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Retour sur Rivière-du-Loup

 

Retour sur les élections partielles de lundi soir.

Marguerite-Bourgeoys: rien à dire sur les résultats. L'ancien comté de Monique Jérôme-Forget demeure un château fort libéral. Donc, 72% pour le candidat libéral Clément Gignac avec un taux de participation de 23%, c'est dans la nature des choses.

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C'est à Rivière-du-Loup que c'est nettement plus intéressant.

Jean D'amour du PLQ a obtenu 47% des voix. Paul Crête a eu 36% pour le PQ. Gilberte Côté de l'ADQa obtenu 14,8%.

Ce matin, les journaux titraient: «Défaite amère pour le PQ», «Dur coup pour le PQ», etc. À la une du Devoir, une chronique était coiffée du titre «Merci, Monsieur!», faisant de cette mention récente par Jacques Parizeau dans une conférence de possibles «crises» pour mousser la souveraineté, un des principaux facteurs de la victoire de Jean D'Amour. Auquel il faudrait donc aussi ajouter l'impact présumé du «Plan Marois» pour la souveraineté…

Bon. Prenons le tout une chose à la fois.

Vous me permettrez donc de mettre mon chapeau de politologue et de vous soumettre mes propres hypothèses.

– Sur le présumé «facteur» Parizeau:

Avec tout le respect que je dois à mes collègues, je n'achète pas cette explication. Comme facteur mineur, peut-être. Mais pas comme facteur majeur.

De fait, une telle explication soulève une question corollaire: est-ce que le PQ aurait REMPORTÉ l'élection dans Rivière-du-Loup si les électeurs n'avaient jamais entendu parler de cette conférence de M. Parizeau (*) et si Pauline Marois n'avait pas rendu publique son fameux «Plan»?

J'avancerais l'hypothèse que cela n'aurait pas plus permis au PQ de remporter ce comté.

Pourquoi?

Parce que la question constitutionnelle, à de rares exceptions près, n'est à peu près jamais une préoccupation primordiale des électeurs dans une élection partielle. Et aujourd'hui, encore moins en situation de difficultés économiques!

Logiquement, si la question nationale avait le moindrement préoccupé les électeurs de Rivière-du-Loup, c'est vers le PQ qu'ils se seraient tournés puisque le «Plan Marois» est dans les faits un plan de nature autonomiste. Et donc, qui aurait dû plaire à un comté adéquiste depuis 1994…

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Ce qui m'amène à mon hypothèse principale quant à la victoire du PLQ:

Ce qu'on voyait monter dans ce comté, adéquiste depuis 1994 alors que Mario Dumont devenait chef de l'ADQ, était une volonté de tourner la page sur cette ère Dumont, maintenant qu'il a quitté la politique.

Et surtout, d'en profiter pour retourner au «pattern» habituel du comté, soit de voter du côté du POUVOIR. 

J'en veux pour preuve ceci: à l'exception de l'ère Dumont, Rivière-du-Loup vote du côté du pouvoir.

Le comté fut donc péquiste en 1976 et 1981, sous René Lévesque.

Il fut libéral en 1970, 1973, 1985 et 1989 sous Robert Bourassa.

Il fut Union nationale en 1966 sous Daniel Johnson père!

Et il fut libéral en 1960 et 1962 sous Jean Lesage.

Et depuis lundi, avec le départ de M. Dumont, il devient libéral sous Jean Charest.

Bref, ce comté a voté avec le pouvoir même lorsque les gouvernements sortants connaissaient des difficultés. 

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Maintenant, est-ce que le PQ a VRAIMENT reçu une gifle ce lundi soir dans Rivière-du-Loup?

Voici les résultats du PQ dans Rivière-du-Loup depuis l'arrivée de Mario Dumont:

1994: 27%

1998: 27%

2003: 18%

2007: 11%

2008: 14%

Et ce lundi soir? Le PQ a eu 36%. Soit son meilleur résultat depuis 1989. Et face à un candidat libéral dont le parti est au pouvoir.

Cela étant dit, Pauline Marois a tout de même commis deux erreurs tactiques importantes dans cette campagne:

Si elle avait fait l'analyse du «pattern» de vote dans Rivière-du-Loup, elle aurait vu qu'il était fort peu probable de le remporter dans des circonstances où Mario Dumont n'y est plus; où le PLQ est au gouvernement; et où Jean D'Amours, maire de Rivière-du-Loup de 1999 à 2007, est un homme populaire dans le coin qui, de plus, en était à sa troisième tentative pour le PLQ (il s'était présenté en 1994 et en 2007).

Que le PQ y ait néanmoins fait son meilleur score en 20 ans en dit long sur la qualité objective de la candidature d'un Paul Crête. Avec ou sans Pauline Marois.

Mais à l'impossible, il n'aurait pas dû être tenu par Pauline Marois qui ce faisant, a commis sa seconde erreur tactique en créant des attentes et donc, en «brûlant» un très bon candidat dans un comté quasiment gagné d'avance pour le PLQ.

De fait, c'est l'ADQ qui a mangé une gifle en passant de 52% le 8 décembre 2008 à 14% ce lundi.

La preuve ultime que le comté a bel et bien tourné la page sur l'ère Dumont et est retourné du «bon bord» – celui du pouvoir.

D'autant plus que ces fameux «messages» que les élections partielles envoient habituellement au gouvernement en place en votant pour l'opposition se matérialisent surtout en FIN de mandat. Et non à son début…

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(*) Dans les faits, la plupart des médias ont braqué les projecteurs sur cet aspect secondaire d'une conférence donnée par M. Parizeau le 6 juin, alors que l'aspect central de son discours portait sur une critique sévère envers les «élites souverainistes» quant à la promotion de leur option. (Voir ma chronique «Un jugement sévère»)