Je reviens de mon trip solo dans le bois dans les Adirondacks. Et comme il a beaucoup plu, j’ai beaucoup lu. Parmi mes lectures, un phare, une lumière persistante, un long poème traduit en leçon de vie comme en récit profondément émouvant: «La confusion des sentiments» de Stefan Zweig. J’ai toujours été fasciné par cet homme. J’avais adoré «Le joueur d’échec». Et j’ai lu avec une fascination étrange ses correspondances avec Sigmund Freud (j’y reviendrai peut-être).
Stefan Zweig s’est suicidé au Brésil avec sa femme en 1942. Ayant fuit le nazisme, il était catastrophé d’entrevoir sa possible victoire.
La confusion des sentiments raconte sa jeune formation universitaire dans l’Allemagne de la République de Weimar. Je n’aime pas ceux qui disent trop lorsqu’ils parlent de leurs lectures. Alors je dirai seulement ici que Zweig y explore la relation Maître-élève. Comment expliquer ou même nommer cette connexion extraordinaire que ressentent à la fois le professeur et l’étudiant, lorsque le premier inspire le Savoir et transmet sa Passion pendant que le second absorbe et s’inspire…
Il y a là toute la beauté nécessaire de l’éducation. Et ses limites!
Dans un autre registre, beaucoup moins réussi, Yvon Rivard a exploré ces lignes rouges à ne pas franchir dans la relation prof-étudiant. Dans «Aimer, enseigner», le prof de littérature québécoise réfléchit à la transgression malsaine que constitue selon lui l’amour charnel entre un prof et son étudiant(e). Le prof se doit de garder une distance, pour préserver la dimension quasi-sacrée de la transmission.
Stefan Zweig de son côté, semblait plutôt prendre la posture de l’étudiant en admiration devant son prof. Il se demandait alors comment nommer ce sentiment d’amour et d’admiration pour ce Maître qui nous transmet son savoir et sa passion:
Extraits: « Car, lorsqu’une passion amoureuse, même très pure, est tournée vers une femme, elle aspire malgré tout à un accomplissement charnel: dans la possession physique, la nature inventive lui présente une forme d’union accomplie; mais une passion de l’esprit, surgissant entre deux hommes, à quelle réalisation va-t-elle prétendre, elle qui est irréalisable?»
Je vous implore presque de lire ce magnifique petit livre. C’est une des plus belles lectures de mes dix dernières années. Et ce livre date de 1927!
On devine à la fois une époque. Et on y entrevoit des valeurs fortes toujours valables. Je vous laisse les découvrir par la lecture de Stefan Zweig.