Dans un style dénudé, sans le moindre fard, comme son propos, MAXIME-OLIVIER MOUTIER confie l’histoire vraie de sa folie, de son internement chez les fous, de son amour et de son désamour.
Une fois sur deux, Maxime-Olivier Moutier se demande s’il a bien fait de publier ce roman. Marie-Hélène au mois de mars, troisième livre du jeune écrivain, arbore comme un défi la mention «roman d’amour» – ce qu’il est, absolument, même s’il montre surtout les zones dantesques qui s’étalent à l’envers de l’amour.
Sherbrooke, mars 1995. Pour Maxime-Olivier, alors étudiant à l’université, ce n’est pas le mois des premiers symptômes de la fièvre du printemps. Fièvre il y a, pourtant, soudaine et violente. Au lendemain d’une rupture avec Marie-Hélène, celle qui est encore la femme de sa vie, puis d’une aventure passagère, avec une femme «placée là stratégiquement pour faire la transition entre un bonheur perdu et un avenir que je n’osais plus regarder en face», l’amour-phénix renaît de ses cendres pour y retourner aussitôt. Parce que Marie-Hélène, malgré une récente réconciliation, s’est envoyée en l’air avec un autre, comme ça, pour voir, semble-t-il, si un autre pouvait avoir du désir pour elle. Maxime-Olivier chute dans le plus sombre des abîmes. Si le train était passé plus tôt, ce soir-là, ou si le fil des écouteurs, corde de circonstance, n’avait pas bêtement cédé, à quelques secondes de la mort, nous n’aurions jamais connu cette histoire, qui se serait terminée, comme tant d’autres, sous un peu de terre, quelques fleurs et beaucoup d’oubli.
Le goût de la mort envahit sa bouche et son cour: «C’est arrivé en somme comme une évidence, indubitablement. Comme un réflexe. La possibilité de me suicider.» Après la tentative manquée – de très peu -, Maxime-Olivier se retrouve interné dans l’aile psychiatrique de l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul, bâtiment glacial et laid qui surplombe Sherbrooke. Débute une profonde introspection, relatée sans pudeur. Le nouveau fou, petit à petit, remonte le cours de son histoire, explorant tous les registres de la jalousie et du désespoir. Plusieurs jours s’écoulent ainsi, avec des percées de lumière, des envies d’ouvrir à nouveau son cour à Marie-Hélène, puis tout à coup, plus fort qu’un torrent, plus implacable que la nuit, une soif inouïe de lames de rasoirs.
Il remonte loin, jusqu’aux amours naissantes de ses grands-parents, en France, amours prometteuses, comme toutes les amours, mais qu’un petit événement, qui lui remonte à la mémoire, allait saccager. Il établit des parallèles entre son histoire et la leur, qui vérifie la puissance terrible de l’amour.
Par souci de vérité, les noms des personnes impliquées n’ont pas été changés. Certains lui reprocheront peut-être, étant donné la nature du récit – les portraits n’ont rien de ce que l’on souhaite laisser comme image à la postérité – mais l’absence complète de tricherie, l’écrivain en a déjà fait sa marque.
Maxime-Olivier Moutier a-t-il bien fait de publier ce roman? La réponse ne nous appartient pas autant qu’à lui. Nous appartient cependant, comme un joyau, l’émotion belle et crue ressentie au fil des pages, un certain sentiment de connaître mieux le cour de l’homme. On s’attache beaucoup à cette voix qui a choisi de dire la vie, mise à nu, de dire tout ce qui précède la mort, quels que soient les méandres traversés. Marie-Hélène au mois de mars est un magnifique morceau de vérité.
Marie-Hélène au mois de mars,
de Maxime-Olivier Moutier
Éditions Triptyque
1998, 166 pages