Dégel des frais de scolarité : Lettre à Line Beauchamp : La tour d'ivoire
Je pense que

Dégel des frais de scolarité : Lettre à Line Beauchamp : La tour d’ivoire

Madame Line Beauchamp,

Nous avons marché comme des milliers d’autres étudiants dans les rues de Montréal le 10 novembre dernier. Ce rassemblement solidaire de mécontentement face à votre gouvernement vous laisse pourtant indifférente et ne vous « émeut » pas ! Nous ne sommes pas impliquées dans les milieux étudiants, nous sommes des étudiantes ordinaires et nous avons décidé d’être solidaires nous aussi. Parce qu’il y a urgence d’agir.

Madame Beauchamp, vous sous-estimez la signification qu’il faut accorder au fait que 20 000 étudiants étaient présents dans les rues de Montréal. Vous sous-estimez les 200 000 étudiants qui ont donné leur support aux débrayages organisés. La manifestation du 10 novembre était pourtant l’une des plus importantes depuis 2005. Que faudra-t-il pour vous sortir de votre tour d’ivoire ?

Les étudiants n’ont pas les moyens d’assumer les coûts de la hausse des frais de scolarité de 1 625 $ prévue sur cinq ans par votre gouvernement lors du budget de mars dernier. Ce montant représente un fardeau immense pour des milliers d’étudiants qui se verront obligés de quitter l’école. Comme vous l’avancez, la hausse a pour but d’améliorer le système d’éducation en souffrance. Faut-il vous rappeler que les dettes des universités sont anormalement démesurées et que cette hausse de 1625 $ ne viendra combler qu’un infime pourcentage de ces dettes ? L’éducation ne sera pas sauvée par vos manipulations. Des milliers d’étudiants auront sacrifié leurs études et ce pour quel résultat ? Il faut sortir de votre tour d’ivoire, Madame Beauchamp.

L’endettement des étudiants est pourtant une preuve tangible que les étudiants n’ont pas les moyens d’assumer cette hausse. Nul besoin de vous rappeler que 35 % des étudiants s’attendent à sortir de leurs études endettés auprès d’une institution financière. 17 % d’entre eux devront rembourser un montant à leur famille. En tout, 65 % des étudiants s’attendent à finir leurs études avec au moins une dette. Vous savez probablement aussi que 50 % des étudiants vivent avec moins de 12 000$ par année. Les étudiants travaillent en moyenne 15 heures par semaine et 37 heures par semaine pendant l’été. Pour toutes ces raisons et tant d’autres, les étudiants n’ont pas les moyens d’endosser la hausse des frais de scolarité telle que vous l’envisagez.

Nous voulons aujourd’hui vous rappeler que l’université est plus accessible au Québec qu’elle ne l’est dans le reste du Canada grâce à un gouvernement qui avait une vision d’avenir pour le Québec. Votre gouvernement perd la carte, il faut sortir de votre tour d’ivoire.

À notre sens, vous dépassez les bornes. Vous n’hypothéquez pas seulement le destin des étudiants, mais celui de la société québécoise. Et tout ça ne vous « émeut » toujours pas !

Le Québec s’est démarqué internationalement par son accessibilité aux études. Nous désirons préserver cette accessibilité et nous n’accepterons pas de remettre en cause ce bien public. L’éducation n’est pas une marchandise, elle est garante d’une société éveillée, ouverte et porteuse d’avenir pour le Québec. L’éducation est un droit pour tous.

Madame Beauchamp, que faudra-t-il pour vous sortir de votre tour d’ivoire ?