Crise sociale au Québec : Le Québec : Précurseur de la révolution populaire occidentale?
Je pense que

Crise sociale au Québec : Le Québec : Précurseur de la révolution populaire occidentale?

Tandis que plusieurs parlent d’un printemps érable qui serait inspiré des événements s’étant déroulés en Égypte et en Tunisie au printemps 2011, d’autres considèrent que l’expression est exagérée et que la situation québécoise est beaucoup moins précaire qu’elle ne l’était dans certains pays du Magreb. Quoi qu’il en soit, une crise sociale frappe présentement le Québec, et le musicien Laurent Aglat nous a fait parvenir cette lettre à travers il tente d’évoquer l’existence réelle d’un appel au changement de la part du peuple québécois.

Serait-il si impensable que la révolution populaire occidentale prenne concrètement naissance chez nous, au Québec?

Il serait grand temps que ce vieux complexe de colonisés-mangeux-de-poutine s’éteigne, à jamais. Avec les événements du «printemps érable», nous avons pris conscience de notre force individuelle et collective, sur les réseaux sociaux, dans la rue et de plus en plus dans les médias traditionnels qui n’ont eu d’autres choix que d’accepter l’évidence de la volonté générale. En ce printemps 2012, nous assistons au plus grand soulèvement populaire de l’histoire du Québec (et du Canada, il va sans dire) et ce mouvement ne crie que d’une voix : «Charest, démissionne ! »

L’indice le plus encourageant se lit dans l’appui massif à la cause populaire dans la presse étrangère. À part quelques articles conservateurs dans la presse canadienne (Globe and Mail, National Post), force est de constater que l’écho des contestations du peuple québécois se fait entendre à l’international, et même plus, la musique du changement dans le bruit de nos casseroles inspire nos amis dans tout l’Occident.

Nous ne sommes pas si loin des revendications qui ont vu naître les plus grands changements de société : la Révolution française, la Russe, mai 68, le printemps arabe, pour n’en nommer qu’une fraction. Quand le peuple prend le temps de prendre la rue, à répétition de surcroît, il a bien rarement tort. Le discours despotique du gouvernement est en ce moment tel que même dans la toute dernière représentation de Antigone de Robert Lepage au TNM, le public ne pouvait garder son sérieux tant le discours tout-puissant rappelait celui de nos dirigeants dans la crise actuelle.

Pourquoi serait-ce si inconcevable que le Québec décide par lui-même de se doter d’un autre angle de tir politicoéconomique quant à son avenir?

Évidemment, on nous dira que nous sommes loin d’être à plaindre au Québec, que c’est bien pire ailleurs, que nous sommes ceux qui payent le moins cher nos études, notre santé, etc. En fait, depuis dix ans, ce pacte social québécois durement gagné à la Révolution tranquille s’effrite néo-libéralement à une vitesse folle, une vitesse qui exige deux mains sur le volant… Si on tenait tant à se comparer, on verrait rapidement qu’il y a ailleurs dans le monde d’autres formules tout à fait adaptables à notre société, ici et maintenant.

Et si, en Occident, nous étions ceux qui disent : «Ça suffit !»? (Oui, oui, les Français du Nord-est américain, ceux qui ne disent jamais rien et qui sont en proie à devenir le nouveau cheap labor minier, ceux-là, nous-autres). Tout un peuple qui crie son désaccord avec l’inégalité croissante entre riches et démunis; qui s’insurge contre des profits toujours plus grands des institutions financières parallèlement avec notre pouvoir d’achat toujours décroissant; des hausses dans tous les secteurs et toujours moins de services sociaux au moment où la Commission Charbonneau enquête sur les fuites monumentales d’un gouvernement qui gère comme un Parrain.

Quand je vois jour après jour la colère populaire grimpante qui se manifeste partout dans la Belle Province, mouvement qui a amplement dépassé les revendications de la lutte étudiante, je suis ému, littéralement. Le ras-le-bol est généralisé. Nous avons créé un monstre, un solide et splendide monstre.

Les yeux du monde occidental sont rivés sur notre détermination, ils veulent voir nos espoirs de changement possibles, et ce, même dans l’ombre de la botte corporative. Notre succès fera infiniment plus de bruit que nos casseroles.

Laurent AGLAT
D. Musique composition