Accommodements raisonnables et interculturalisme : Accommodements raisonnables et interculturalisme : Relancer l’interculturalisme au Québec
Le dépôt du rapport de la commission Bouchard-Taylor, il y a trois ans, n’a pas mis un terme à la réflexion menée par Gérard Bouchard sur l’interculturalisme. Plus tôt cette semaine, il nous faisait part de ses projets en la matière.
Au moment où les modes d’intégration des immigrants sont débattus et commentés un peu partout sur la scène internationale, j’organise, avec un groupe d’intervenants et de chercheurs, un symposium consacré à l’interculturalisme à Montréal du 25 au 27 mai 2011.
Cet événement bénéficie de la participation de dirigeants et de dirigeantes du Conseil de l’Europe et réunira des conférenciers et des conférencières du Québec et de plusieurs pays. L’objectif principal est de faire le point sur l’interculturalisme et de mieux le définir comme modèle d’intégration, plus particulièrement comme façon de vivre la diversité ethnoculturelle dans les sociétés démocratiques. Il vise à combler un besoin pressant d’orientations, de politiques et de balises à l’intention des décideurs des institutions publiques et privées, tout comme à l’intention des citoyens en général.
Trois ans après le dépôt du rapport de la commission Bouchard-Taylor, ce Symposium international propose donc de relancer et d’approfondir le débat sur l’interculturalisme au Québec et ailleurs dans le monde.
Le rapport de la commission avait rejeté à la fois le multiculturalisme et l’assimilationnisme et retenu l’interculturalisme. Dans ses grandes lignes, l’interculturalisme vise à réaliser l’intégration dans un contexte de diversité en favorisant les interactions, les rapprochements, les échanges, les initiatives intercommunautaires. Ce modèle se caractérise, en particulier, par une recherche d’équilibres fondés sur la négociation et la réciprocité dans le but d’assurer une intégration équitable des individus et des groupes. Il cherche à accommoder à la fois les cultures majoritaires, dans le respect de la diversité, et les minorités dans les limites des valeurs fondamentales de la société d’accueil. Il vise aussi, à la longue, à faire émerger une identité et une appartenance communes à partir et au-delà des identités et des appartenances premières.
L’interculturalisme met l’accent sur l’intégration afin de renforcer la francophonie québécoise, qui en aura bien besoin face à l’immense défi de la mondialisation; comme petite nation et culture minoritaire, le Québec doit craindre toute forme de fragmentation, d’où le rejet du multiculturalisme qui rejette l’idée même de culture majoritaire.
L’interculturalisme a déjà une longue histoire au Québec et il suscite un intérêt grandissant auprès de nombreux pays européens. Le Symposium, qui sera largement ouvert au public, se présentera donc comme un dialogue Québec-Europe sur la situation et l’avenir de ce modèle d’intégration, mettant à profit des expertises développées des deux côtés de l’Atlantique.
On peut consulter la programmation du Symposium et s’y inscrire sur le Web à l’adresse suivante: www.symposium-interculturalisme.com.
Gérard Bouchard,
Sociologue et historien
Université du Québec à Chicoutimi
Le 11 mars 2011- Bonjour Monsieur Gérard Bouchard
J’habite en France -HAKIM en question, en Andalousie (ESPAGNE)- et il me fait plaisir de pouvoir vous transmette quelques réflexions à propos de cet article que je viens de lire sur le multi ou inter-culturalisme et assimilationnisme. Vous parlez d’interactions intercommunautaires, rapprochements, échanges, équilibres fondés sur le respect de la diversité et d’autre part, des limites de valeurs fondamentales de la société d’accueil.
Que vous êtes noble Monsieur! Félicitations! J’apprécie vraiment votre grandeur d’âme et votre ouverture d’esprit. Bravo! Cependant…
Vous voyez Monsieur BOUCHARD que je vous ai présenté l’artiste HAKIM (Espagnol-Marocain) d’Andalousie, c’est parce que je défends cette personnalité intègre, son charisme, sa tolérance, son ouverture d’esprit, sa philosophie de vie…Pour moi, c’est un Sage.
Je suis en fait, une amie et sa déléguée-presse pour les pays francophones. Ce qui revient à dire que je suis très ouverte à la multiculturalité (dans tous domaines) des êtres, d’autant que je suis moi-même native d’un pays du Maghreb et mes coutumes sont celles du couscous, du muezzin qui appelait à la prière tous les jours, ect.ect.
Ce qui me fait réagir à votre belle réflexion Monsieur BOUCHARD, c’est que par effet du hasard, je viens de lire il y a juste une 10zaine de minutes- en réponse à un article- un commentaire (certainement d’un Maghrébin de France, mais sous nom d’emprunt puisque normalement on s’inscrit sous pseudonyme dans ces blogues), qui refuse absolument tout moindre signe EN FRANCE, pays catholique en majorité, comme chacun le sait et non autre chose! Il refuse 1) qu’il y ait des subventions pour les églises (catholiques bien sûr), l’aide aux curés des provinces de l’Est(qu’ils aillent donc se faire rémunérer par des dons privés-c’est son idée pas la mienne) que les CROIX soient ôtées des églises, ôtées également du dessus des lits dans les hôpitaux, que les institutions religieuses ne soient plus du tout subventionnées par « l’argent du peuple », ect…Il y en a qui se croient déjà maîtres de la France!
Bientôt il faudra aussi interdire de faire le catéchisme aux enfants, refuser de se marier à l’église, de fêter Pâques,Noêl,l’Ascension,ect.
Et eux, dans les pays du Maghreb ou les autres dits arabes, qu’est-ce qu’ils sont prêts à accepter des étrangers, non musulmans ou non fondamentalistes???????????????? Je pose juste cette unique question.
Où sont les limites de l’obligation de s’intégrer et de celles du respect des lois fondamentales du pays d’accueil???????????????????????
Bien évidemment, tous les étrangers Arabes ou pas, ne sont pas aussi bouchés de l’entendement. Mais vous voyez Monsieur, il faut rester extrêmement vigilents. Il ne faut cesser de le répéter! Ré-pé-ter!!!!!
Et pourtant, j’ai des amis Marocains en Espagne et en France, des amis Espagnols en France et surtout ce grand ami HAKIM: c’est une bénédiction et un HONNEUR d’être l’amie d’une aussi grande âme (j’ai fait sa connaissance par le biais de la chanson orientalisante dont il est le spécialiste reconnu dans les milieux culturels madrilènes).
Voilà Monsieur BOUCHARD, c’était ma réflexion et je suis pacifiste.
En.V.A
De manière quelque peu professorale, de manière pas très originale, je dirais qu’il y a, en gros, quatre attitudes face à l’immigration.
1) L’INTÉGRATIONNISME PUR ET DUR (L’ASSIMILATIONNISME)
Certaines personnes (j’en ai connu quelques-unes) pensent qu’il faut intégrer totalement les immigrants et les assimiler (les rendre semblables aux citoyens de la société d’accueil) radicalement. Avec une telle approche, pas très éloignée de celle du Front national de Jean-Marie Le Pen (en France), il y a place pour peu d’immigrants. Sont acceptés ceux qui ont une culture presque semblable à celle de la société d’accueil.
2) LE MULTICULTURALISME (COMMUNAUTARISME)
Dans cette conception, britannique ou trudeauiste, il faut créer une mosaïque de cultures qui cohabitent, qui vivent les unes à côté des autres. La majorité n’a, à toutes fins pratiques, pas plus de «droits» que les diverses minorités ethniques, nationales et culturelles. Au Canada, le multicuturalisme a désavantagé les Québécois car les immigrants sont presque toujours prêts à apprendre l’anglais. Mais comme le pays n’est plus la création de deux groupes linguistiques (et des autochtones), les autres langues ont autant (ou plus) d’importance que le français. Il serait possible d’expliquer longuement cette approche mais je ne veux pas ennuyer les éventuels lecteurs.
Notons que le mot «multiculturalisme» a parfois un sens plus «neutre». Il désigne tout simplement des sociétés dans lesquelles il y a une pluralité de «groupes» culturels.
3) LA CONVERGENCE CULTURELLE
Certains intellectuels québécois (Fernand Dumont par exemple), assez proches du PQ et de la mouvance nationaliste ou souverainiste, ont proposé une sorte d’approche novatrice. Le principe, c’est qu’il faut, le plus possible, définir les caractéristiques essentielles de la culture d’accueil (la langue française, la laïcité, le respect des femmes, etc.) et qu’il faut affirmer, de manière claire et non équivoque, que ces caractéristiques fondamentales doivent être respectées par tous. Dans cette approche, il faut que la société d’accueil soit accueillante et qu’elle «encadre» et informe les nouveaux arrivants.
Dans cette perspective, il est clair que les immigrants ou immigrés peuvent, sans aucun problème, conserver les traits de leur culture «originelle» dans la mesure où ils ne vont pas à l’encontre des exigences essentielles de la société d’accueil. Cette perspective «ouverte» combine (ou tente de combiner) l’intégrationnisme et le multiculturalisme.
4) L’INTERCULTURALISME
Ce dont il s’agit ici, c’est de bien comprendre qu’une société qui accepte des immigrants doit accepter que le processus d’immigration va forcément «changer» dans une certaine mesure la culture de la société d’accueil. Il va aussi modifier la culture des nouveaux arrivants. En fait, il s’agit d’accepter que les cultures interagissent et s’interinfluencent. Si une société n’accepte pas cela, elle devrait renoncer à l’immigration. Si des immigrants n’acceptent pas cela, ils devraient rester chez eux.
N’étant pas un cuisinier intellectuel qui propose ses brillantes recettes, je dirais que, quant à moi, je pense que l’avenue possible pour éviter que l’immigration soit un désastre, c’est de combiner la convergence culturelle et l’interculturalisme.
Jean-Serge Baribeau, sociologue