Irvine Welsh : Ecstasy
Superstar de l’autre côté de l’Atlantique, mais découvert ici avec l’adaptation cinématographique et théâtrale de son roman Trainspotting, l’écrivain écossais Irvine Welsh fait partie de cette nouvelle vague d’auteurs qui bouscule la littérature. Sorti en 1996, en Angleterre, son troisième livre, Ecstasy, maintenant offert en français, présente trois histoires syncopées qui arpentent les bas-fonds de la société écossaise. Un monde pourri, où le seul moyen de s’en sortir, c’est de «faire la fête, plus que jamais, plus fort que jamais», comme l’explique un des personnages. C’est le «fuck the world» de la génération punk _ Welsh est d’ailleurs un ancien punk ±_, adapté à cette fin de siècle teintée de rave et de techno.
On suit d’abord une auteure de roman à l’eau de rose qui découvre le vrai visage de son mari; ensuite, une fille désirant éliminer l’inventeur du médicament qui l’a rendue handicapée; et, finalement, on assiste à l’éveil d’une femme qui, écourée de son pantouflard de mari, revit grâce à l’ecstasy. Même si les premier et troisième volets sont bien menés, le deuxième semble interminable. Le récit est tellement fractionné qu’il est difficile de comprendre ce qui s’y passe exactement.
Ecstasy met également en scène des personnages caricaturaux, prévisibles: des paumés qui se défoncent, des méchants bourgeois qui se transforment en dépravés sexuels (dont un populaire animateur de télé avec un penchant pour la nécrophilie), des infirmes enragés, des scientifiques insensibles, une jeune femme blasée, un ancien idéaliste qui ne pense maintenant qu’au confort… Malheureusement, on ne s’attache pas à ces individus fort peu définis. Ecstasy est un livre où le style prime sur le fond, où les situations sont plus importantes que les gens qui les vivent.
Un peu à la façon des films de Quentin Tarantino, Welsh écrit d’une manière «vidéo-clippée», rapide, tape-à-l’oil. On s’amuse ferme, mais ça s’arrête là. Et ce n’est pas avec cette suite d’histoires que nous allons découvrir le vrai visage de cette génération qui vit de techno et de pilule de l’amour. Tout au plus, on a droit à un collage intéressant, mais anodin. Dommage. Éd. de l’Olivier, 1999, 341 p.