Pour la première fois, je démarrais mon parcours à POP Montréal avec une incursion du côté de Film POP, qui présentait hier soir, en collaboration avec le Festival du nouveau cinéma, le long métrage d’Alex Ross Perry, Listen Up Philip, à l’Université Concordia.
Celui qui nous a précédemment donné The Color Wheel et Impolex, revient cette fois-ci derrière la caméra avec un film qui plonge dans l’univers d’un écrivain désagréable, arrogant, imbu de lui-même et mesquin, Philip Lewis Friedman, joué brillamment par Jason Schwartzman.
Ici, Schwartzman se rapproche de son personnage d’écrivain-détective dans l’émission Bored To Death, mais loin d’obtenir notre pitié ou empathie, Friedman évoque plutôt le côté très laid de l’artiste, de l’écrivain à succès qui attend la publication de son deuxième roman.
Friedman se lie d’amitié avec son idole d’écriture, un écrivain plus âgé, Ike Zimmerman (Jonathan Pryce), qui le prend sous son aile mais qui finira surtout par déverser tout son fiel et malheur sur le jeune loup qui arrive à grands pas avec son égocentrisme démesuré et sa plume qui plaît. Les deux comparses se rendront à la maison de campagne de Zimmerman, où la fille de ce dernier (Krysten Ritter) passe le plus clair de son temps, constant rappel au père qu’il a détruit sa famille.
Tourné caméra à l’épaule, Listen Up Philip favorise les plans rapprochés, où chaque détail est épié, chaque verre bu décortiqué, chaque regard triste, doux ou méchant, analysé. Peut-être un peu trop, même, alors que le film a tendance à parfois s’essouffler dans les longueurs, malgré une trame narrative bien ficelée.
À noter que la performance d’Elisabeth Moss (Mad Men) qui endosse le rôle ingrat de la copine/ex-copine de Friedman, est carrément soufflante. Tout est dans les yeux, chez cette actrice, et la réalisation d’Alex Ross Perry lui rend justice.
Rappelant les films « indé » des Noah Baumbach (plus proche du Greenberg que du Frances Ha, certainement) et autres réalisateurs newyorkais, Listen Up Philip penche cependant plutôt du côté de ce qu’on ne veut pas voir chez certains écrivains d’une nouvelle génération : l’égoïsme, l’arrogance, le culte de soi.
Enveloppé d’une trame sonore jazz, Listen Up Philip rappelle aussi l’incontinence verbale de Woody Allen, le rythme rapide de ses longs métrages et son côté grave, du protagoniste traumatisé.
Certainement un film qui s’impose et qui bouscule, à revoir, car le réalisateur Alex Ross Perry laisse sa marque, dans le cinéma indépendant des États-Unis, mais aussi dans l’image du personnage de l’écrivain, brisée, tordue par une performance magistrale de Jason Schwartzman.
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