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Quand Lucien sort, il sort!

 

«Diantre!», comme dirait Yves Michaud, on n'aura même pas eu le temps de s'ennuyer…

«Quelques jours après sa sortie contre le PQ, Lucien Bouchard reprend la parole pour réclamer un dégel des droits de scolarité à l'université.

Aux côtés de 16 personnalités – dont Joseph Facal et Monique Jérôme-Forget, Lucien Bouchard demande en contrepartie des programmes de soutien à l'accès aux études et l'engagement du gouvernement à maintenir son niveau de financement des universités. «Le Québec a mal à ses universités. Le mal n'est pas incurable, le rhume est chronique», a déclaré Lucien Bouchard.Plus de détails à venir.»

Voir: http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/education/201002/23/01-954450-lucien-bouchard-reclame-un-degel-des-droits-de-scolarite.php

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Entendu Benoît Dutrizac poser cette question fort pertinente sur les ondes de 98.5 FM, à savoir si on réviserait aussi, mais à la baisse, les salaires impressionnants des doyens et de la brochette de cadres qui peuplent nos universités? Question de contribuer, eux aussi, à l'assainissement des finances publiques qu'ils disent tant souhaiter en autant, bien entendu, que ça ne touche que la classe moyenne, les travailleurs à petits salaires, les étudiants, etc., mais pas eux.

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Eh bien. Tenez donc. Sans surprise aucune, la Commission des jeunes de l'ADQ vient tout juste d'émettre un communiqué de presse exprimant son «enthousiasme» face à cette dernière proposition de M. Bouchard & cie, qu'il voit évidemment comme leur apportant une «caution morale»…

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Et pour ceux et celles désirant entendre également un point de vue différent du discours des Lucides, le collectif d'économistes «Économie autrement» tiendra une rencontre spéciale sur les finances publiques ce mercredi, 24 février, 19h00, au 1212 rue Panet à Montréal.

Voir: http://www.economieautrement.org/ (cliquez sur «événements»)

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Maintenant, pour ce qui est du fond de la question de la hausse des frais de scolarité, quelques observations:

– La proposition de M. Bouchard & cie peut sembler à certains intéressante à première vue. Ainsi, les universités deviendraient maîtresses de leur propre grille tarifaire, si on peut dire. Quoique le coup récent de McGill – facturant en toute impunité face au ministère de l'Éducation, des frais scandaleusement élevés de plus de 30 000$ pour leur MBA -, démontre que dans les faits, Québec est parfaitement capable de verser dans le laissez-faire le plus total.

– Ce groupe propose aussi, entre autres choses, de moduler les frais de scolarité selon la spécialité. Ex: des cours en histoire ou en science politique coûteraient beaucoup moins en frais de scolarité que des cours en médecine, en droit ou je ne sais quelle autre profession non seulement plus lucrative, mais aussi, par hasard, dont le pouvoir d'influence dans la société est nettement supérieur à la moyenne.

– Bien sûr, on augmenterait les sommes réservées aux bourses aux étudiants «moins fortunés»… Mais comme on peut soupçonner que les revenus pour se qualifier à de telles bourses seraient tellement bas dans les faits, que ces bourses pour les plus «pauvres», comme c'est le cas dans de nombreux États où les frais de cours sont élevés, risqueraient d'échapper à de nombreux enfants de classe moyenne qui, aux prises avec des frais nettement majorés, se trouveraient ainsi incapables d'étudier dans certains disciplines devenues plus «dispendieuses».

Conclusion: le risque est ici de recréer un système où les fils de familles mieux nanties – et aujourdhui, les filles aussi -, auraient de meilleurs chances et moyens de poursuivre des études en médecine et en droit, entre autres.

Et ce n'est pas parce qu'une fois terminées leurs études, on les laisserait rembourser leur plus grosse dette selon leurs revenus que cela changerait quoi que ce soit au fait très fondamental suivant: lorsqu'on est aux études et qu'on a moins ou pas assez d'argent pour payer les frais de scolarité LORSQU'ILS SONT DÛS, eh bien, on passe son tour…

Est-ce que quelqu'un dans les hautes sphères de La Belle Province se souvient encore de ce concept que l'on nommait autrefois l'«égalité des chances»?

Et est-ce que quelqu'un, là haut, se souvient encore que cette égalité des chances se doit de passer par une fiscalité plus équitable avant de poser des obstacles à l'accession pour les moins fortunés?

À cette enseigne, une déclaration récente et étonnante faite au Devoir par le recteur de l'Université Laval, Denis Brière, illustrait parfaitement bien cette amnésie et cet hyper individualisme dont souffrent certains des «patrons» de nos universités, alors qu'il déclarait que même s'il en coûtait 40 000$ par année pour étudier en médecine, il n'aurait aucune diminution dans le nombre d'étudiants…

En effet! La question, par contre, est de savoir de quel milieu socio-économique ces étudiants devraient-ils provenir pour avoir les moyens de couvrir de tels frais?

Et puis, dans les faits, qu'en est-il du sous-financement des universités, soit de ce plus ou moins 500$ millions qui leur manque?

Eh bien, ce 500$ millions, c'est en fait la valeur annuelle, et donc récurrente pour le Québec, d'un seul demi-point à peine de TPS (***).

D'où l'urgence de récupérer les points laissés vacants par Ottawa.

Et d'où l'erreur de ne pas l'avoir fait jusqu'ici.

Donc, nul besoin de risquer de restreindre l'accès à certaines spécialités pour des étudiants de classe moyenne ou moins fortunés au nom de la récupération de ces 500$ millions.

(***) La taxe de vente, contrairement aux tarifs, est une mesure progressive et non régressive, puisqu'elle touche la consommation de biens privés, et non publics, et suit donc la capacité de dépenser des particuliers….

Rappelons aussi que nos universités sont en général excellentes, puisque les étudiants d'ici sont facilement admis aux cycles supérieurs des meilleurs universités du monde.

Et maintenant, pour les questions qui tuent.

– Sait-on que beaucoup d'entreprises choisissent de s'établir au Canada plutôt qu'aux États-Unis parce que les frais médicaux et les frais de scolarité sont moins élevés que chez-eux?

– Sait-on que les coûts du système américain d'éducation sont tels que ce dernier ne parvient pas à générer suffisamment d'étudiants pour les cycles supérieurs?

– Et qu'en est-il de la gestion de nos universités ?

– Pourquoi y a-t-il autant de cadres et d'administrateurs? Pourquoi sont-ils souvent mieux payés que les professeurs, et encore bien plus que les chargés de cours? Et ce, souvent à formation égale et parfois même, à formation moindre?

Etc., etc., etc….

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@ Photo: Mathieu Bélanger, Reuters