Gabriella Giandelli : Silent Blanket
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Gabriella Giandelli : Silent Blanket

Femme, Italienne, éditée dans une jolie et sélective collection du Seuil, Gabriella Giandelli n’a pas tout à fait le pedigree de l’auteur traditionnel de bande dessinée. Aussi son plus récent album dégage-t-il un air d’étrangeté et de nouveauté qui fait qu’il mérite absolument le  détour.

Femme, Italienne, éditée dans une jolie et sélective collection du Seuil, Gabriella Giandelli n’a pas tout à fait le pedigree de l’auteur traditionnel de bande dessinée. Aussi son plus récent album dégage-t-il un air d’étrangeté et de nouveauté qui fait qu’il mérite absolument le détour.
L’action de Silent Blanket se passe dans un New York superbement dessiné, où Paul, depuis la mort de sa femme, vit seul, sans contacts ni amis, sinon les souris, les cafards et les fourmis qui meublent son appartement, les chiens du parc et les ours du jardin zoologique. Un jour, une belle et jeune voisine prénommée Janet vient frapper à sa porte. Elle prétend avoir tué son odieux de mari en essayant de se défendre, et le supplie de l’aider à dissimuler le cadavre. Une demande que le paisible héros acceptera dans un élan de confiance niaise, et ce, malgré les avertissements éhontés du chat parlant qu’il vient de recueillir. Pour Paul, c’est le début de la fin.
Au fil de l’album, dans une narration lyrique bien dosée pour ne pas encombrer les images, le héros raconte sa vie solitaire, son passé de couple: «Dans notre chambre, nous regardions les ombres étranges qui se formaient sur le plafond. On aurait dit des formes anthropomorphes, mais nous ne cherchions pas à trouver des ressemblances avec le monde réel: il suffisait que chaque nuit apporte son lot de choses diverses et indéchiffrables.»
Avec cette BD trash, où alternent violence et douceur, saleté et poésie, Giandelli impose une atmosphère tour à tour mélancolique et étouffante, dont le lecteur est tiré uniquement par les actes d’une rare brutalité qui ponctuent l’oeuvre. Ce style particulier est fort bien rendu par un dessin sobre et des couleurs claires, rappelant l’illustration pour enfants, second métier de la Milanaise de 36 ans, qui a mis en images des romans jeunesse d’auteures comme Clarice Lispector et Suzanna Tamaro. Style enfantin, voire naïf, qui fait ressortir plus gravement le drame adulte.

Trad. de l’italie par Marc Voline, Seuil, 2000, 52 p.