Culture et société : Culture et société : L'Agenda 21 de la culture pour le Québec: une occasion à ne pas bouder
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Culture et société : Culture et société : L’Agenda 21 de la culture pour le Québec: une occasion à ne pas bouder

Alors que certains s’entêtent à définir et encadrer la culture selon une stricte logique marchande, l’Agenda 21C entend la conjuguer à toutes les sphères de la société. Simon Brault, l’un des plus ardents défenseurs du projet, nous a adressé ce texte exclusif.

Le 30 mai dernier, la ministre Christine St-Pierre confirmait dans un communiqué son intention de présenter dès l’automne ce qui sera le premier Agenda 21 de la culture* adopté par un État. Elle précise que ce cadre de référence «proposera de donner une place prépondérante aux arts et à la création comme vecteur du développement de notre société». La ministre évoque aussi de grands thèmes à traduire en engagements: liens entre culture et éducation, participation citoyenne, respect de la diversité culturelle, dialogue interculturel et enjeux reliés à l’identité, l’enracinement et la cohésion sociale.

Au moment même où trop de gouvernements dans le monde charcutent leurs malingres budgets dédiés aux arts, au patrimoine et à la culture en invoquant la lutte aux déficits, cette initiative politique pour affirmer le caractère incontournable de la culture comme dimension du développement durable au Québec mérite qu’on la salue… et qu’on y participe.

C’est ce qui explique que des centaines d’artistes, de citoyens et d’acteurs des milieux environnementaux, communautaires et économiques aient pris part à ce qui est devenu une démarche d’appropriation des enjeux locaux du développement. À l’ère d’une mondialisation qui pourrait d’autant plus nous échapper qu’elle nous donne l’illusion d’être à portée d’écrans tactiles, il faut parfois revenir aux assemblées de cuisine.

Les Cafés Agenda 21C et autres rencontres organisés au cours des huit derniers mois ont été très éclairants. Ils vont sans doute inspirer les responsables du seul ministère de la Culture en Amérique du Nord – qui célèbre d’ailleurs ses 50 ans – qui planchent sur le texte du futur Agenda.

Bien sûr, on aura réentendu un certain nombre de refrains classiques des ténors des chambres de commerce, des associations d’artistes ou des groupes communautaires, mais personne n’avait envie d’en rester là. On aura dépassé les craintes et méfiances primaires pour entamer une conversation parfois laborieuse mais remplie de bonne volonté dont le sous-texte pourrait être, si je paraphrase André Malraux: «Le 21e siècle sera culturel ou ne sera pas.»

Évidemment, la bonne volonté ne suffit jamais. Mais sans elle, rien n’est possible.

Déjà on a convenu qu’à trop vouloir rentabiliser la culture sur les plans économique et social, on risque de perdre de vue que la création artistique est le moteur même du développement culturel. La création artistique doit être mieux que jamais protégée grâce à un soutien financier public, éclairé, constant et indépendant des forces du marché.

Il y a encore beaucoup à faire sur ce front. Mais les engagements du gouvernement devront être encore plus ambitieux. Toutes les missions de l’État doivent être réévaluées pour s’assurer qu’elles prennent en compte la culture. Ici, pas «d’agenda caché» mais un Agenda avec un grand A! Il s’agit de donner le ton et de rallier tous les acteurs du développement à l’échelle de l’ensemble du territoire.

C’est un rendez-vous avec le 21e siècle qu’il ne faut pas bouder. Au Québec encore moins qu’ailleurs.

– Simon Brault, directeur général de l’École nationale de théâtre, président de Culture Montréal et vice-président du Conseil des Arts du Canada

*Formulé à Barcelone en 2004, l’Agenda 21 de la culture est le premier document à vocation internationale qui propose des bases communes à l’engagement des villes et gouvernements locaux en faveur du développement culturel au 21e siècle. Il est déjà adopté par des centaines de villes et régions dans le monde.