BloguesVoix publique

Merci Denis Villeneuve.

 

Je suis allée voir Polytechnique.

J'en suis ressortie sonnée. Que l'on soit ou non d'accord avec la thèse du film – que ce meurtre de 14 jeunes femmes par Marc Lépine aurait été un geste «politique» et non seulement le produit d'un grave délire obsessionnel – Denis Villeneuve a réalisé un très, très grand film.

Un film qui, malgré son sujet, ne s'intellectualise pas. Un film qui nous rentre dedans et qui nous habite. Un film qui ratisse large, qui en dit long sur les relations hommes-femmes (encore une fois, que l'on épouse ou non sa thèse centrale).

Un film qui nous ramène au 6 décembre 1989, qui nous fait revivre la même peine, la même incompréhension.

Surtout, un film qui libère, enfin, de cette colère que nous avons été nombreux au Québec à ne pas dire, mais à ressentir néanmoins envers les hommes et les garçons ayant laissé ces filles seules avec Lépine, dont un, Sarto Blais, trop souffrant de ce souvenir, et devenu la 15e victime de Lépine en se suicidant quelques mois plus tard.

Merci Denis Villeneuve d'avoir reconstitué ce qui aurait pourtant dû nous paraître évident, soit que ces filles ont été immensément courageuses, mais aussi que ces garçons et ces hommes, face à un tel chaos, une telle menace, sans intervention rapide des forces policières, elles aussi non préparées à l'époque pour un tel cauchemar, ne pouvaient faire autrement.

En voyant ces images de garçons et de filles briser des fenêtres pour sortir, se précipiter par les premières portes pour sortir à l'extérieur, on revoit les mêmes images de Columbine, de Dawson, et de tant d'autres. Bref, comment faire autrement face à un tireur fou?

Merci Denis Villeneuve de nous avoir libérés de cette colère malsaine et non fondée. Merci, malgré les blessures profondes que garde sûrement chaque personne ayant survécu à ce drame, de dire à tous ces hommes et garcons, par la voix d'un personnage féminin, que ce n'était pas de leur faute.

Merci également, en quelque sorte, de redonner vie à ces quatorze jeunes femmes, de même qu'à Sarto Blais.  

Et merci pour cette «suite du monde» en épilogue.

********************************************************************