Hervé Debry : Lettres à qui vous savez
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Hervé Debry : Lettres à qui vous savez

Avec finesse, Hervé Debry aborde un sujet éminemment tabou, à plus forte raison chez les enfants. Les quinze lettres que son personnage, Jérémy, adresse au père Noël constituent une manière de journal intime, le témoignage poignant d’une réalité à laquelle on préfère ne pas penser: Jérémy est  séropositif.

C’est au père Noël qu’écrit Jérémy, dix ans, parce qu’il y croit encore et qu’il tient à ses «super baskets à lumières tournantes sous la semelle», mais surtout parce qu’il a besoin de parler. Les quinze lettres qu’il lui adresse, du 26 novembre au 25 décembre, constituent une manière de journal intime, le témoignage poignant d’une réalité à laquelle on préfère ne pas penser: Jérémy est séropositif et, lorsqu’il aura révélé son secret à l’école, il devra braver l’intolérance. Non sans peine, ni l’envie parfois de rester sous l’édredon, blotti contre son chat au ronron réconfortant.

Avec finesse, Hervé Debry aborde un sujet éminemment tabou, à plus forte raison chez les enfants, si cruels, dit-on. Dans l’histoire de Jérémy, on verra qu’ils le sont en effet, mais qu’ils ne font bien souvent que reproduire l’ignorance de leurs parents. Et l’on verra aussi que, s’ils sont capables de cruauté, ils sont aussi capables de grande ouverture. Pas fleur bleue pour deux sous, mais pas désespéré, le récit nous fait partager aussi bien les coups de cafard du garçon que ses petites – et déterminantes – victoires.

Par la dimension psychosociale, ce roman s’apparente aux «Max et Lili»: comme dans la collection de Dominique de Saint Mars et Serge Bloch (Éd. Calligram), bien connue des enfants, on ne veut pas laisser croire à nos «chers petits» que la vie est dénuée de difficultés; et le héros doit apprendre à trouver, en lui-même d’abord, les ressources pour résoudre un problème ou faire face à une situation difficile. Ainsi, Jérémy trouvera dans la parole un merveilleux exutoire. Toutefois, par rapport aux BD «Max et Lili», le roman au «je» possède l’indéniable avantage de favoriser, dès les premières lignes, l’empathie. L’argot ne devrait pas, du moins je l’espère, empêcher la voix de Jérémy d’atteindre les jeunes lecteurs d’ici. Éd. Casterman, coll. «Romans Dix & plus. Comme la vie», 80 p.