Au mois d’août 2008, dans un élan de révision des programmes de subventions de différents ministères, le gouvernement conservateur du Premier ministre Stephen Harper opérait des coupes de 45 M$ dans des programmes culturels. Deux programmes de subventions voués aux tournées internationales, soit le programme Routes commerciales relevant du Patrimoine canadien et Promart relevant du Ministère des Affaires extérieures et du Commerce international furent abolis suite à ces révisions budgétaires.
C’est avec l’aide de ces deux programmes que les compagnies artistiques de tournée étaient en mesure de compléter leur montage financier afin de répondre aux invitations de diffuseurs de spectacles internationaux. Ces deux programmes représentaient un montant de 5,8 M$ en aide directe pour les projets de tournées.
À la suite de l’annonce de ces coupes sans justifications crédibles, la Conférence internationale des arts de la scène (CINARS) a effectué un premier sondage en novembre 2008 auprès des compagnies de tournée québécoises et canadiennes qui a permis de révéler les pertes financières appréhendées par les compagnies et artistes qui se produisent sur les scènes internationales. Un deuxième sondage, dévoilé le 1er novembre dernier, est venu confirmer ces appréhensions : près de 16 M$ en pertes de revenus autonomes, 175 tournées et 1600 spectacles annulés. Encore plus troublant, les pertes d’emplois reliées à cette situation : 25 % des compagnies vont procéder à des mises à pied de personnel dans un futur proche.
Depuis le témoignage de CINARS au Comité permanent du Patrimoine canadien en mars 2009 et après deux rencontres avec le ministre du Patrimoine canadien James Moore, force est de constater que le fait d’exposer les séquelles de la suppression des programmes Promart et Routes commerciales ne semble pas recevoir une oreille attentive et encore moins sensible du ministre Moore. En effet, le ministre s’en tient à un discours qui consiste à dire qu’il y a suffisamment de fonds disponibles pour la promotion des artistes canadiens œuvrant à l’étranger.
Or, CINARS a démontré clairement qu’il n’en est rien. Parmi les onze programmes du Conseil des Arts du Canada totalisant un budget de 12 M$, il n’y en a véritablement qu’un seul dédié à l’aide aux tournées internationales et son budget ne dépasse pas 2 M$.
Il y a environ un an, le ministre Moore a eu l’idée de créer les « Prix du Canada ». Ces « Nobel canadiens » auraient récompensé l’excellence artistique « d’ici et d’ailleurs ». Soudainement, un fonds de 25 M$ était disponible. Mais cette décision a soulevé un tel tollé que le ministre a dû retirer son projet. Nous croyons que ce montant qui semble toujours disponible pourrait grandement contribuer à la résolution du problème auquel nous faisons face.
Donner les moyens aux artistes de se faire connaître à l’étranger, c’est se donner une culture forte, reconnue, ouverte sur le monde et qui rapporte beaucoup, non seulement en retombées économiques1, mais en fierté et prestige auprès de tous leurs concitoyens.
Il y a maintenant près de cinq ans que le gouvernement conservateur s’attaque à amoindrir et dénaturer l’image canadienne sur la scène internationale, et ce, dans plusieurs domaines : politique, diplomatique, environnemental et culturel. Avec une telle politique culturelle conservatrice, repliée sur elle-même, le Canada n’aura plus aucun rayonnement à l’étranger en matière culturelle. Tout cela fera en sorte que peu à peu, le Canada ne fera plus partie des réseaux de tournées de spectacles internationaux exposant ainsi les Canadiens à un déficit culturel majeur. Le déni de la situation venant du ministre Moore ne fait que démontrer soit un manque de jugement ou soit une tentative de dissimulation des vraies raisons qui ont amené ces coupes budgétaires, raisons qui ne peuvent être qu’idéologiques. Voilà pourquoi nous tenons à réaffirmer notre détermination auprès du ministre du Patrimoine canadien et à le presser de remettre au Conseil des arts du Canada un montant que nous évaluons à 7 M$, montant qui serait exclusivement réservé à l’aide aux tournées internationales.
Cela pourrait enfin démontrer que le ministre a une compréhension de la situation critique dans laquelle se retrouve les arts de la scène au Canada, secteur qui a contribué à la renommée de ce pays dans le monde.
LE CONSEIL D’ADMINISTRATION DE CINARS
ALAIN PARÉ, Président-directeur général
JOHN LAMBERT, vice-président
BARBARA SCALES, secrétaire-trésorière
ANNICK-PATRICIA CARRIÈRE, administratrice
MAYI-EDER INCHAUSPÉ, administratrice
NASSIB EL-HUSSEINI, administrateur
1) CINARS a démontré que chaque dollar reçu en subvention rapporte 6,30 $ en revenu aux compagnies artistiques.