Comme quoi, à quelque chose malheur est parfois bon…
Prenez cette boue qui remonte de plus en plus à la surface au Québec, poussée par les affaires Zampino, Accurso, Couillard, du contrat des compteurs d'eau, etc., etc., etc… Si on y réfléchit, ça permet de voir un peu plus clair dans ce qui se passe ici depuis pourtant lontemps. Et peut-être même de finir par identifier quelques pistes de solution..
J'y réfléchis moi-même dans mes billets et mes chroniques. Et vous en faites de même. Vous avez donc peut-être remarqué que dans ma chronique du 8 avril – «À quoi ça sert, un élu?» – j'écrivais ceci:
«Mais un minimum qui ne doit pas escamoter la vraie question: à quoi servent les élus? À quoi ça sert s'ils ne réussissent plus à nous convaincre qu'ils sont capables de gérer notre argent avec une éthique impeccable, imputabilité et une vision responsable du bien commun? À quoi ça sert si, lorsque vient le temps de dépenser NOTRE argent, il leur arrive de déléguer leur propre pouvoir à des non-élus, du genre "amis du régime"? Ont-ils conscience que ce faisant, ils affaiblissent la démocratie? Je parle de cette culture vaseuse où notre argent est vu comme une grosse assiette au beurre par le secteur privé, duquel les gouvernements n'osent plus exiger un minimum de rigueur dans la livraison, la qualité et le coût d'un produit. Facile d'être généreux avec l'argent des autres…»
Cette «sous-traitance» de la gestion et de la gouvernance est en effet un phénomème troublant au Québec. Et croissant. Surtout, un problème qui ouvre la porte à toutes sortes d'abus potentiels.
C'est d'ailleurs ce qu'avance aussi Chritian Bordeleau dans Le Devoir de ce matin:
Ajoutez à cela l’épisode UQÀMIEN, pour lequel je sens que je vais encore « péter » une « coche » (j’attends la fin de l’histoire…), et puis le dossier de la santé, l’état des routes, les crises de déneigement (où on compte même des morts, maintenant !), etc. on pourrait se demander, peut-être, si nous ne sommes pas dirigés par ceux qui sont (ou devraient être) présentement en prison. Leur gestion est pourrie, elle sent le renfermée et sa teinte est opaque foncé, très loin de tout espoir de transparence.
C’est un peu choquant d’entendre parler de tels scandales pendant la pire crise économique depuis les années 50.
Malheureusement, tout ça trouve son origine dans les valeurs que véhicule notre société. Nous sommes plutôt de la philosophie : tout le monde le fait, fait le donc… vole ton voisin et oublie pas de le traiter de voleur !
Quand l’État québécois se comporte comme une succursale de Power Corporation, quand le gouvernement québécois et Power Corporation deviennent des vases communiquants, comme c’est particulièrement le cas depuis l’arrivée au pouvoir de Jean Charest, depuis l’implantation du crédo Partenariat Public-Privé, il ne faut pas s’étonner de voir se multiplier les pratiques de sous-traitance entre l’État et le secteur privé et vice-versa. Les paliers de gouvernement inférieurs suivent alors l’exemple du grand frère.
Tant qu’on considérera comme normal que l’économique couche continuellement avec le politique, il sera difficile de reprocher aux enfants de cette union d’avoir une personnalité diffuse ou confuse, de n’être ni économique, ni politique, d’être des créatures hybrides.
Quand on n’arrive plus à voir le caractère « immoral » d’une union trop forte entre l’économique et le politique, quand on en arrive à considérer la chose comme « n’étant pas de nos affaires » ou comme une préoccupation non pertinente, on se prépare des lendemains problématiques. Devant ce laisser-faire inconsidéré il n’est pas étonnant qu’on en arrive à ne plus se poser de question sur d’autres types d’unions douteuses, comme celle d’une vice première ministre et de son « chum » qui aurait pu être chef d’un parti d’opposition. Bien sûr on ne peut empêcher deux coeurs de s’aimer mais dans ce cas il ne faut pas leur confier des tâches qui les opposent férocement dans leur quotidien.
Encore une fois dans ce dernier « dossier » celui qui en sort avec l’image du plus parfait imbécile est Jean Charest. Il ne peut pas contrôler les hormones des membres de son cabinet mais il aurait dû s’abstenir de placer Madame Normandeau dans une telle situation en la nommant ministre et vice première ministre. En plus Jean Charest affiche ostensiblement son « épaisseur » et son irresponsabilité en affirmant qu’il était au courant depuis longtemps de l’idylle entre Madame Normandeau et Monsieur Bonnardel. Encore une cachoterie stupide de la part de Monsieur Charest comme si cette idylle ne pouvait pas porter à conséquence.
@ Paolo
Décidément, vous me fascinerez toujours!
Vous rouspétez assez férocement contre ce que vous percevez comme de la bêtise, une chose d’un caractère « immoral », comme vous dites. Il y en a partout, il y en toujours eu, et il y en aura toujours, des abuseurs. Des profiteurs. On n’y peut rien – ou pas grand-chose.
Mais je doute très fortement que Jean Charest soit de ceux que vous conspuez si éloquemment. L’homme ne vous plaît pas, j’ai compris. Mais je le crois probe. Son grand défaut est possiblement de toujours croire au Canada, si défaut il y a là…
Enfin, j’oserais ajouter que Jean Charest ne dirige pas une « garderie ». Que ses ministres fassent ceci ou cela, en dehors de leurs responsabilités ministérielles, est assez difficilement gérable, il me semble. Mais j’ai peut-être tort…
Évidemment, je m’attends à ce que vous me démontriez le contraire. Et ce sera bien sûr un plaisir de vous lire.
» Mais je le crois probe. » M. Perrier, vous êtes trop bon. Favoriser les PPP n’est pas le signe d’une honnête personne.
Regardez ce qui se passe avec la 25 et maintenant la 30. Tous les beaux arguments que l’on avait avancés pour justifier un PPP s’effondre, comme prévu, me plais-je à ajouter.
Je partage l’opinion de M. Mitriou, avec moins de verve, j’en conviens, mais quand même.
Sans rancunes.
Merci, Monsieur Gingras.
Vous tenez compte de mon opinion. Mais les fameux PPP, je ne sais trop qu’en penser, à vrai dire.
N’empêche que je préférerai toujours l’entreprise privée, dans la mesure où celle-ci ait un comportement correct, à toute implication du système public dans quoi que ce soit.
Le système public a trop souvent l’heur de faire les choses de façon outrageusement coûteuses, avec beaucoup de lenteur, et assez mal.
Mais je me trompe peut-être…
PPP = Intéressant si contrôlé.
Si mesuré, si réglementé, si rigoureusement suivi.
Au besoin par un comité.
Sinon, où est l’intérêt autre que donner l’argent aux amis?
Les gens ne sont pas bêtes. Ils laissent faire. grosse différence.
J’ose espérer qu’on dira un jour : « Grosse erreur. »
Je rêve. Et je rêverai toujours.
Ça me tient en VIE!
@ Claude
D’abord je vous salue. Vous êtes toujours fidèle au poste.
« Il y en a partout, il y en toujours eu, et il y en aura toujours, des abuseurs. Des profiteurs. On n’y peut rien – ou pas grand-chose. »
Entièrement d’accord. On n’y peut pas grand-chose. C’est dans la nature humaine. On peut cependant, à tout le moins, convenir et dire que c’est « immoral ». Je laisse les guillemets parce qu’il s’agissait d’un peu de sarcasme ou d’ironie de ma part. Les mots « moral » et « immoral » n’ont pas beaucoup de résonance dans ma tête d’athée.
« …Jean Charest… L’homme ne vous plaît pas, j’ai compris. Mais je le crois probe. Son grand défaut est possiblement de toujours croire au Canada, si défaut il y a là… »
Il y a défaut et ce n’est pas seulement de croire au Canada, ce qui est somme toute assez anodin, mais plutôt de croire un peu trop en Power Paul, au point d’en être le valet admiratif. Moi, Jean Charest m’apparaît fort improbablement probe ou probablement improbe. J’ai le jugement sévère avec lui. Ça compense pour ceux qui sont trop indulgents à son égard.
« Jean Charest ne dirige pas une « garderie ». Que ses ministres fassent ceci ou cela, en dehors de leurs responsabilités ministérielles, est assez difficilement gérable, il me semble. »
Entièrement d’accord. Je ne demande pas à Jean Charest de s’immiscer dans la vie privée des membres de son cabinet mais la moindre des choses serait qu’il s’abstienne de nommer des ministres en sachant qu’il les place du même coup dans une potentielle situation de conflit d’intérêts. C’est quand même assez fou cette situation. Jean Charest nous dit avec le sourire qu’il savait au moment de confier des taches importantes à Nathalie Normandeau que celle-ci s’amusait avec François Bonnardel. C’est un beau couple. Là n’est pas le problème. Le problème c’est qu’au moment où Jean Charest a formé son cabinet il savait très bien ce qui se passait et comme tous les québécois il savait également que le nom de François Bonnardel circulait sérieusement comme éventuel remplaçant de Mario Dumont. Jean Charest rêvait-il d’assister, avant la fin de son règne, au mariage éventuel de la vice première ministre avec le chef d’un parti adverse et peut-être au mariage du PLQ avec l’ADQ? Pensez-vous que Pauline Marois nommerait Louise Beaudoin au poste de vice première ministre si elle savait que celle-ci a une liaison sérieuse avec Jean Charest. Il n’est pas question d’empêcher les gens de s’aimer mais simplement de s’abstenir de nommer à un poste important une personne qui entretient une liaison sérieuse avec « l’ennemi ».
« Mais les fameux PPP, je ne sais trop qu’en penser, à vrai dire. »
Sauf erreur la formule des PPP a été imaginée par Margaret Thatcher et son entourage il y a peut-être une trentaine d’années. La formule a été implantée dans quelques secteurs d’activités au Royaume-Uni. Puis la formule s’est répandue dans quelques pays européens. Ce fut un échec lamentable dans presque tous les cas, assez pour faire reculer tous les gouvernements qui ont tenté cette aventure qui logiquement ne peut pas fonctionner. Comment peut-il nous en coûter moins cher pour construire quelque chose en partenariat avec le privé quand on sait qu’une partie de la facture ira en profits au privé et à ses actionnaires? Cette part de profits c’est de l’argent inutilement dépensé par l’État. Comment se fait-il que Jean Charest essaie de recycler une formule qui s’avère être un cauchemar pour les gouvernements qui se sont laissés séduire par cette formule? Est-ce trop compliqué de vérifier ce qui se fait ailleurs avant de plonger dans de vieilles formules qui ne tentent plus personne à part Jean Charest et ses petits namis du privé?
Il n’y a même pas un seul argument logique qui pourrait expliquer pourquoi le privé serait toujours mieux que le public. On s’appuie sur des préjugés savamment entretenus, rien de plus.
@ M. Perrier
Je suis un ancien fonctionnaire, maintenant à la retraite, et je peux vous affirmer qu’il est possible pour la fonction publique de mieux faire que le privé. Je l’ai vécu en traduction, je vous rassure tout de suite, je ne traduisais pas, cependant, je vérifiais le travail des traducteurs du privé et il fallait normallement corriger un très grand nombre d’erreurs d’interprétation, le traducteur n’étant pas familier avec le sujet. Lorsque nos traducteurs étaient » maison « , cet exercice était inutile.On relisait, bien sur, mais on ne corrigeait pas, ou peu. Mais avec les Conservateurs on a coupé dans les coûts d’exploitation. Les fonctionnaires\traducteurs étaient assez bien payés merci, grand bien leur fasse, après tout, ils avaient fait de longues études universitaires, et ils travaillaient bien. La faiblesse de l’entreprise privée était l’ignorance des sujets traités. Un généraliste n’est pas un spécialiste.
Pour ce qui est des autres ministères, je suis ignorant, donc je me tais.
En Angleterre, les entrepreneurs des PPP, malgré leurs belles promesses de gérer en fonction du bien commun, ont, dans trop de cas, les plus célèbres, géré en fonction de l’intérêt des actionnaires, et laissé aller à vau-l’eau l’état général de ce qu’ils devaient administrer et entretenir en bon état : les trains et les hôpitaux par exemple. L’Etat a dû reprendre à son compte et en plus mauvais état qu’il ne l’avait vendu.
Une obsession n’est jamais bonne et les PPP en sont une. Ce concept défie la logique et l’entendement.
Et oui, je vous lis toujours avec attention, comme je le fais avec tous les autres. C’est une question de respect, comme vous le faites vous même si j’en juge par les découvertes de mes inovations en orthographe. 🙂
Cordialement.
Petite incisive. Un Certain, qui se voulait grand prophète en son pays, proclama un jour que l’état n’avait rien à faire dans la chambre à coucher. Comment, que l’on soit un fidèle du prophète ou un parfait incroyant, ne pas lui donner raison. Petit problème rémanent toutefois : avec ce beau couple, l’état EST dans la chambre à coucher ! À moins d’en faire un avatar des partenariats public-privé (il y en a certainement qui en sont capables ), le problème demeure donc entier.
De deux choses l’une. Soit la philosophie de l’ADQ est proche de celle des Libéraux : ceci expliquant cela; soit leur philosophie n’a rien à voir là-dedans et c’est purement une question de phéromones.
Pour ma part, j’y vois un mélange des deux. Les Libéraux de Jean Charest n’ont plus rien à voir avec les Libéraux de Jean Lessage et l’Equipe du tonnerre qui ont fait entrer le Québec dans les temps modernes. On a trahit cette philosophie depuis et l’ADQ et les Libéraux peuvent coucher ensemble, au propre comme au figuré. La mayonaise a pris. Essayez de les départager maintenant.
On comprend mieux que M. Charest ne se fasse oas de bile. Il n’y a pas lieu.
Joli mot » Rémanent « . On le voit rarement. J’ai dû consulter mon dictionnaire pour me rafraîchir la mémoire. Vous avez des lettres, ça se voit. Merci, ça fait plaisir.
@ Paolo
Vous êtes assez impayable, si j’ose dire… Si, moi, je suis « toujours fidèle au poste », comme vous le faites valoir, vous êtes pour votre part toujours fort divertissant!
Notamment dans votre incomparable style d’écriture, alors que vous écrivez: « Moi, Jean Charest m’apparaît fort improbablement probe ou probablement improbe ». Peu importe mon désaccord, je rigole.
Par ailleurs, vous ne ratez rien non plus… C’est ainsi que vous me répliquez à l’égard de quelques mots adressés à notre ami Serge Gingras concernant les PPP.
Mais continuez à m’envoyer de ces répliques, qu’elles soient sympathiques ou cinglantes. On nous lit, sur ce site. Et ce simple fait permet à chacun de se former un opinion mieux étoffée à l’égard de tout ce que vous et moi abordons dans nos échanges.
Nous sommes presque devenus, conjointement, un « service public »…
M. Gingras, je vous avoue que je partage également vos appréciations concernant la mayonnaise libérale-adéquiste, ne sachant plus lequel des deux fournit le jaune et l’autre l’huile. Les libéraux trouvent commode d’avoir, un peu sur leur droite, un parti dont ils peuvent piquer les idées, tout en laissant porter le poids des critiques concernant ces emprunts sur l’idéologie adéquiste, ce qui les dédouanent d’autant, tandis que les adéquistes peuvent s’appuyer sur ces emprunts par les libéraux pour tenter de montrer la pertinence de leurs idées. Au final, le pot de terre adéquiste finira bien par payer sa fréquentation du pot de fer libéral, la divulgation du pot aux roses du beau couple ne faisant que précipiter un peu les choses.
@ Serge Gingras
Si je vous ai de quelque façon offensé, je m’en excuse profondément.
Étant moi-même issu de la région outaouaise, d’Ottawa en fait (ce que vous savez déjà) , et ayant l’entièreté de ma famille (tantes, oncles , neveux et nièces – j’en oublie?) de cette belle région, plusieurs ont été ou sont encore dans la fonction publique fédérale.
Et tous sont des personnes fort travaillantes, désireuses de rendre le meilleur service possible à la population. Comme je ne doute aucunement que cela ait été votre propre cas lors de votre carrière.
Par ailleurs, nous sommes tous deux retraités aujourd’hui.
Enfin, pour essayer de vous répondre un peu plus pertinemment en ce qui concerne les traducteurs, je vous dirai tout simplement que je suis totalement d’accord avec ce que vous m’écrivez, que les traducteurs de la fonction publique sont certainement bien davantage qualifiés pour la traduction de documents gouvernementaux que ceux du privé, lesquels se retrouvent forcément un peu perdus dans ces textes inhabituels pour eux.
Il y a de la place pour tous, dans ce monde. S’agit tout simplement de trouver la bonne… (Si « simplicité » il peut y avoir à cela…)
Bonne journée!
Cher M. Perrier,
Je n’ai nullement été offensé, pas du tout pantoute, pas le moindrement. Je me suis porté à la défense de la fonction publique parce que je trouve qu’on la vilipende trop aisément. C’était mon côté scout : défendre la veuve, l’orphelin et la fonction publique. 🙂
Cela dit, à un moment donné, nous sommes tombés sur une traductrice, secteur privé, au poil. Elle était parfaite. Malheureusement, nous l’avons perdue. Sic transit les meilleurs.
Bonne journée à vous titou. On se revoit au prochain sujet qui est déjà annoncé : l’ADQ.
Merci beaucoup, Monsieur Gingras.
J’apprécie beaucoup votre sens de la « correctitude », (un néologisme de mon cru…).
Au plaisir d’un nouvel échange d’idées.
« Il n’y a même pas un seul argument logique qui pourrait expliquer pourquoi le privé serait toujours mieux que le public. On s’appuie sur des préjugés savamment entretenus, rien de plus. » P. Mitriou
On pourrait dire exactement la même chose sur le public. L’URSS fut le summum du public = échec total alors que les USA, avec tous ces défauts et iniquités, est et demeure la plus grosse machine de création de richesse qu’ait conuue notre planète en étant la société qui fait la plus grande place au privé.