Anabelle Nicoud signe un très bon texte dans La Presse d'aujourd'hui intitulé "Dans le nouveau courant du cinéma", qui s'attarde spécifiquement à Rafaël Ouellet et son film Le Cèdre penché, qui a pris l'affiche hier (enfin!). Mais c'est le passage justifiant le titre de l'article qui m'a le plus intéressé:
Rafaël Ouellet associe aussi à son émergence au cinéma à celle d'amis
de longue date, Stéphane Lafleur (Continental), Simon Lavoie (Le
déserteur) ou Maxime Giroux (Tellement les rues sont longues). "Je n'ai
pas la prétention de dire qu'on est une nouvelle vague, mais j'aimerais
que les gens voient un mini-courant. Qu'on voie des jeunes trentenaires
qui arrivent avec quelque chose d'un peu frais. J'aimerais que cela
nous aide", dit-il.
Ça m'a rappellé quelque chose que m'avait confié Yves Christian Fournier lors d'une entrevue à l'occasion de la sortie en salle de Tout est parfait:
"C'est tellement un milieu en ébullition en ce moment, s'exclame Fournier. J'ai un ami, Maxime Giroux, qui trippe sur Bruno Dumont, puis il y a Robin Aubert, avec qui j'ai fait la Course, Stéphane Lafleur, Simon Lavoie, Rafaël Ouellet, et d'autre monde que j'estime beaucoup. J'aime beaucoup Philippe Falardeau aussi, parce que je pense qu'il prend une place de leader… Mon rêve, c'est de pouvoir faire partie d'une époque d'or du cinéma québécois, qu'il y ait une synergie entre les réalisateurs, comme à l'époque de Gilles Groulx."
Qu'en pensez-vous? Ne trouvez vous pas que les cinéastes de la génération KINO/Prends ça court!/Course destination monde apportent un vent de renouveau au cinéma québécois?
Perso, je me suis toujours méfié des dénominations, de la catégorisation et de la récupération.
De tout temps, des cinéastes et artistes de toutes les disciplines ont eu et auront des choses à dire en toute liberté; ce n’est que le fruit du « hasard » si certains se conjuguent. Mais comme je ne crois plus au hasard, il est vrai qu’il existe en ce moment une « réappropriation » du médium cinéma au Québec.
C’est tant mieux dans la mesure où ces films d’auteur sont vus par le plus vaste public possible, sans être boudés par un ou des médias/institutions.
L’industrie du cinéma reste tout de même un monde « Dog eat Dog » mondial sauvage où seuls de véritables talents passionnés peuvent « espérer », sans s’illusionner. Le Québec n’est qu’un petit village, l’art véritable traverse les frontières. Ça prend tellement de monde et d’argent pour faire un film, que veut, veut pas, l’économique prend rapidement le dessus sur l’artistique à moins d’un capitaine vraiment têtu à la barre du navire.
Il y a quant à moi ni plus ni moins de talent qu’avant, mais la venue du numérique a donné accès aux prétentions diverses. C’est au public cinéphile de juger de la valeur véritable des oeuvres présentées, et non aux médias et institutions/critiques diverses, qui peuvent servir de guides dans le meilleur des cas, mais qui plus souvent qu’autrement servent des intérêts autres que l’art proprement dit.
Je crois que la situation actuelle en Amérique du Nord favorise la résurgence des conditions qui ont amené la Nouvelle Vague et le cinéma direct dans les années 50-60. Déjà, aux États-Unis, les excès des studios hollywoodiens et le rejet du cinéma indépendant à la façon Sundance ont donné naissance à la cohorte de cinéastes dits « mumblecore ». Au Québec, c’est l’attention croissante au succès au box-office et les enveloppes à la performance des institutions gouvernementales qui encouragent une attitude DIY chez certains réalisateurs. De plus, les possibilités technologiques de la vidéo numérique, d’une part, mais aussi du développement d’Internet et de la généralisation de la haute vitesse créent un réseau parallèle de production, mais surtout de diffusion des oeuvres. Je suis très content de voir cette tendance s’installer au Québec. Non pas que le cinéma québécois « officiel » soit insatisfaisant, mais un cinéma alternatif de nature plus cinéphilique est toujours bienvenue.