L’opéra d’Engelbert Humperdinck, basé sur le conte des Frères Grimm est présenté ces jours-ci à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des arts.
Cette collaboration entre l’Opéra de Montréal, l’Atelier lyrique de Montréal, l‘École nationale de Théâtre du Canada et, pour la première fois, l’École nationale de cirque (il fallait entendre la fierté de leurs collègues et amis lorsque la présentatrice l’a mentionnée!), nous invite dans un monde féerique où grands et petits s’amusent, assouvissent leur goût de l’aventure et des sucreries, et tentent de faire la part entre le bien et le mal.
Première fréquentation de l’Opéra de Montréal, cette visite à la PDA n’était pourtant pas mon premier contact avec l’opéra. Ma première fois – je fais ma fraîche – eut lieu au Wiener Staatsoper (Opéra de Vienne), en 2005. Bon, j’ai fait la fameuse « file des pauvres », où on attend à côté d’une petite porte extérieure, pour ne payer qu’un maigre 5 euros pour avoir le droit d’assister, du haut du balcon, debout, à un superbe opéra, La Traviata, dans ce cas-là. C’était magique.
Bref, l’opéra, un genre parfois poussiéreux, mais qui tente de séduire un nouveau public, ces jours-ci, m’a conquise, hier soir. On le voyait bien, jeudi soir, dans le hall de la salle Wilfrid-Pelletier : têtes grisonnantes aux vestons chic et talons hauts, côtoyaient hoodies et skinny jeans. Mélange intéressant des publics. Ces derniers s’étaient réunis, bien sûr, pour ce classique de jeunesse international qu’ont fréquenté tous les enfants ou presque. La maison en pain d’épice est un classique. La sorcière fait aussi peur que la Fée de la rosée est charmante. Notre imaginaire est sollicité d’un bout à l’autre des deux heures et cinq minutes que les étudiants de l’Atelier lyrique, de l’École nationale de théâtre et de l’École nationale de cirque ont su meubler.
Si l’apport des acrobates de l’École nationale de cirque (dirigés par Veronica Melis) était franchement réussi, leurs courtes présences auraient pu être bonifiées de quelques ajouts. On les retrouve uniquement à deux reprises, lorsque les enfants s’endorment dans la forêt et lorsque ceux-ci sont prisonniers de la sorcière. Pourtant, les voir s’amener lors de l’expédition des enfants en forêt, alors qu’ils mentionnent eux-mêmes voir des ombres louches, des visages, etc., m’aurait semblé justifié. Bref, j’aurais bien aimé les voir surgir plus souvent, pour agrémenter la mise en scène déjà judicieusement ludique de Hugo Bélanger.
Hänsel (Emma Char) et Gretel (Frédérique Drolet) profitent d’une belle complicité, autant dans leur jeu que dans la juxtaposition de leurs voix, frénétiques et coquines, propres à l’enfance. Petite longueur dans le passage des parents, Gertrud (France Bellemare) et Peter (Cairan Ryan), alors qu’on chante le bonheur des victuailles enfin disponibles. Par contre, les jeux d’ombres et de lumières auxquels ils se prêtent apportent une toute autre dimension à l’histoire. On reconnaît là le talent de Bélanger dans le spectacle jeunesse. Ces projections dans le futur de la sorcière qui avale les enfants et de ceux-ci transformés en pains d’épice et emprisonnés dans la maison de la sorcière sont franchement réussies. On pardonne alors le morceaux chanté par le père qui rappelle drôlement la pièce culte de Mr. Trololo lui-même.
La sorcière incarnée par Rachèle Tremblay est délicieusement diabolique et grandiose par sa présence et son accoutrement signé Naomi Fontaine. La Fée rosée et le Marchand de sable joués par Florie Valiquette sont, quant à eux, tout simplement magiques. Les effets visuels du soleil levant, de la fin de la nuit ou de la venue des étoiles qui s’accrochent dans le ciel sont tout simplement magnifiques et ont réussi à donner l’envie de chanter tous nos faits et gestes. J’en aurais définitivement pris plus.
Je m’en voudrais d’oublier de mentionner les décors conçus par Odile Gamache. Rappelant les pages du conte des Frères Grimm, ils surgissent, encadrent, s’élèvent au rythme du texte et des péripéties des enfants, et sont judicieusement jumelés aux éclairages conçus par Julie Basse et aux accessoires – qui semblent fort savoureux, côté bonbons – d’Alain Jenkins.
En ajoutant au tout la participation de l’Orchestre Métropolitain bien installé dans la fosse et de son Chef Alain Trudel qui font un travail remarquable et l’arrivée, en fin de parcours, des choristes du projet coOpéra, cette soirée était aussi réussie que A Night At The Opera, de Queen.
Ne reste qu’une seule représentation pour Hänsel et Gretel, à la salle Wilfrid-Pelletier, ce samedi 29 mars.