Saxi s'en va : Saxi s'en vade Robert G. Girardin
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Saxi s’en va : Saxi s’en vade Robert G. Girardin

Les auteurs d’aphorismes et de textes très courts ne sont pas légion: il n’est pas donné à tout le monde d’avoir en quelques lignes une histoire personnelle significative à raconter. A ce titre, Robert G. Girardin, ancien journaliste, professeur de linguistique, fait un peu exception. Son cinquième livre, Saxi s’en va, est le dernier volet d’une trilogie commencée en 1992 avec Ainsi vu, poursuivie en 1995 avec Saxi et les autres. Saxi étant un personnage d’écrivain-philosophe qui doit ressembler quelque peu à son auteur. Avec humour, parfois ironique, parfois désespéré, il regarde le monde, commente, fait des liens, témoigne.

Le recueil est composé de trois parties, dont la première compte pas moins de quatre-vingt-quinze \Histoires courtes et histoires plus courtes. Cela va de trois lignes à une page et demie. Il y a là des anecdotes de tous les styles, à propos de tout. Histoires de guerre ou d’amour, de langue ou d’art, tirées de la grande Histoire ou du quotidien, d’hier ou d’aujourd’hui, comme celle-ci, joliment tournée: «L’urgence était bondée de gens allant et venant. Gesticulant et discutant. Fumant et blaguant. Au milieu d’un personnel médical angoissé, affairé, exténué. Le soir venu, son service terminé, l’urgentologue se demandait s’il devait se rendre chez lui ou à l’urgence la plus proche de son hôpital.»

La seconde partie, intitulée Le Sablier – aphorismes et réflexions, débute avec une citation de Cioran sur le temps, source d’angoisse existentielle qui marque l’ensemble des pensées de Robert G. Girardin: «Saxi ne voyait qu’égalité chez ses semblables. Chaque jour, il les voyait décliner, souffrir et mourir»; «Nous naissons tous avec le même handicap. La durée»; «La mort est le seul événement prévu que nous ne pouvons pas prévoir». La concision atteint parfois la force d’un haïku: «Garder la dignité de l’oiseau face à tout vent». L’inutilité de certains gestes, les petites et grandes bassesses des hommes, la relativité de toute chose font le terreau de la créativité de l’écrivain, et le plaisir du lecteur.

La troisième et dernière partie, Histoires aussi courtes que vraies, bien différente, est entièrement consacrée à la mémoire de l’éditeur et ami Gaston Miron, que Robert G. Girardin a côtoyé pendant de longues années. Des moments émouvants, où il est question de poésie et de pays à faire. Y figure une lettre de Miron, datée de 1985, où l’écrivain-militant s’exprime sur son impasse dans l’écriture, sur l’action politique qui le mobilise, sur son angoisse face à l’avenir et sa foi dans les jeunes. Une conclusion pleine d’espoir. Éd. de la Pleine lune, 1998, 176 p.