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Amphithéâtre et dommages collatéraux…

 

On dirait bien que cette histoire d'un amphithéâtre payé par les fonds publics, d'un club de hockey espéré par les gens de Québec et d'une entente sur sa gestion venue gâter la sauce pour cause de manque de transparence, est loin d'être terminée.

Dans la liste de ses dommages politiques collatéraux, il faudra également inscrire ce que Le Devoir rapportait à sa une du 4 juin. Soit que «le caucus du Parti québécois risque l'implosion en raison de la volonté de la chef Pauline Marois d'imposer une ligne de parti en vue de l'adoption du projet de loi sur l'amphithéâtre Labeaume-Péladeau. Au moins quatre députés péquistes sont toujours résolument contre le projet de la loi 204, dont Louise Beaudoin, qui songe à démissionner à cause de sa dissension.»  Pour lire la suite: http://www.ledevoir.com/politique/quebec/324818/amphitheatre-de-quebec-risque-d-implosion-au-pq

En effet, pour le PQ, il ne sera pas sans prix politique ce choix d'appuyer inconditionnellement ce rouleau compresseur mieux connu sous le nom de Régis Labeaume. Et de l'avoir fait en parrainant un projet de loi privé dont l'objectif est de tenter de soustraire l'entente Labeaume-Quebecor aux recours juridiques et à la transparence qui aurait dû présider à l'allocation du dit contrat de gestion.

En cela, le gouvernement Charest et le caucus péquiste sont soudés comme des siamois dans ce dossier.

Or, c'est le second, parce qu'il n'aura pas joué son rôle d'opposition officielle en procédant à une analyse critique du dossier, qui risque d'en payer un prix politique plus élevé.

Autant dans ses propres rangs qu'à terme, dans les intentions de vote. Du moins, à l'extérieur de cette région de Québec dont les précieux votes, semble-t-il, réussissent à faire courber l'échine aux deux principaux partis de l'Assemblée nationale.

Pas de surprise, dans un tel cas, qu'il y ait dissension au sein du caucus péquiste. Il y en a d'ailleurs également au sein dui caucus libéral…

L'empressement du PQ dans ce dossier a attiré à plusieurs de ses députés des courriels et des appels courroucés de leurs propres électeurs et de leurs militants.

Des citoyens et des militants qui ne comprennent pas pourquoi mesdames Marois et Maltais sont en train de scier la branche sur laquelle le PQ s'était installé fort confortablement face au gouvernement charest depuis plus de deux ans déjà.

Cette «branche» étant celle de la défense d'une plus grande éthique et d'un e plus grande transparence dans ce qui touche la gouvernance et la gestion des fonds publics dans les cas d'allocation de contrats publics majeurs.

Pendant ce temps, c'est le député de Québec solidaire, Amir Khadir, et non l'opposition officielle, qui se fait le porte-voix de ce que de nombreux citoyens (incluant des électeurs péquistes) pensent tout bas.

À ce chapitre, l'«effet de contraste» entre la position prise par le député solitaire de Québec solidaire et celle de l'opposition officielle, est saisissant. Et n'est sûrement pas à l'avantage de cette dernière.

Au moment même où une partie des appuis du PQ est déjà menacée par le retour possible de François Legault en politique active dès le début de 2012, voilà que le dépôt et la défense acharnée du projet de loi 204 par la députée Agnès Maltais vient ajouter à cette vulnérabilité et vient même diviser le caucus.

Pour paraphraser l'expression connue de Jacques Parizeau, ça commence drôlement à ressembler à de l'autopeluredebananisation. Autant sur la forme que sur le fond de la question.

Le «fond» de la question étant beaucoup moins ce que fait ou ne fait pas une compagnie dans cette histoire, mais bien ce que font les élus. Ce sont eux qui sont imputables à la population.  

Il semble bien aussi que les attaques virulentes de certains députés péquistes contre Denis de Belleval, un souverainiste de longue date et adversaire acharné du projet de loi privé 204, ne passerait pas non plus la rampe auprès d'une partie de la députation et des militants.

Tout comme, par ailleurs, cette 'attaque aussi ouverte que mal avisée contre Amir Khadir – le seul député souverainiste hors du PQ -, lancée le 20 mai dernier dans les pages du Devoir par le nouveau président du PQ, Raymond Archambault.

D'avoir également acheté cet argument voulant qu'il y ait «urgence» absolue de passer le tout pour le 7 septembre – alors que le gouvernement a dit clairement que le nouveau colisée serait construit avec ou sans club de hockey et que la LNH ne semble pas sur le point d'accorder ce dernier à Québec dans les prochains mois -, en aura aussi laissé plusieurs pantois.  

On entend aussi dans les coulisses que sans engagement clair pour un référendum en vue de la prochaine élection, l'erreur de défendre l'approche rouleau compresseur du maire Labeaume dans ce dossier devient pour certains la proverbiale goutte qui fait déborder le vase.

D'autant plus que ce choix risque aussi de retirer au PQ son «autre» carte de visite pour la prochaine élection: celle d'une gestion des fonds publics transparente et imputable.

Et cette «carte», c'est justement celle qu'Amir Khadir, quant à lui, continue de jouer avec une cohérence nettement plus marquée…

(Une mention spéciale dans ce dossier va également aux deux députés indépendants Éric Caire et Marc Picard.)

Il reste maintenant à voir si Mme Marois saura trouver, imposer ou «négocier» un compromis sur cette question au sein de son caucus.

Or, même si elle venait à réussir à trouver un compromis quelconque, cet épisode du projet de loi privé risque fort de laisser des cicatrices ouvertes au sein même du caucus péquiste, de sa base militante et de ses électeurs. 

Pour une poignée de votes à Québec, le PQ court en effet le danger d'avoir lâché la proie pour l'ombre.

Pour un parti dont la première position dans les sondages est déjà menacée par la venue possible de François Legault et – l'aurait-on déjà oublié -, dont le parti frère au fédéral vient d'être quasiment effacé de la carte, soutenir aussi fortement le maire Labeaume dans un dossier aussi contentieux n'aura définitivement pas été l'idée du siècle.

Surtout pas en pleine année possiblement pré-électorale.

Et si jamais Mme Marois venait cette semaine à ne pas réussir à trouver un compromis acceptable pour son caucus, alors là… 

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Mais encore….

Dans tout ce que l'on aura entendu pendant et après la commission parlementaire de jeudi et vendredi derniers – et ce ne sont pourtant pas les «perles» qui y ont manqué -, un sophisme déguisé en «argument» aura été particulièrement insultant pour l'intelligence.

Cet «argument» fut lancé par le maire Labeaume en scrum, puis repris plus tard, entre autres, par la députée Maltais.

Soit que les interrogations et les critiques du député Khadir sur le projet de loi privé tiendraient à une espèce de détestation de Quebecor et des citoyens de la Ville de Québec…

Cette tentative manichéenne de déformer à ce point des interrogations légitimes dans ce dossier – qu'Amir Khadir est loin d'être le seul à avoir au Québec -, en dépeignant ceux qui les soulèvent comme des «anti-Quebecor» et des «anti-ville-de-Québec», n'a franchement rien de très honorant… 

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(*) Billet mis en ligne à 16h47 – 5 juin 2011.

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