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Un «café» de $225 000…

 

Aujourd'hui, avec une précision chirurgicale, Richard Wolson, procureur de la Commission Oliphant, a fait la démonstration que Brian Mulroney, lorsqu'il a témoigné en 1996 dans le cadre de sa poursuite contre le gouvernement fédéral dans l'affaire Airbus, n'avait pas dit TOUTE la vérité lorsqu'il a dépeint sa relation avec Karlheinz Schreiber APRÈS son départ de la politique comme s'étant limitée à une ou deux rencontres au-dessus d'une «tasse de café».

Une ou deux tasses de café, semble-t-il, qui valaient dans les faits au moins 225 000$… Puisqu'à trois reprises, M. Mulroney a accepté de Schreiber des enveloppes d'argent comptant, en coupures de 1 000$, en échange d'un «travail» de lobbying qui demeure non documenté.

Cette «restriction mentale» de M. Mulroney soulève de sérieuses questions quant aux vraies raisons l'ayant amené à ne pas donner cette information pourtant essentielle. Il dit que c'est parce que les avocats ne lui ont jamais posé la question en 1996. Mais comme aucun d'entre eux n'était au courant qu'il y avait même une «relation d 'affaires» entre Mulroney & Schreiber, comme le faisait remarquer Me Wolson aujourd'hui, comment auraient-ils pu lui poser la question?

Mais je vous avouerai que de tout ce que j'ai entendu aujourd'hui, ce qui m'a littéralement jetée en bas de ma chaise était l'autre démonstration faite par Me Wolson, preuves à l'appui.

Soit que Schreiber, un lobbyiste, semblait profiter d'un accès privilégié et répété au premier ministre du Canada lorsque M. Mulroney était au pouvoir.

En même temps que l'on se prend à s'interroger au Québec sur l'éthique des élus, la nature de leurs liens avec certaines entreprises et de possibles conflits d'intérêts et trafics d'influence, les révélations de la Commission Oliphant nous amène en plein sur ce même terrain!

Alors, je pose encore une fois LA question:

Comment se fait-il que pendant des années, un lobbyiste, quel qu'il fut, ait eu un accès aussi privilégié et aussi répété à la personne même du premier ministre du Canada pour la simple raison qu'il s'était lié d'«amitié» /sic/ avec au moins deux de ses plus proches collaborateurs?

D'autant plus que M. Mulroney affirmait aujourd'hui qu'il rencontrait des «centaines» de Schreiber, donc de lobbyistes, sur une base régulière?

«Inquiétant», vous dites? Tout un euphémisme.

Brian Mulroney tentait de justifier ces rencontres à répétition en qualifiant Schreiber de «lapin Energizer» – voulant dire qu'il ne lâchait jamais.

Désolée. Mais c'est bel et bien lui, le premier ministre, qui acceptait de rencontrer ce «lapin» hyperactif à autant de reprises.

Ce qui nous amène à quelques sous-questions:

– Comment se fait-il que ce premier ministre semble avoir été autant intéressé par le projet dont Karlheinz Schreiber était le lobbyiste? Ce qui ne pouvait que lancer un message fort particulier dans l'appareil gouvernemental. Car n'oublions pas qu'ici, dès qu'un premier ministre laisse le moindrement entendre qu'il s'«intéresse» à ceci ou cela, c'est comme si le Roi avait parlé. 

– Comment se fait-il que les rencontres avec Schreiber se sont poursuivies plusieurs mois après décembre 1990 alors que son nouveau chef de cabinet lui apprenait que le projet de véhicules blindés coûterait 2$ millions par emploi créé (!) et que M. Mulroney dit l'avoir abandonné?

– Comment se fait-il que cette relation d'«affaires» ait été déterminante au point où, dès qu'il quitte son poste de premier ministre, Brian Mulroney devient en quelque sorte le lobbyiste du lobbyiste en acceptant de Schreiber dans des chambres d'hôtel au moins 225 000$ en argent comptant – montant qui se retrouva dans des coffrets de sûreté et ne fut déclaré au fisc que plusieurs années plus tard?

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C'est Stephen Harper qui doit commencer à se gratter sérieusement l'occiput en se demandant où et quand tout cela va finir…

La suite, mardi.

http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/national/200905/14/01-856549-mulroney-na-pas-tout-dit-charge-wolson.php