Pierre Perrault, cinéaste-poète : L'homme derrière l'image
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Pierre Perrault, cinéaste-poète : L’homme derrière l’image

Peu de temps avant la mort de Pierre Perrault, PAUL WARREN et quelques proches lui rendaient un bel hommage, révélateur de l’importance qu’a eue le cinéaste dans le Québec contemporain.

Il y a quelques semaines, l’un de nos grands cinéastes s’éteignait. Pierre Perrault, artiste du montage et de la plume, laissait derrière lui une oeuvre écrite et filmée très riche, dont quelques-uns des plus beaux documentaires jamais réalisés au Québec. Un gros plan sur la réalité québécoise, où se trouvent magnifiées les coutumes et la parlure des gens d’ici.

Grand ami et admirateur du cinéaste, Paul Warren a eu la bonne idée de donner la parole à ceux qui l’ont bien connu. Publié peu de temps avant sa mort, Pierre Perrault, cinéaste-poète est une collection d’hommages rendus par des collaborateurs et des proches. Chacun des trente-trois auteurs invités à témoigner de leur attachement à l’homme et l’oeuvre souligne son parti pris pour le réel, pour ce que la vie livre au quotidien, hormis les maquillages de la fiction. Ils montrent la démarche derrière les images, avec beaucoup de références aux principaux films de Perrault, dont Un pays sans bon sens (1970), La Bête lumineuse (1982) et L’Oumigmatique ou l’Objectif documentaire (1993), de même qu’à son oeuvre poétique, abondante et encore méconnue.

Parmi ces auteurs, on retrouve Michel Garneau. À travers un texte proche du poème, le dramaturge souligne l’importance qu’a eue Perrault dans son parcours personnel. Il accorde au cinéaste, dit le «capteur», le don de montrer l’essentiel, montrer ce qui rapproche les êtres de partout, parce qu’universel.

Jean-Daniel Lafond, lui, s’intéresse à l’anticonformisme de Perrault, à cette exigence réaliste qui, peut-être, explique pourquoi le cinéaste n’a jamais rejoint le grand public: «Et Pierre s’étonne encore d’être hors des sentiers battus de la mode et des médias quand, depuis plus de trente ans, il enfonce le clou de la dénonciation de toutes les aliénations du Québec dans la fiction des autres, dans les images impériales qui envahissent nos écrans et nos imaginaires.»

Lucie Roy, pour sa part, montre l’interdépendance de la forme et du fond, le lien entre le visible et le métaphorique, dans le cinéma de Perrault. Dans un texte intitulé Les Images ensauvagées: une écriture du direct, elle propose une analyse brillante des méthodes exploitées par le cinéaste pour porter le réel apparent au niveau de la poésie.

Tous les textes ne sont pas d’égal intérêt. Les collaborateurs cherchant d’abord à dégager la fibre poétique de l’oeuvre touchent davantage que les quelques-uns dont l’apport relève avant tout de quelque théorie de la communication. Quoi qu’il en soit, l’ensemble de ces hommages nous aident à comprendre la quête d’un créateur original, jamais influencé par les tendances, qui a su développer un langage propre, d’une infinie richesse.

Pour connaître et apprécier le travail de Perrault, il faut d’abord visionner ses films, partager son regard franc, sans aucun fard, sur la vie québécoise – livres et documentaires sont disponibles dans toute bibliothèque moindrement fournie. Et pour aller plus loin, il y a entre autres ce livre, préparé par Paul Warren, ouvrage à la fois savant et accessible, qui rappelle tout ce que le cinéaste disparu est parvenu à mettre en mots et en lumière.

Pierre Perrault, cinéaste-poète,
sous la direction de Paul Warren

L’Hexagone
1999, 444 pages