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Dupuis & le piège de l’inaction

Petit retour sur l'affaire Villanueva.

1- Aujourd'hui, Amir Khadir a mis le doigt sur un très, très gros bobo: est-ce que le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, ne serait pas carrément en conflit d'intérêt étant donné que depuis les débuts de toute cette affaire, il est en même temps le ministre responsable de la police ET celui qui est responsable des termes d'une enquête portant sur la mort d'un jeune tombé l'été dernier sous les balles d'un policier?

Si poser la question, c'est y répondre, il devient alors évident que cette enquête devrait tomber sous la juridiction de la ministre de la Justice.

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2- Mardi soir, en entrevue avec Anne-Marie Dussault sur les ondes de RDI, Me Alain Arseneault, coordonnateur des avocats de la famille Villanueva, y est allé de son propre verdict, sans appel, sur le ministre Dupuis:«on a perdu six mois à cause de l'intransigeance et même peut-être de l'arrogance du ministre».

Il avançait aussi que l'«entourage» du ministre serait rempli d'anciens policiers, dont la «culture» ferait ombrage à son jugement.

Possible.

Mais au-delà de cet «entourage» et du probable conflit d'intérêts, était-ce vraiment de l'intransigeance ou même de l'arrogance qui a mené le ministre à se comporter de manière à ce que le tout se termine hier dans un cul-de-sac dû à l'inégalité de traitement entre les parties concernées?

En fait, si je devais avancer une hypothèse sur ces six mois perdus, ce serait plutôt celle-ci:

Et si l'intransigeance et l'arrogance du ministre n'avait été dans les faits que de l'inaction planifiée? Comme une peur viscérale de bouger, de prendre position sur un dossier extrêmement controversé dans une situation hautement volatile, socialement et politiquement.

Comme dans la formule consacrée: il est urgent de ne rien faire!

Et si j'avance cette hypothèse, c'est qu'elle s'inscrit parfaitement dans ce que le gouvernement Charest est devenu en 2007 et 2008 après s'être retrouvé en situation minoritaire.

La solution que le premier ministre avait trouvé à ce moment pour tenter de reconquérir sa majorité – vous vous en souvenez sûrement -, était précisément de ne plus faire de vague, d'éviter toute controverse et surtout, de ne rien faire ou dire qui aurait pu lui aliéner l'électorat.

Dans tous les dossiers, y compris même celui de la Commission Bouchard-Taylor, le mot d'ordre informel était d'ignorer l'essentiel – toujours controversé par nature – tout en se concentrant sur l'accessoire – nettement plus payant politiquement.

Bref, que ce soit dans l'affaire Villanueva ou d'autres dossiers «chauds», ce gouvernement a justement très peu «gouverné». Il a surtout «géré» des crises.

Et, paradoxalement, des crises qui, de par sa propre inaction, il a souvent contribué à alimenter ou à créer lui-même..

«Trancher» coûte toujours politiquement. Et ce gouvernement avait décidé d'éviter tout coût de ce genre. 

Son problème aujourd'hui est qu'il a beau être redevenu majoritaire, ses péchés d'inaction commis en 2007 et 2008 dans certains dossiers à des fins électoralistes commencent à revenir le hanter.

Le dossier de la mort du jeune Fredy Villanueva en est un. Et un gros…

Mais il n'est pas le seul où la pression publique l'oblige maintenant à «bouger», soit pour vrai, soit en apparence.

On le voit aussi dans le dossier de la Caisse de dépôt (où tout allait supposément «bien» avant l'élection); dans celui des résidences pour personnes âgées; dans celui des FIERs; dans les urgences d'hôpitaux (sous pression, le ministre de la Santé, après avoir déclaré il n'y a pas si longtemps qu'il ne s'y fixerait plus d'«objectifs» spécifiques vient aussi de changer son fusil d'épaule); etc….

Le PLQ a beau ne plus vouloir débattre dans ses propres instances, la société civile, elle, semble vouloir débattre de plus en plus de ce que fait, mais surtout de ce que ne fait PAS ce gouvernement…