Jean-Marc Massie : La Dernière Tentation du Lys
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Jean-Marc Massie : La Dernière Tentation du Lys

Le premier «roman» du chanteur et conteur Jean-Marc Massie, intitulé La Dernière Tentation du Lys, malgré son débordement d’invention langagière, ne tient pas vraiment la route, l’outrance verbale autrement bienvenue ne masquant pas un discours politique convenu.

On observe depuis quelques années un regain de popularité de la littérature orale, principalement du conte, urbain et moderne, qu’on déclame sur tous les tons dans les soirées. Et voici qu’un éditeur, Planète rebelle, mise sur ce genre dont il fait sa marque de commerce. Mais le passage de l’oralité à l’écrit ne va pas nécessairement de soi. Le premier «roman» du chanteur et conteur Jean-Marc Massie, intitulé La Dernière Tentation du Lys, malgré son débordement d’invention langagière, ne tient pas vraiment la route, l’outrance verbale autrement bienvenue ne masquant pas un discours politique convenu.

Huit chapitres marquent différentes étapes de la vie de l’Homme Perchaude, sorte de nationaliste québécois pur sucre d’érable, survivant mutant qui espère la prochaine mutation, qui risque cependant d’être la dernière, et qui signera sa disparition définitive. Chaque chapitre est précédé d’un extrait d’une encyclopédie fictive définissant diverses mutations, coiffées d’une date: mutation aquatique (1759), mutation sur la montagne (2000), mutation épidermique (1970), oedipienne (1980), phallique (1985), obstétricale(1976), suicidaire (1995) et enfin mutation asilaire (1839).

Vaste programme. À travers une épopée qui évoque la destinée politique du Québec, l’Homme Perchaude fait des rencontres: il croise Cruse Away, le Poète Canapé (sous les traits duquel on reconnaîtra Gaston Miron), puis Salomé, le Tatoueur, les Mou-Mous en skidoo. Il y a aussi ses parents, la Démembreuse et le Boucher. Ici, le discours politique s’habille d’une langue à clés ni trop subtile ni d’une grande poésie.

«Depuis l’exil de l’Homme Perchaude à Bébec, après la dernière défaite des indéférentistes, le Pays incertain avait vu Jacques Le Grand Bourbon laisser son poste de premier ministre, sous la pression de son entourage, à l’Unijambiste qui lui avait apporté son appui, au moment de la campagne déférendaire de 1995. Autoritaire de nature et ne supportant pas, à l’instar de feu Ti-Poil, d’être contredit par son parti, il avait continué le bras-de-fer déjà engagé en 1995 avec Néant Éolien (premier ministre du Pays Artificiel). Pendant que le premier ministre incertain poursuivait sa lutte avec le premier ministre artificiel, l’Homme Perchaude, en route vers Montrivial, allait commencer la sienne avec le Poète Canapé.»

Écriture sans doute efficace lorsque déclamée à voix haute, mais qui devient vite lassante à la lecture, trop lourde, trop chargée. Une écriture qu’on entend peut-être trop, au détriment du discours qu’elle porte, qui, bien que mettant parfois dans le mille dans sa critique du caractère d’éternel «sodominé» de l’homme québécois, se dilue par grands pans en obscures paraboles. Éd. Planète rebelle, 1999, 140 p