Sur un sujet dont on ne parle que trop rarement au Québec, cet article du professeur de mathématiques Charles Castonguay – sûrement le plus grand expert au Canada en cette matière -, contient de nombreuses données portant à réflexion.
Son titre: «La lente agonie du français hors Québec».
Son sujet:
«Où en est le français à l'extérieur du Québec en ce 40e anniversaire de la Loi sur les langues officielles du Canada? L'enseignement du français comme langue seconde dans les écoles du Canada anglais a certes connu quelque succès. Cela sert trop souvent, cependant, à masquer le recul de l'usage du français comme langue première au foyer.»
Il est loin, madame Legault, le temps où les Canadiens-français représentaient un peuple vraiment distinct des « Anglais », et luttait farouchement pour survivre, en butte aux plans machiavéliques d’assimilation comme l’odieux règlement 17.
Aujourd’hui, l’anglais n’est plus perçu comme la langue ennemie, mais comme une langue commune très utile, qui n’appartient plus exclusivement aux « Anglais » proprement dits, mais bien à tous ceux qui vivent au Canada. Aussi les Canadiens-français vivant hors du Québec ont-ils tendance à s’assimiler volontairement, pour permettre à leurs enfants de lutter à armes égales avec leurs petits voisins de toutes origines, qui eux aussi délaissent progressivement leur propre langue. Le français a des droits historiques au Canada, que n’ont pas l’espagnol, le mandarin ou le farsi, direz-vous ? Peut-être, mais ce qui compte, c’est la volonté de se battre pour ces droits, et la plupart des Canadiens-français ne croient plus que le jeu en vaille la chandelle, d’autant plus que la religion, qui comptait jadis tout autant que la langue dans la définition d’un peuple, a perdu beaucoup de son importance, comme on sait.
Même au Québec, on voit passer ce même courant: il était extrêmement rare, il y a vingt ou trente ans, qu’on entende des chansons en anglais dans nos shows télévisés, mais la chose est devenue courante non seulement à Radio-Canada, mais aussi à Télé-Québec. Voyez le nombre de nos jeunes chanteurs qui préfèrent composer en anglais. Même en France, l’anglomanie fait des ravages. Bien sûr, le cube de glace du Québec mettra beaucoup plus de temps à fondre que celui de l’Ontario francophone. Et la France mettra plus longtemps que le Québec. Il n’empêche que la tendance est là.
Une autre vérité de Lapalice. J’ai travaillé 36 ans au fédéral et j’ai cotoyé une floppée d’assimilées, volontaires ou involontaires. J’ai vu des collègues faire sauter les accents de leur nom, comme Céline Dion aux USA.
Les carottes sont cuites depuis longtemps. Seuls les francophones fédéralistes persistent à nier ce fait.
On peut très bien se servir de l’anglais pour travailler, pour voyager, pour se divertir. On est pas tenu de l’employer à la maison. Lorsqu’on en est redu là, on est cuit. Le mal est fait.
En France, ils vont continuer à parler français, malgré la mode de l’anglomanie. Voltaire admirait les Anglais et l’Angleterre, il n’a pas moins écrit en français.
Personnellement, j’adore la langue et la culture anglaise. Je regarde beaucoup la télé britannique et des tonnes de DVD d’Angleterre, la meilleur télé au monde. Cela dit, il ne se dit pas un mot d’anglais dans la maison, sauf quand ma conjointe apprend ses leçons d’anglais.
M. Castongay annonce la météo, car il sait la lire. L’horizon est bouchée. Point final.
Messieurs Gingras et Sauvé ont raison tous les deux, je crois bien. La langue anglaise est devenue l’espéranto espéré depuis l’idée que l’idée de la Tour de Babel n’est pas une utile idée.
Les autres langues vont survivre longtemps encore mais la langue anglaise, à cause de la force de l’économie et des technologies américaines et du grand nombre de pays colonisés par l’Angleterre, va finir par les éclipser même en Chine et au Japon et, principalement en Inde où la langue anglaise prospère et où vit plus d’un milliard d’humains en pleine révolution économique.
Fait que…on gagnera sa vie en anglais et on se cultivera en français aussi, séparé ou non du Canada. Yes sir !
Trèves de pessimisme, on se frotte les mains, on se décourage, on ne voit que du négatif, on broie du noir, c’est triste , pleurons tous ensemble et vive le Québec libre comme ultime signe de défiance et seule planche de salut!
Mais au Québec, la proportion de gens qui parlent français n’a jamais été aussi élevé, les « maudites grosses anglaises de chez Eaton » ont disparu avec la chaîne. Pour accéder à tout poste de direction dans le monde des affaires au Québec, une maîtrise du français est requise. Les anglophones du Québec sont le groupe linguistique le plus bilingue du Canada.Les vedettes et les produits culturels québécois n’ont jamais rayonnés autant à l’extérieur de nos frontières. Notre dynamisme culturel fait l’envie de tout les petites nations du monde.
Toutes ces choses très positives sont balayées du revers de la main par nos ethnocentristes qui aiment la langue et la culture anglaise. eux-même mais qui déplorent le fait que d’autres partagent leur amour. Et que déplore-t-on au juste ? »l’anglais n’est plus perçu comme la langue ennemie » un réflexe du 19 ième siècle digne de Lionel Groulx et du curé Labelle.
Franchement, j’en ai marre de cette phobie de voir toute évolution comme un signe précurseur de notre disparition collective. Les assimilés québécois francophones, les Carmichael, Johnson, Robinson, Blackburn etc etc eux se sont bien intégrés et cela est considéré comme normal chez nous, mais dès qu’un Tremblay de Calgary se manifeste dans l’autre camp et bien là c’est la désolation le désespoir, le drapeau rouge qui signale notre destinée collective incontournable.
Et nous fédéralistes québécois , on se fait affubler de jovialistes qui chantent sur le pont du Titanic après l’iceberg. Franchement, arrêtez chers concitoyens , de grâce relisez-vous . Vos propos sont dignes d’un salon mortuaire. C’est vieux jeu, c’est »loser », c’est dépassé, c’est déprimant . ä n,a aucune chance d’inspirer nos jeunes. Si on suit votre logique du condamné , faudrait empirer notre situation avec une indépendance qui ne rallie pas la majorité, faudrait prendre le remède coûte que coûte même si le patient devait en mourir.
Quand allez-vous vous réveiller et changer votre fusil d’épaule. À quand une mise sur notre dynamisme, sur notre potentiel non-exploité, sur notre attirance incroyable parmi de nombreux peuples moins fortunés ? Quand allons-nous arrêter de radoter sur Lord Durham et la rue Amherst et focuser sur nos atouts réels et capitaliser là dessus pour devenir la partie la plus prospère du Canada au lieu de pleurer la perte des territoires de l’Illinois au 17 ième siècle,de l’assimilation des travailleurs de bobines du Rhode Island au 19 ième siècle?
M. David Lépine,
Nous ne sommes pas pessimistes du tout, du tout, du tout. Nous analysons simplement une situation à l’échelle locale et mondiale itou.
On le voit, même en France, pays souverain sauf pour ce qu’ils ont délégué à l’Union européenne comme la monnaie commune, les Français de France s’anglicisent, tout en conservant une très bonne syntaxe française, émaillée de nombreux mots anglais.
Faut pas vous décourager M. Lépine, même si vous êtes fédéraliste, ce n’est pas un crime, malgré nos 2 rapports d’impôt et le dédoublement des services gouvernementaux, ce qui fait travailler une mer de fonctionnaires reconnaissants qui font tourner notre économie.
« les Français de France s’anglicisent, tout en conservant une très bonne syntaxe française, émaillée de nombreux mots anglais. » G.Bousquet
Prenez n’importe quel dictionnaire anglais et vous verrez bien que 60 % de cette langue provient du français. Le français provient en bonne partie du latin. L’anglais et l’américain sont en train de devenir deux langues distinctes. Depuis Adam et Ève, les langues évoluent, disparaissent ou se métamorphosent. Au Québec nous devrions être les seuls à l’abri de ces phénomènes ? Pourquoi ?
Tenons-nous en au diagnostic, monsieur Lépine. Chercher des remèdes (indépendance du Québec, fédéralisme asymétrique, nouvelles façons d’aider les communautés francophones hors-Québec…) nous entraîne déjà trop loin. Quand j’ai écrit: ‘La langue anglaise n’est plus perçue comme la langue ennemie », ce n’était pas du tout avec amertume: je reconnais que les jeunes anglophones du Québec sont devenus remarquablement bilingues, et qu’ailleurs au Canada, le mépris d’autrefois pour le français et ceux qui le parlent a largement disparu.
Je crois pourtant que l’hostilité d’autrefois aidait le français à survivre: on n’a pas très envie de s’assimilier à des gens qui nous méprisentt, malgré l’avantage économique qu’on peut en retirer. Je n’en conclus pas qu’il faut regretter le temps du mépris: il est beaucoup plus agréable pour les gens de vivre dans une atmosphère de respect mutuel, même si cela accélère le déclin du français. Mais ce déclin est indéniable, non ?
@ M. Sauvé
Merci de votre explication, je comprends mieux vos propos et je m’excuse de ma réaction primaire.
Est-ce que le français était moins vulnérable sous l’ancien régime parce que les Anglais méprisaient les francophones ? Ou est-ce qu’il était mieux protégé parce que la société francophone était homogène et s’autosiffisait avec un taux de fécondité exceptionnel ? je ne saurais vous répondre.
Déclin indéniable ? Moi j’ai grandi à Montréal dans les années 60 et le statut de la langue française et de ses locuteurs était dénigrable. Pas besoin de vous brosser un tableau pour illustrer, suffit de dire que les progrès depuis ont été réels et irréversibles. Est-ce du jovialisme, pour moi c’est un constat. Par exemple , aujourd’hui on se scandalise et on dénonce le fait de se faire aborder en anglais rue Ste-Catherine ouest, mais en 1965 on ne se posait même pas la question, tout était en anglais uniquement. La fonction publique fédérale était 99% anglaise et son nom français était le « service civil » une traduction littéraire de civil service et une insulte à notre langue. Est-ce que la fonction publique d’aujourd’hui accommode en fraçais tous les francophones qui y travaillent ? Je ne pense pas, mais il y a eu progrès indéniable et non déclin.
Si un Finlandais et un Chinois se parlent en anglais aujourd’hui, ce n’est sûrement pas à cause des Westmountais méprisants des années cinquante. D’ailleurs le niveau de l’anglais langue seconde mondiale est exécrable et nous Québécois qui l’avons comme langue seconde naturelle et facilement apprenable, jouissons d’un gros avantage. Dommage pour nous que nous n’osons pas monayer cet avantage par crainte atavique de l’anglais.
M. Lépine écrit : «D’ailleurs le niveau de l’anglais langue seconde mondiale est exécrable et nous Québécois qui l’avons comme langue seconde naturelle et facilement apprenable, jouissons d’un gros avantage. Dommage pour nous que nous n’osons pas monnayer cet avantage par crainte atavique de l’anglais.»
Mais nous en jouissons déjà. Nous aimons tellement la langue anglaise que, dès que nous constatons que notre interlocuteur(trice) pourrait parler l’anglais, nous « switchons » vite à l’anglais, subito presto, afin de le pratiquer un peu, principalement si on n’est pas de Montréal`vu que les Anglos sont rares à Matane et à St-Hyacinthe.
Pour préciser encore plus ma pensée: ce n’est pas la faute des Canadiens-anglais si le français est en voie de disparition dans au moins huit provinces sur dix: c’est à cause de la terrible force d’attraction de l’anglais, et aussi un peu parce que les Canadiens-français sont moins attachés à leur langue que d’autres peuples. Par exemple, un Français qui émigre aux États-Unis a plus de chances de conserver sa langue qu’un Québécois qui s’installe aux USA.
L’assimilation rapide des Canadiens-français hors Québec est un argument de moins dans la besace des fédéralistes (l’argument: « N’abandonnons pas nos frères des autres provinces ») mais il ne constitue quand même pas une raison sérieuse de faire l’indépendance du Québec. Les Québécois décideront de partir ou de rester en fonction de ce leurs propres intérêts, tels qu’ils les perçoivent, et non par dépit pour ce qui arrive à leurs cousins.
Monsieur Lépine, j’ai 56 ans et je me souviens aussi de la période où tout était en anglais à Montréal. Bien sûr, les choses ont radicalement changé. Dans les années 60, le français était encore humilié, mais l’avenir nous appartenait, parce que la démographie jouait encore pour nous, et parce qu’une meilleure éducation allait nous permettre, collectivement, de prendre notre place. Aujourd’hui, on ne peut plus dire que l’avenir nous appartient: nos jeunes sont beaucoup moins nombreux que nous ne l’étions, et ils habitent de plus en plus hors de l’île. Sans compter que le pouvoir d’attraction de l’anglais s’est peut-être encore accru, avec les communications et les voyages devenus encore plus faciles que dans notre jeunesse.
L’avenir de la langue française, du positif et du négatif plus haut, on ne sait pas ce qui gagnera et si le bonheur est vraiment plus grand en français qu’en anglais ou en espagnol ou en russe. Faut commencer par gagner sa vie correctement dans de bonnes conditions. C’est vrai chez toutes les nations.
C’est bien beau de placer la conservation de la langue et de la culture en premier mais si on n’a pas de job, on n’ira pas loin dans une mer anglophone. Avoir les deux, très bien mais nos ancêtres, quand ils végétaient se sont organisés pour émigrer, au risque de perdre leur langue, comme déménager avec toute la famille au Manitoba et dans les usines de coton de la Nouvelle-Angleterre. « Sonta pas fous » ou en bon français « Ils n’étaient pas bêtes en plaçant le bien-être de leur famille avant la langue en danger ». Faut avoir du manger à se mettre sur la langue…genre.
@ M. Sauvé
Le problème démographique du français sur l’île de Mtl pourrait facilement être réglé en décourageant l’étalement urbain et en faisant payer aux banlieusards le vrai coût de cet étalement. Au lieu de construire des bungalows de plus en plus loin, avec les coûts inhérents sur les infrastructures et l’environnement, on pourrait inciter le renouveau urbain et stopper l’exode des jeunes familles .
Le 450 a beaucoup de poids politique et le lobby du bungalow beau bon pas cher pèse lourd. Entretemps, nos politiciens veulent s’attaquer au problème avec des mesures ridicules sans aucune chance de réussite. Exemple, la francisation des PMEs avec moins de 50 employés. Un remède de cheval, un monstre bureaucratique déconnectée de la vraie vie mais qui semble plaire aux « intellectuels à pipe » bien pensants.