BloguesVoix publique

«Diversion» ou démagogie?

 

La tactique manque certes d'un minimum de sens de la mesure, mais la plupart des citoyens n'en seront probablement pas dupes.

Ainsi, ce matin, en période de questions spécialement convoquée pour imposer le bâillon permettant l'adoption d'une loi permettant à des parents francophones et allophones, en passant par des écoles anglaises privées non subventionnées dites «passerelles», d'acheter ensuite pour leurs enfants le droit constitutionnel à l'école anglaise publique ou privée subventionnée, Pauline Marois a accusé Jean Charest de faire «diversion» en tentant d'associer le PQ à des groupes «radicaux» et «prônant», selon lui, «la violence».

Le PM se basait sur cet article paru dans La Presse de ce matin sur une campagne d'affichage présumément «virulente» contre le PLQ, laquelle serait menée par un «ancien felquiste»:

http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/politique-quebecoise/201010/18/01-4333458-campagne-daffichage-virulente-contre-les-liberaux.php

Et que diraient ces «affiches» «virulentes»? Selon La Presse: «L'inscription «Votre député a voté contre une enquête sur la CORRUPTION LIBÉRALE» coiffe la photo de l'élu, suivie de: «Il est complice du système. Exigez sa DÉMISSION.»

Ah bon? Exiger la «démission» d'un député, que ce soit à tort ou à raison, serait-il donc devenu un geste «radical» ou, pis encore, incitant à la «violence»?

Nonobstant qui serait en fait le ou les auteurs du libellé, sur le fond de la question, qu'aurait de si «violent» cette formulation? On peut certainement être pour, ou on peut être contre, mais en démocratie, une telle formule n'incite aucunement à la violence.

Est-ce même là une campagne «virulente» comme le titrait La Presse? Pas vraiment si, au fil des ans, on a le moindrement observé de nombreuses affiches politiques usant de termes beaucoup plus durs et émanant de la société civile (et même de partis politiques), que ce soit aux États-Unis, en France, en Italie, en Grande-Bretagne, etc….

Pour se calmer, se souvenir de la saga juridique sur le terme «traîtres»:   

     

  @ La fameuse affiche de la SSJB du 4 déc. 1981

À cette enseigne, peut-être bien que le premier ministre, lequel s'évertue à tenter d'associer le PQ à des groupes «prônant la violence» plutôt que de débattre du fond de la question des écoles anglaises dites «passerelles», devrait lire ce résumé d'une saga juridique devenue légendaire dans l'histoire récente du Canada et du Québec.

Cette saga était celle de députés libéraux fédéraux qui, outrés, avaient poursuivi la SSJB de Montréal pour avoir acheté une pleine page de publicité dans Le Devoir du 4 décembre 1981, laquelle qualifiait de «traîtres!» les députés fédéraux du Québec qui avaient voté en faveur de ce qui deviendrait plus tard le rapatriement unilatéral de la constitution canadienne sans l'aval du Québec.

http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/297788/quelques-traitres-mots

Cette lecture, si elle est faite par tout le monde à tête reposée, devrait normalement remettre les choses en perspective…

Et donc, peut-être, peut-être, permettre de revenir à la vraie question à laquelle devrait plutôt répondre le gouvernement: pourquoi créer un précédent au Canada légalisant le «droit» de parents d'acheter à leurs enfants le «droit constitutionnel» de s'inscrire, ainsi que tous leurs frères, soeurs et descendants, à une école publique ou privée subventionnée donnant son enseignement dans la langue de la minorité linguistique? Ou, dans le cas qui nous occupe: au Québec et pour les écoles anglaises.

http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/politique-quebecoise/201010/18/01-4333573-quebec-va-forcer-ladoption-du-projet-de-loi-103.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B4_manchettes_231_accueil_POS3

**********************************************

Voici d'ailleurs aussi une première réaction sur le site Vigile.net (identifié aussi par le PM comme un groupe «radical» /sic/): http://www.vigile.net/Affichez-votre-ecoeurement-n-est

*********************************************

Quant à l'amalgame que tente de faire le premier ministre entre PQ et violence, cela constitue malheureusement moins de la «diversion» que de la démagogie… À moins que ce ne soit tout simplement les deux…

À espérer donc que le gouvernement reviendra très bientôt au VRAI débat.