Sherry Simon : Hybridité culturelle
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Sherry Simon : Hybridité culturelle

Le Québec n’est plus un pays pure laine. Même qu’il ne l’a jamais été. Ne serait-ce que sur le plan de nos musiques traditionnelles. Lorsqu’un violon fait vibrer nos cordes sensibles, ces airs qui nous font taper du pied malgré nous sont des mélanges de mélodies françaises et de rythmes irlandais. Et une culture est toujours forte de ce genre de croisements: tel est le constat auquel nous conduit Sherry Simon dans Hybridité culturelle.

Malgré le fait que le titre de la collection dans laquelle l’ouvrage est publié prétende présenter un point de vue encyclopédique, cette petite plaquette ne s’empêtre pas dans une érudition trop pointue pour le commun des mortels. Le bouquin s’ouvre sur un affectueux portrait de la vie dans le quartier montréalais du Mile-End, là où le croisement des cultures n’est pas une théorie mais une pratique quotidienne. Et la suite des pages ne fait rien de plus (mais d’une manière fort éloquente) que présenter et commenter les plus grandes réussites des cultures québécoise et canadienne des dernières décennies (les livres de Dany Laferrière, Sergio Kokis, Ying Chen, Michael Ondaatje, Neil Bissoondath, les films d’Atom Egoyan, etc.), lesquelles sont les fruits d’entrecroisements culturels.

Il faut cependant préciser, comme le fait Simon, que cette hybridité culturelle n’a rien à voir avec le multiculturalisme, qui n’est souvent rien de plus qu’une perverse acceptation des différences conduisant à une forme de renfermement culturel sur soi-même. L’hybridité relève non pas du multiculturalisme, mais de la transculture: du mélange des langues, des traditions, des sensibilités. Elle est le lieu non pas d’une revendication mais d’un éclatement des identités. Ce qui ne peut que choquer les tenants d’une culture tricotée serrée: «l’être hybride pose de sérieux défis aux nationalismes», signale Sherry Simon, cela dans la mesure où, comme c’est le cas avec les sociétés canadienne et québécoise, son existence même fait en sorte que «la ligne de démarcation entres [sic] groupes fondateurs et populations marginales est mise à l’épreuve».

Le Québec a longtemps été un bien petit pays. Ce n’est pas en jouant le jeu d’un think big! à la Elvis Gratton (Bon! le journal va encore recevoir une lettre de Falardeau…) qu’on changera vraiment les choses; Hybridité culturelle permet de voir que l’avenir est à la diversité, au croisement: que le bonheur est à la bâtardise. Éd. Les élémentaires _ Une encyclopédie vivante, 1999, 63 p.