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Les années Bouchard

 

Ce soir, à l'émission Les années Derome sur les ondes de Radio-Canada, Lucien Bouchard a donné une rare entrevue où il abordait le «côté» politique de sa longue carrière d'avocat.

La période «Mulroney, puis la période «Bloc». Et, enfin, la période «référendum 1995». Mais très peu. en fait presque rien sur la période «premier ministre et chef du PQ», même si elle a duré cinq ans et a profondément transformé le PQ de l'intérieur et ce, à tous les niveaux…

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Mais tout de même, pour ceux et celles qui se posent encore LA question existentielle, à savoir si Monsieur Bouchard est «encore» souverainiste, cette réponse indirecte ce soir sous forme d'affirmation en disait pas mal long: «Je pense encore que Meech, c'était la solution. À l'époque là, je pense que c'était la solution.»

Pas «j'ai déjà pensé que Meech était la solution», mais plutôt «je pense encore que Meech, c'était la solution».

(En passant, l'ancien premier ministre, comme tout autre citoyen, est tout à fait libre de croire en ce qu'il veut. S'il n'est pas ou plus souverainiste, cela n'a aujourd'hui aucune importance. Cela relève de ses convictions personnelles. Ce qui compte, par contre, c'est de tenter de comprendre ce qu'il croyait et les gestes qu'il posait alors qu'il était en politique active.)

Ou encore ceci, lorsqu'il se rappelait de ce qui s'est passé après l'échec de Meech: «cela m'a confirmé (…) à quel point on avait raison, que Meech, c'était la solution (…). Pas la «souveraineté». Pas encore. Même après l'échec de Meech.

Quant à la défaite du 30 octobre 1995, les remarques de Monsieur Bouchard étaient tout aussi fascinantes. Sa réaction? Qu'il «faut dire: la population a décidé.» Comme, disait-il, René Lévesque l'avait fait en 1980. Bref, M. Bouchard n'achète pas du tout la thèse du «référendum volé» de 1995. Même si celui de 1980 avait été perdu clairement avec 40% des voix, alors que celui de 1995 avait été perdu par quelques dizaines de milliers de voix et des dépenses somptuaires, entre autres choses, faites par Ottawa.

Sur le sujet de cette fameuse question «existentielle» concernant M. Bouchard et de sa réponse indirecte de ce soir, à l'effet que Meech était LA solution, voici d'ailleurs ce que j'en écrivais dans The Gazette, en décembre 2004, dans une chronique intitulée «Lucien Bouchard haunts us still»:

«(…) As reported at the time in the Globe and Mail and brought up this year in Pierre Duchesne's third volume on Jacques Parizeau, there was a period when Bouchard thought of creating a third party (on the Quebec provincial front). From the time Meech faltered in the late 1980s to the early 1990s – even as Bouchard would build the Bloc Quebecois more as a nationalist coalition than a sovereignist party – he saw Parizeau as too hard- line and thought Robert Bourassa incapable of satisfying his soft nationalists who were in disarray.

Bouchard believed that a more middle-ground, provincial party could unite soft Liberal and PQ nationalists. As he joined the Belanger-Campeau commission – tellingly not as a sovereignist but as "nonaligned" – he approached Claude Beland, then president of Desjardins, to create this new party.

But post-Meech Lake Accord politics became rapidly polarized and the nationalist Bouchard became stuck in the sovereignist camp as this option was now the only alternative to the status quo and was supported by more than 60 percent of Quebecers.

Although he put on his Captain Sovereignty costume throughout the referendum campaign in 1995, he spent the previous months trying to water down and slow Parizeau's vision and strategy. When he succeeded Parizeau, Bouchard was in a position to impose his own watering down as leader and forego any promotion or action on sovereignty.

The fact is that Bouchard always was a traditional nationalist, who would gladly strike a more autonomist deal within Canada. Bouchard was and remains a Meech kind of a guy. Hence the war that's placed him against Parizeau's separatist vision for years.

In a 2002 documentary on the failure of Meech, Bouchard expressed the kind of heartfelt nostalgia no separatist would ever feel: "If Meech had passed, it would have been a great moment in the history of Canada and Brian Mulroney's name would have been associated with one of Canada's greatest successes." (…)»

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*** Vendredi après-midi, j'ajouterai une citation récente venant d'un autre acteur politique de l'époque, laquelle ajoute un argument de plus soutenant l'hypothèse voulant que M. Bouchard, même en 1995, et même si sa contribution à la campagne référendaire fut majeure, aurait été encore plutôt de l'école confédérationniste qu'indépendantiste. Surtout dans l'éventualité d'une victoire serrée du Oui…

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