Hermann : On a tué Wild Bill
Obéissant à une passion ou à une indignation du moment, Hermann interrompt parfois Jeremiah et Les Tours de Bois-Maury pour entreprendre un récit indépendant, relevant le défi de se renouveler sans décevoir les lecteurs assidus des deux populaires séries. En 1995, dans Sarajevo-Tango, le bédéiste belge laissait libre cours à un sentiment de révolte devant l’indifférence occidentale face au conflit yougoslave. Dans Caatinga (1997), il abordait le sujet des Cangaceiros, ces bandes de paysans brésiliens révoltés contre le quasi-esclavage dans lequel ils étaient encore maintenus au tournant du siècle. Son récent On a tué Wild Bill nous transporte dans un autre contexte de crime et d’impunité, où il ne faisait pas bon compter parmi les plus démunis de la société: l’Ouest américain.
Plus qu’un traditionnel western, On a tué Wild Bill est typiquement hermannien en ce qu’il reprend un thème cher à l’auteur: celui qui est victime d’injustice et de violence apprend à survivre par les mêmes moyens. À la suite du meurtre gratuit de sa fiancée, le jeune Melvin Hubbard vit sept années d’errance, qui culminent en une vengeance, une fortune subite et la réalisation en solitaire du rêve du couple détruit: une entreprise d’élevage de poulets, image symbolisant l’approche du XXe siècle et la fin de la culture de l’Ouest alors que l’on préférait s’enrichir au poker, en volant une banque ou en se ruant vers l’or. Gravitant autour de Melvin, une galerie de personnages secondaires dont la présence est brève, mais qui sont rendus avec la justesse du dessin et l’économie de mots auxquelles nous a habitués l’auteur. Éd. Dupuis, collection Aire Libre, 1999, 56 p.