Yves Gingras, Peter Keating et Camille Limoges : Du scribe au savant
Pierre Monette
Du scribe au savant
Les Porteurs du savoir de l’Antiquité à la révolution industrielle
d’Yves Gingras, Peter Keating et Camille Limoges
Du scribe au savant est une étude des plus intéressantes. Cela malgré le fait que l’ouvrage ne tienne pas tout à fait la promesse contenue dans son titre.
Yves Gingras, Peter Keating et Camille Limoges annoncent un livre se consacrant à la figure des «porteurs du savoir». Ce qui laisse croire à une histoire de ce personnage auquel on donne aujourd’hui le nom d’intellectuel ou, ainsi que l’anglais l’exprime plus clairement, de scholar. Sauf que Du scribe au savant n’est finalement qu’une sorte d’histoire des sciences dans laquelle on s’attarde plus ou moins à signaler les apports et les statuts particuliers de tel ou tel personnage.
Cela n’en réduit pas pour autant la valeur du bouquin. On y apprend des choses fascinantes. Par exemple, que c’est seulement au dix-septième siècle, avec la découverte des spermatozoïdes, qu’on a vraiment commencé à comprendre les mécanismes de la reproduction humaine. Qu’au Moyen Age, les heures étaient élastiques, les journées étant divisées en deux: 12 heures de jour, 12 heures de nuit. Ainsi, chaque heure du jour était nettement plus longue en été qu’en hiver.
L’originalité de l’ouvrage tient pour la plus grande part à sa manière de mettre l’évolution des sciences en relation avec le contexte sociohistorique dans lequel elles s’inscrivent. C’est ce qui permet incidemment à l’ouvrage de mettre au jour une caractéristique commune aux deux grandes révolutions scientifiques de notre civilisation. Le «miracle grec» de l’Antiquité et la Renaissance s’avèrent en effet être liés par une même ouverture à d’autres cultures: la découverte, par les Grecs, des autres peuples de la Méditerranée; et les grands voyages d’exploration de la Renaissance, qui mettront l’Europe en contact avec l’Asie et, surtout, l’Amérique.
Solidement documenté, Du scribe au savant est rédigé avec une très grande clarté (ce qui le distingue favorablement de la plupart des publications européennes du même genre). A recommander à tous ceux qui aiment bien se coucher chaque soir un peu plus intelligents que la veille… Éd. du Boréal, 1998, 361 p.y