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Omar Ba: le bois tordu de l’humanité

Je suis allé voir avec mon gars l’exposition sur l’artiste Omar Ba: vision partagée au MBAM.

Il faut voir ça. Le titre de mon billet – le bois tordu de l’humanité – évoque un ouvrage publié par le grand philosophe Isaiah Berlin… Le sens que peut revêtir cette expression en la reliant à l’art d’Omar Ba frappera tout de suite l’œil de l’observateur: ses œuvres sont traversées de troncs de palmiers tordus et entremêlés, dans lesquels des personnages, certains mi-hommes mi bêtes, ou d’autres encore, s’insinuent dans le paysage et la géographie mentale de cet artiste que l’on doit aborder comme un Atlas: à plusieurs échelles. On doit en effet analyser ses tableaux selon plusieurs points de vue. Il faut s’approcher de ces «toiles» peintes d’abord en noir, sur carton. Plusieurs techniques sont utilisées, incluant le simple crayon, où l’artiste inscrit quelques idées nous suggérant d’autres pistes d’interprétation.  Puis, on prend du recul et on devine des silhouettes de squelettes, certains personnages dissimulés, ou encore une forme de neige qui, comme des flammes, consumeraient le paysage…

L’imaginaire d’Omar Ba rassemble tout le vivant. Chaque toile est un organisme, traversé par ce bois tordu qu’est notre humanité. Cet univers comprend des méandres d’une rivière, qui, à travers des îles de coton en fleur, nous plonge dans l’unité du vivant… Un «War junkie» affalé avec sa mitraillette, chaussé de «pompes» nouvellement acquises, sans doute un «don» fait par un caïd de la guerre des diamants à un enfant soldat : «Vas tuer ton voisin et j’te donne ces chaussures Nike» !!!  Ou encore, dans «Droit de veto 1», un agneau sacrifié par les grandes puissances, qui se servent de l’Afrique comme d’un terrain de jeu pour satisfaire leur avarice.

On m’a raconté que lors du lancement de l’expo, Omar Ba a raconté qu’au départ, il exposait dans des salons de coiffure, des centres d’achat, avant d’être «récupéré» par le circuit des grandes galeries de Genève et d’ailleurs… Les œuvres rassemblées pour cette expo méritent le détour. Il faut plonger; avancer puis reculer devant ces tableaux à la géographie complexe et vibrante.