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La cour du Bloc est pleine!

Bon, bon, bon. On dirait bien que La Presse est partie en campagne électorale.

La semaine dernière, elle faisait sa «une» avec un présumé pavé, évidemment «sensationnel», lancé dans la mare par Jacques Brassard, un ancien ministre péquiste. Remettant en question la pertinence du Bloc à Ottawa, il le qualifiait aussi de «clone du NPD».

Ce «pavé», contrairement à la présentation qu'en faisait La Presse, n'était pas une lettre ouverte de Brassard, mais tout simplement une de ses enièmes chroniques du Quotidien de Chicoutimi (même propriétaire que La Presse), où il adore vilipender le PQ et le Bloc depuis des années comme de dangereux repères de la go-gauche syndicaleuse. Ce qui, bien sûr, est de son droit le plus strict, mais qui n'a rien d'une grosse «nouvelle».

Pour ajouter à l'effet, le journaliste présentait M. Brassard comme un souverainiste «influent», alors que la réalité est que le niveau d'influence de Jacques Brassard est à ZÉRO. Vraiment. Sans exagérer.

Et si Brassard avait vraiment voulu jeté un «pavé dans la mare», plutôt que de reprendre ses thèmes habituels, comment se fait-il qu'il ait refusé toute entrevue suite à la «une» de La Presse? Quand quelqu'un veut marquer un coup, il ne se sauve habituellement pas de la sorte…

Mais cette «une» frappait tellement fort que les médias, ici et au Canada anglais, ont roulé là-dessus toute la journée! Une journée entière de campagne électorale passée à analyser l'«impact» des propos d'un Jacques Brassard!

Même à Newsworld, un réseau dont la couverture est d'une qualité exemplaire, une journaliste présentait Brassard comme, et je la cite: «a very powerful and influential sovereignist».

Franchement, il y a des jours où il vaudrait mieux être sourd que d'entendre des choses pareilles. Mais comment blâmer la journaliste qui ne faisait que reprendre ce qu'en disait La Presse?  

Ce matin, La Presse récidivait avec une «une» tout aussi sensationnelle : «Le Bloc a perdu sa raison d'être, estiment d'anciens députés du parti», soit Odina Desrochers, Nic Leblanc, Louise Thibault, Richard Belisle et Ghislain Lebel.

Pourtant, ici aussi, on a affaire au même phénomène: de bien bonnes personnes, sûrement, mais des gens amplement connus pour leur péférence marquée pour les idées de droite et ayant très peu d'influence dans le mouvement souverainiste.

N'en jetez plus, doit se dire Gilles Duceppe, la cour du Bloc est pleine!

La question de la pertinence du Bloc se pose à chaque élection. Et il est parfaitement légitime de l'examiner. (Voir ma chronique «Questions existentielles», 4 sept. 2008).

Mais force est de constater que cette simple question a réussi à s'imposer comme un thème quotidien de cette campagne-ci, réussissant à mettre Duceppe sur la défensive et créant une diversion gênante quant à son «message du jour».

Et La Presse est loin d'être la seule à en jouer comme d'un violon…

Restera à voir si en frappant aussi fort et aussi souvent sur ce même clou, ceux qui rêvent de voir le Bloc mordre la poussière le 14 octobre, ne finiront pas par provoquer une réaction contraire?

C'est ce qu'on saura, en effet, le 14 octobre au soir.

(Pour un autre point de vue, voir Le Devoir d'aujourd'hui, où d'anciens députés du Bloc affirment exactement le contraire des Brassard & cie.)

(Pour une analyse éclairante du phénomène des partis politiques séparatistes ou autonomistes siégeant dans des parlements fédéraux, il faut lire le carnet de François Brousseau, «Le Bloc n'est pas seul au monde», 12 septembre, section «élections fédérales» du site internet de Radio-Canada).