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Jean Charest a-t-il perdu le Nord?

 

Tout au moins, on dirait bien qu'il ait perdu son fameux Plan Nord … métamorphosé aujourd'hui en «démarche nouveau genre» découlant d'un «nouveau paradigme» où «ce n'est pas le gouvernement qui dicte la façon de faire, mais où il se transforme en partenaire».

Bravo pour la magnifique démonstration de novlangue…

http://www.ledevoir.com/2009/10/14/271554.html

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Quoiqu'il était évident lors de la présentation «multimédia» faite par le premier ministre le 28 septembre 2008, que les Québécois assistaient surtout à ce qu'on appelle de la politique-spectacle – une performance donnée pour ce Plan Nord avec une belle, grosse poignée de poudre de Perlimpinpin!

Notez, en passant, que ce spectacle avait été donné sous un gouvernement minoritaire en constante campagne pré-électorale de séduction, multipliant les annonces, optimiste au maximum, ne voyant venir ni récession, ni déficit, ni pertes à la Caisse de dépôt et placement…

Le premier ministre allait d'ailleurs déclencher des élections générales le 5 novembre suivant, soit à peine cinq petites semaines après…

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On se souviendra aussi que le 23 mai 2009, son nouveau gouvernement majoritaire et son Plan Nord sous le bras, Jean Charest s'auto-proclamait «grand bâtisseur» du Québec lors d'un conseil général du PLQ dont le thème était justement le développement énergétique… 

Avouez que cela lui aurait été pas mal plus difficile de se déclarer «grand bâtisseur» avec une simple «démarche» ou un «nouveau paradigme» dans sa besace….

http://www.voir.ca/blogs/jose_legault/archive/2009/05/24/le-sacre-d-un-b-226-tisseur.aspx

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Mais ça, ce n'est en fait que l'aspect game politique. La joute. Le jeu. Les relations publiques. Bref, le contenant et non le contenu.

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Quant au contenu, notez que dans cette histoire de Plan Nord, il y en a d'autres. En fait, chaque histoire politique est comme une poupée russe, avec d'autres histoires à l'intérieur de la plus grande.

Voyons-en seulement deux pour le moment.

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Primo: parlons du poids et de l'influence du lobby des minières dans la région du Nord, de même que de la nomination controversée de Pierre Corbeil comme ministre des Affaires autochtones et ministre responsable de la région du Nord-du-Québec après la dernière élection.

Bref, on ne peut pas parler du Plan Nord en ignorant ces aspects.

Petit rappel à cet effet de ce que rapportait Le Devoir le 19 décembre 2008:

«Pierre Corbeil est de retour par la grande porte, avec la bénédiction du premier ministre Jean Charest, même si ce ministre des Ressources naturelles du premier gouvernement Charest, trois mois après sa défaite en mars 2007, s'était trouvé un emploi de conseiller pour une compagnie minière majeure et un poste au conseil d'administration d'une autre compagnie minière. Ce représentant de l'industrie minière a été nommé hier ministre des Affaires autochtones, au grand dam de l'Association des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL). (…)

La nomination de Pierre Corbeil a été vivement dénoncée par l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL). Son chef, Ghislain Picard, a d'ailleurs prévenu que son organisme allait carrément ignorer le nouveau titulaire du ministère des Affaires autochtones. (…)

Il (Picard) critique également la façon dont les libéraux semblent vouloir guider leur Plan Nord. «On nous parle d'un plan, on nous parle de la nécessité et même de l'obligation d'associer les Premières Nations au processus, mais tout ce qu'on a eu jusqu'à présent, c'est un projet qu'on n'a même pas vu sur papier, a déploré le chef de l'APNQL. En quoi les Premières Nations vont être impliquées? Est-ce que ça va être une vague consultation de ceux qui pourraient être impliqués? On ne sait pas grand-chose.»»

http://www.ledevoir.com/2008/12/19/224068.html

Mais pour comprendre le tout, lire surtout ceci:

http://ruefrontenac.com/nouvelles-generales/politiqueprovinciale/3212-ychartrand-pelure-charest

Dont voici des extraits fort instructifs et quasiment prémonitoires:

«Si les Québécois en viennent à la conclusion que le développement économique de ce nouvel espace se fait sans rien apporter à leur richesse collective mais sert seulement à enrichir les entreprises (minières), Jean Charest pourra dire adieu à un pan majeur de son plan.» (…)

«Depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral en 2003, le nombre de titres d'exploration actifs a littéralement explosé, passant de 150 000 à presque 300 000, surtout concentré dans le Grand Nord québécois. La superficie du territoire grevée par ces titres a atteint en 2007 quelque 11 millions d'hectares, soit l'équivalant de 220 fois la superficie de l'île de Montréal. Comme dirait Jean Perron, c'est toute une patinoire pour les joueurs de l'industrie minière…» (…)

La philosophie de développement minier que prônent officieusement les libéraux n'est pas sans rappeler – en pire – celle qui avait eu cours pour l'exploitation forestière au milieu des années 1990. Pour maintenir l'emploi en régions éloignées, les péquistes avaient permis une croissance éhontée des coupes de bois dans les forêts publiques du Québec, une surexploitation dénoncée sans détour par la commission Coulombe en 2004. Cela revenait à instaurer une forme d'aide sociale sans en porter le nom.»

Et, en passant, le projet de mine à ciel ouvert à Malartic, ça vous dit aussi quelque chose? Et, côté hydro-électrique, le barrage de la Romaine?

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Secundo: Si ce que l'Opposition officielle avançait aujourd'hui dans un communiqué est fondé, ce n'est pas le travail constructif non plus qui manquerait au gouvernement au nord du Québec…

«Le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations avec les Premières Nations, Camil Bouchard, sonne l'alarme et demande l'intervention urgente du premier ministre du Québec, Jean Charest, afin de remédier dès maintenant aux conditions de vie inacceptables des 400 citoyens de Kitcisakik, près de Val d'Or. Ces femmes, hommes et enfants passeront vraisemblablement un autre hiver sans eau potable, sans électricité et sans toilettes attenantes, dans des maisons mal isolées, surchauffées et toxiques parce que le ministre responsable des Affaires autochtones, Pierre Corbeil, fait preuve d'indolence et d'irresponsabilité.

«Le gouvernement libéral est irresponsable. Son inaction envers cette communauté aura rendu nécessaire l'intervention d'une ONG internationale, Architectes de l'urgence, présente dans plusieurs pays du tiers-monde. Quand c'est une ONG des pays du tiers-monde qui fait le travail du ministre, il faut se questionner sur le rôle du ministre et son sens des responsabilités (….)»