre favorise des remises en questions beaucoup plus fondamentales que le choix qui monopolise toutes les conjectures, à savoir qui sera le prochain chef du PQ?

Et si on posait la question autrement? Pourquoi ne pas saborder le PQ au nom de l’idéal qu’il poursuit? Après tout, c’est ce qu’a fait Pierre Bourgault avec le RIN lorsqu’il a suggéré à ses membres de déchirer leur carte et d’investir personnellement le PQ nouvellement créé par René Lévesque…

Il y a plusieurs raisons qui militent dans le sens de cette option de sabordage du PQ. La première revient justement au fondateur. Si vous écoutez le discours de fondation du parti, vous remarquerez que Lévesque s’est fait prendre par son éthique de conviction lorsque les militants ont choisi le nom du parti. Et lorsque le nom de «Parti québécois» a recueilli le plus de votes des membres, Lévesque était catastrophé, puisqu’il n’aimait pas ce nom mais se devait de respecter la volonté majoritaire exprimée… Lévesque jugeait avec raison que le nom du parti posait problème pour deux raisons: d’abord parce que tous ceux qui ne s’identifiaient pas au parti n’étaient pas moins Québécois pour autant! Et ensuite parce que si un gouvernement du PQ agissait mal, c’est le nom même du pays qui en était alors sali et dévalorisé… Voilà pourquoi Lévesque sermonnait les membres du PQ naissant en 1968 en leur suggérant de prendre au sérieux «l’extraordinaire responsabilité supplémentaire qu’ils avaient choisis de prendre en choisissant ce nom»…

Mais au-delà de ces premières considérations, il y a une série de raisons plus stratégiques et politiques pour saborder le PQ. La première est qu’à l’origine, ce parti a été une coalition rassemblant des gens de gauche, des nationalistes plus conservateurs et des centristes. Aujourd’hui, PKP a été le premier chef à le reconnaître clairement, le PQ n’a plus le monopole de la souveraineté. Il devrait donc clairement se positionner sur l’échiquier gauche-droite et arrêter de zig-zaguer selon les inclinations de la coqueluche du moment!

Saborder le PQ amènerait des gens vers QS, d’autres vers la CAQ, certains vers ON et les têtes fortes qui pensent se lancer dans la course qui s’annonce pourraient décider de fonder leur propre formation politique! Et qui sait, cette nouvelle formation réussirait peut-être à ratisser plus large que l’actuel PQ!

Après tout, le PQ actuel est plutôt pauvre financièrement et sa «marque de commerce» est plutôt toxique si vous voulez l’avis d’un prof qui côtoie la jeunesse… Le débat sur la Charte a été ravageur chez une couche significative de la jeunesse montante, parmi lesquels plusieurs seraient susceptibles de se joindre à un projet de pays pour le Québec si celui était enivrant. Ces jeunes ont pris goût à l’action collective en 2012, mais ils ont très mal perçu la gouverne du PQ sous madame Marois. Il en résulte que l’étiquette du PQ a une lourde pente à remonter avant de redevenir crédible…

Or, un sabordage en règle replacerait rapidement les cartes du jeu politique. Même le mouvement des orphelins politiques devrait se positionner. Il y a un peu partout dans la société civile et dans plusieurs autres formations politiques des forces vives qui pourraient se joindre en s’additionnant sans se fondre dans un PQ devenu infréquentable ou toxique.

Alors, on dit merci au Parti québécois et à ses membres pour les nombreuses réformes et réalisations qu’ils ont porté et réalisé. Et on met la clé dans la porte. Célébrons le sabordage d’un grand parti!

Et créons le nécessaire réalignement politique qui permettra au Québec de sortir de l’impasse dans laquelle il se trouve.