En ce jour du Souvenir, le 11 novembre, ce jour militaire, ces jours où vandaliser un monument commémoratif de guerre pourrait devenir passible de prison[1], ces jours où le Bien se fait en Afghanistan, en quadrillant des villages de montagne M-16 au bras, ces jours où, en somme, la Guerre c’est la Paix, un groupe de consoeurs a décidé d’utiliser un humour libérateur et cathartique pour se plonger dans une étude tous azimuts des médailles militaires.
En somme, elles ont décidé de pratiquer la phaléristique, cet art renouvelé de la décoration, de l’ordre et de l’insigne, du rituel politique, de l’objet brillant investi de sens et de valeur(s), récompensant, sous le couvert de la Vertu, des sacrifices proférés dans un (très souvent) glorieux univers de sens machiste. L’ordre social se refonde sans cesse sur la violence fondatrice, disait le sociologue René Girard…
Mais que font concrètement les Délicates Attentions, qui sacrifieront à l’encan virtuel, jour après jour à partir de demain, de bien réelles médailles siliconées, dans le cadre du festival HTMlles, festival féministe d’arts médiatiques et de culture numérique ?
On a fait une entrevue pour le savoir.
Elles veulent d’abord détourner l’usage usuel des médailles, en rendant plus saillante que jamais la présence ambigüe des qualités bien militaires de l’abnégation, du courage ou de la bravoure dans les rapports intimes entre les genres, au quotidien, here and now. Les services invisibles, le care, les tâches ménagères, le soin aux mourants, le soin aux malades tenus dans l’ombre, alors que les fusils sont sous les projecteurs.
Les luttes pour l’égalité, qui pourtant tentent de créer des espaces de liberté agrandis pour « toi » et « moi », pour des subjectivités multiples, se butent souvent à des check-points.
Oui, les hommes résistent, prétendent s’être « faits déclarer la guerre », refusent le déplacement, la remise en question. Pourquoi ?
L’heure est aux solidarités entre consoeurs, et c’est ce que les Délicates Attentions tentent de créer cette semaine en posant des actions qui font rire et qui donnent de l’énergie dans la longue marche vers l’égalité, disent-elles…Dans les réseaux sociaux, les femmes seront invitées à formuler les situations dans lesquelles ces médailles-là pourraient être données. Il faut oser, redisent-elles, « utiliser ces médailles-là pour s’outiller ». L’humour noir est « celui qui sauve », qui crée de la solidarité.
Les médailles délicates du Sacrifice, de l’Ancienneté, de la Jarretière, de Victoria et de l’Aspirant seront tirées aux enchères, faut-il le rappeler. Pour les mirer ou les désirer, il suffit de visiter ce site : http://www.veux-tu-une-medaille.net/ ou celui-ci https://www.facebook.com/pages/Veux-tu-une-m%C3%A9daille/371688292913178?ref=hl.
« Leurs hochets, finalement, sont tordus comme les vrais, c’est donc avec dérision qu’ils souligneront plutôt les traits outrageux, de qui les mérite, les rendant outranciers »
Veux-tu une médaille ?
Ceci résonne bigrement avec la grève du care, du soin, des services invisibles qui aura lieu pendant la grève générale en Espagne ce 14 novembre. Plus de services féminins pendant une journée. Plus de torchage dans l’ombre.
[1] http://www.lapresse.ca/le-soleil/actualites/justice-et-faits-divers/201211/10/01-4592553-vandalisme-sur-des-monuments-de-guerre-un-crime-passible-de-prison.php
après vous avoir lu, je me félicite de pas avoir de médecin,de famille ou de salle d’urgence. Une santé d’enfer, dans un corps consentant, voilà qui m’éloigne des docteurs, y compris les ceusses des Sciences Humaines.
je me méfie de la médecine à l’acte, où on cherche à la va-vite des parties vandalisées de nos corps mis à nu. Un docteur pressé pourrait y confondre une ride durement gagnée avec une cicatrice de guerre. Et moi, assez vulnérable, je serais porté à prendre ses pilules pour des médailles de bravoure existentielle…